Wynwood University
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 L'histoire d'une thérapie de groupe [Kyle]

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MessageSujet: Re: L'histoire d'une thérapie de groupe [Kyle]   L'histoire d'une thérapie de groupe [Kyle] EmptySam 27 Déc 2014 - 14:53


   
Cassandre et Kyle

   
On dit que ça part toujours de rien, pas vrai ?
   

  Cher journal,

Je suis sur un nuage. C'est comme ça qu'on dit non ? Quand on a eu un rencard et qu'on aimerait, dès lors que notre vie toute entière en soit. Je suis devenue une atroce nunuche, depuis hier soir. J'ai les yeux qui papillonnent, j'ai le coeur au bord des lèvres et je crois que ça démarre vraiment, vraiment bien en fait. Je me rappelle de mon premier rendez-vous, avec John, au lycée. ça s'était terminé en désastre total. Ce type n'avait eu aucune attention pour moi et au moment de m'embrasser j'ai tenté de m'échapper mais trop tard, j'ai eu droit à un poulpe baveux qui m'a léché les lèvres comme un dégueulasse. Pas hier soir. Oh non, pas hier soir. Hier soir il a sonné à la porte, pile à l'heure, avec son air décontract, son grand corps tout maigre et son expression à moitié déprimée, qui s'est métamorphosée en un joli sourire lorsqu'il m'a vue arriver. Je vis encore chez mes parents, mais ma mère n'est pas du genre difficile. Elle lui a seulement demandé la profession de ses parents, alors qu'il me tendait un bouquet de fleurs magnifiques. Chirurgien, journaliste. Et grands propriétaires terriens. J'ai vu les livres s'étaler devant les yeux de ma mère quand elle m'a soufflé "tu as trouvé un bon parti, tâche de le garder celui-là" juste avant qu'il me tende son bras, légèrement réticent, pour que je l'attrape. Et à partir de là... A partir de là j'ai passé la plus belle soirée de ma vie, jusqu'à aujoud'hui pour le moment.

Si John n'était pas du genre attentionné, lui il a tout fait à la perfection, et sans efforts, manifestement, lorsqu'il m'ouvrait les portes, quand il m'a offert un repas dans un petit restau, et qu'on est sortis finalement, flâner dans les rues de Londres. Et tout ce temps là on a parlé. J'ai su qu'il avait des secrets, depuis le départ, des choses noires sans doute, sombres et enfouies, dont il ne me parlerait pas. Mais le reste, il me l'a dit. Kyle, il est issu d'une famille de grands propriétaires terriens, des parents trop absents, une fratrie de trois. Son grand frère, qu'il ne voit désormais que très peu, sa soeur jumelle, et lui. Il m'a répété plusieurs fois qu'il me trouvait vraiment belle. Et je dois avouer qu'il n'était pas mal non plus. Il a troqué ses sempiternels pulls noirs contre une chemise blanche, un jean, la simplicité à l'état pur, même si, oui, je l'ai remarqué, il a dû accorder du soin à ses cheveux. C'est drôle, tu sais, de me dire qu'il y a trois mois encore je considérais ce jeune homme comme insignifiant, inintéressant, un rat de laboratoire ou de bibliothèque qui n'avait pas d'autre but dans la vie. Mais j'ai découvert une toute autre facette du personnage, hier, une facette qui me plait beaucoup.

Si Kyle est aussi maigre c'est parce qu'il mange peu, déjà. Il a un appétit de moineau. Et son régime est strict, militaire voire ascétique. Pas de viande. Légumes et fruits, ça oui, pas de problème. Mais le reste, j'ai su que ce n'était pas sa tasse de thé. Je crois que je lui ai vraiment tapé dans l'oeil, parce qu'il s'est vraiment ouvert à moi. Il m'a dit qu'il avait passé sa vie à se battre avec son frère, sous le regard désapprobateur des gens qui s'occupaient de lui, parce que ses parents n'étaient jamais là. Sa mère menait une vie de princesse et enchaînait les soirées mondaines. Mes parents et les siens ont sans doute dû se croiser dans l'une d'elles. Si lui y était toujours convié, moi non. Mes parents considéraient que "c'est pas pour les petites filles" et maintenant que je suis une jeune adulte, j'ai encore moins envie de me confronter à ce monde-là, un monde d'apparât dans lequel j'ai vécu trop longtemps. Ne serais-ce qu'à l'université. Avec Kyle, le monde est simple. Il lévite autour de la littérature, des films en noir et blanc. Il m'a emmené dans un cinéma, dans un quartier du vieux Londres. Et on a été voir Les Temps Modernes. Je crois que je suis sortie avec le rose aux joues. A force de trop rire. J'ai découvert un univers autour de lui, quelque chose que je ne soupçonnais pas, un embrouillamini de passions qu'il jetait pêle mêle, dévorant de curiosité. Il a posé beaucoup de questions sur moi, des questions qu'il ne m'a pas posé à l'université. Si j'étais heureuse, si mes études me plaisaient. Ce que j'aimais faire en dehors de la fac. Quand je lui ai dit que j'écrivais, il a paru très intéressé. Pour la première fois j'ai eu le sentiment que quelqu'un m'écoutait. Il me fixait, en fait, les yeux dans les yeux, sans chercher à éviter mon regard, silencieux et attentif, un peu comme s'il buvait mes paroles. Et puis en sortant du cinéma, c'est moi qui ais choisi la destination. Nous sommes allés dans un bar pour boire un dernier verre, fumer une dernière clope. Et là... Là je crois que j'ai perdu pieds. Parce qu'on s'est remis à parler. C'est lui qui a ouvert la bouche.

"C'est drôle... Je n'aurais jamais cru que tu serais une fille comme ça.
- Une fille comment ?
- Aussi ouverte. Tu sais, ça fait trois mois que tu nous fréquentes, mais... En fait je t'avais déjà aperçue depuis un bon bout de temps."
J'ai eu un petit rire. Oh. Lui aussi alors. Sauf que d'habitude ça me gonfle. Là, ça m'a... Gênée. De me dire qu'il avait déjà posé son regard sur moi bien avant que je décide de fuir l'autre pachyderme ambulant.

"Vraiment ?
- Hé bien, la question serait plutôt : qui serait incapable de te remarquer ?
- Tu me dragues, ou je rêve ?
- Un peu des deux. Je dis la vérité. Tu t'es toujours un peu démarquée du lot, je ne saurais pas comment te le dire. Je te trouvais belle. Et inaccessible. On avait pas les mêmes fréquentations, tu étais très entourée. Tu as dû remarquer que moi le monde... Je m'en passerais volontiers."

Oh oui, je l'ai remarqué. Cette peur du contact physique était maladive chez lui. Il ne pouvait tout simplement pas se rendre dans un couloir bondé sans devenir tout pâle, sans paniquer. Une fois, avec les deux autres, on l'a perdu de vue. C'est Terry qui l'a retrouvé, pâle comme la mort, sur le toit du bâtiment, une clope vissée entre ses lèvres tremblantes. Agoraphobe. C'est sûr, lui et moi nous ne venons pas du tout du même monde. Il a continué, et moi je suis restée silencieuse, pour l'écouter.

"Au vu des gens avec lesquels tu trainais, ta classe, ton élégance, je me suis dit au départ... Pardon, mais que tu étais une fille superficielle. Tu sais, un joli emballage mais le vide à l'intérieur."

Je suis restée soufflée. Là, je crois qu'on pouvait appeler ça une insulte, non ? En tout cas cela y ressemblait d'extrêmement près. J'ai froncé les sourcils. Un type qui s'était montré si gentil et si prévenant venait tout bonnement de dire que j'étais bonne, mais complètement conne. Et le pire... Le pire c'est qu'il a continué, le saligaud.

"Du coup, ce soir, c'était un peu un test.
- Un test ? Tu... M'as testée ?!"

Là je crois que je me suis levée pour attraper ma veste et me barrer, la boule au ventre. Quel enfoiré, ais-je pensé à ce moment là. Se montrer si gentil pour au final me dire que j'étais une pauvre cruche. Je crois que j'en aurais pleuré de rage. Mais sa main s'est refermée sur mon poignet, douce mais ferme. Il m'a regardée, un peu suppliant je crois. Je suppose que parler comme ça lui avait demandé des efforts herculéens, lui qui n'ouvrait jamais la bouche d'habitude.

"Attends, s'il te plait.
- Attendre quoi, tu crois que je vais me laisser insulter encore cinq minutes de plus ?
- Je ne voulais pas t'insulter.
- Loupé.
- Laisse-moi finir. Si tu veux tu pourras t'en aller, après."

J'ai froncé les sourcils. Mais j'ai fini par me rassoir, les bras résolument croisés. Parce que j'étais en colère, j'avais trouvé sa façon de me parler horriblement insultante. En contraste total avec tout ce qu'il m'avait dit quelques heures et minutes plus tôt. Alors je l'ai écouté. Il a poursuivi, le visage un peu rouge, en passant la main dans ses cheveux en bataille. Gêné.

"Par test, je voulais dire que... C'est pas toi le problème, c'est moi.
- Pardon ?
- Tu es une fille comme les autres Cassandre, t'avais des amis avec qui tu riais, tu es insouciante, heureuse... et moi j'ai envie de passer un peu plus de temps avec toi.
- .....
- Mais moi je suis un type un peu... Un peu bizarre, peut-être, comme tu l'auras remarqué.
- Tu parles de ta phobie du toucher, celle du monde ?
- Si c'était que ça. Mais oui. Je voulais te demander quelque chose ce soir, mais avant ça je voulais m'assurer que tu serais apte à me supporter."

Un test, donc. Il m'avait emmenée un peu partout pour me tester. Mais me tester sur quoi ? Un film en noir et blanc, un repas végétarien ? Il a baissé la tête à ce moment là et je crois que pour le coup il rougissait vraiment. Moi je me sentais tendue, très tendue, à deux doigts de partir. J'estimais que c'était pour se rattraper qu'il disait tout ça. Il était comme les autres, finalement. Un garçon qui voulait me mettre dans son lit pour mieux me jeter après. Tu crois que ça n'a que des avantages d'être belle, cher journal ? Crois-moi, parfois j'aimerais être laide. Mais aimée à ma juste valeur. Il s'est levé, m'a proposé une clope, et on est sortis. J'ai fumé un peu compulsivement, pour oublier ce qu'il venait de dire. Mais il a continué.

"Je suis un type asocial, je n'aime ni la foule ni le bruit. Je passe mon temps à bouquiner, et j'adore les films en noir et blanc. Je mange comme un lapin et... Et je ne supporte ni le toucher ni le contact si je ne l'autorise pas. Je suis renfermé et pas très avenant. Mais..."

Il a levé les yeux vers moi, et je crois que j'ai compris. Ce que j'avais face à moi ce n'était pas un garçon qui se moquait, mais un faon. Un faon terrorisé par ce que je représentais. Pour lui il était la nuit et moi le jour. La lune et le soleil. Il devait sans doute penser que j'étais trop bien pour lui. Ou que je serais incapable de l'accepter. Un monceau de foutaises, auxquelles il avait l'air de croire dur comme fer. Et moi je n'ai plus du tout eu envie de partir.

"Mais toi tu n'as pas bronché une seule fois en voyant mes habitudes, pas vrai ?
- Non.
- Pourquoi ? La plupart des gens n'aiment pas les types bizarres.
- Moi ça me fascine. J'ai passé beaucoup d'années avec des gens qui vouaient un culte à l'apparence et aux conversations futiles. T'es pas comme eux. Et ça me plait beaucoup."

Il a eu un pauvre sourire, en tirant sur sa clope. Et moi je me suis demandée ce qui clochait chez lui. Qu'est-ce qui faisait de lui ce genre de personnes, terrorisée par le monde qui l'entourait ? Pourquoi cette peur d'un toucher étranger ? Je voulais savoir. Mais j'étais convaincue qu'il ne me le dirait pas. Et il ne me l'a pas dit. C'était un petit animal à apprivoiser. Et ça m'a plu. Tellement plu.

"C'est bien la première fois qu'on me dit ça.
- Tu te sous-estimes, Kyle. Tu es une personne intéressante.
- Suffisamment pour que tu acceptes... Disons... de passer un peu plus de temps avec moi ?"

Il voulait voir si je parviendrais à le supporter. Si j'arriverais à tenir des conversations avec lui, si je pourrais accepter ses petites manies. La réponse est oui. Parce qu'il s'est approché quand je lui ai souri et que je lui ai dit "je pense que oui" et qu'il m'a embrassée, dehors, dans la rue, devant tout le monde. J'étais persuadée qu'il serait maladroit, mais là aussi il m'a beaucoup surprise. Parce que... Hé bien, pas du tout. Il a enroulé son bras autour de ma taille et moi je crois que j'ai perdu pied, parce que personne ne m'a jamais embrassée comme ça, avec autant de tendresse et de douceur. J'ai toujours su qu'il était un concentré de gentillesse. Des petits amis, j'en ai eu pas mal, il faut le dire. Depuis que j'ai quinze ans. Mais c'étaient des histoires qui n'étaient pas faites pour durer. C'est drôle, de se dire qu'en général ça part de rien. Je n'aurais jamais imaginé sortir avec ce genre de garçons. Il me les fallait beaux, élancés, musclés, parfaits. Lui, il est grand, mince, taillé comme une crevette et il a le visage tellement cerné que je me demande s'il dort la nuit. Il est tellement différent des gens qui me plaisent d'habitude, que je me suis dit à ce moment-là que ça pourrait durer. Longtemps. Un temps suffisant pour que je m'attache à lui. Il m'a ramenée chez moi vers trois heures du matin, gentil et attentif. Et moi... Moi depuis hier je suis ailleurs. Kyle, il est loin d'être parfait. Mais c'est un puits sans fond de mystère, et j'ai envie de l'explorer. J'ai envie de tout savoir, de tout apprendre de lui. C'est une sorte de fascination, une attirance bien différente de toutes celles que j'ai pu avoir avant. Kyle, je vais m'arranger pour le revoir, souvent. Suffisamment en tout cas pour devenir accro. Je ne saurais dire ce qui me plait le plus chez lui. Je ne sais pas si une vie sera suffisante pour le découvrir. Et je me dis que ça n'a pas d'importance, du moment que je peux revivre ce que j'ai vécu hier soir. J'imagine d'ici la tête de mes anciens potes quand ils me verront à son bras. Ils ne comprendront pas. Et ça n'a aucune importance. Absolument aucune importance.

   
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MessageSujet: Re: L'histoire d'une thérapie de groupe [Kyle]   L'histoire d'une thérapie de groupe [Kyle] EmptySam 27 Déc 2014 - 3:12


   
Cassandre et Kyle

   
Ce sont des choses qui démarrent.
   

  Cher journal,

Cela fait environ... trois mois, c'est ça ? Que je me suis un peu écartée du groupe. Jim, je ne le vois plus, je me suis disputée avec Emmy à ce sujet, elle m'a dit que "j'avais changé" mais je m'en fiche, à vrai dire. Je n'ai pas rencontré plus superficielle qu'elle. Pourquoi est-ce que je la considérais comme ma meilleure amie, il y a encore deux mois ? Ah oui. Parce que je fréquentais des gens comme Sabrina, Esther, Jen, Matt, Henri et elle. Des idiots. Qui fréquentent des gens encore plus idiots. Moi, depuis un mois je suis la seule nana d'un groupe de trois garçons. Terry, Richard, et Kyle. Oui, Kyle, l'oisillon que j'ai rencontré le mois dernier en cirant mon joli petit cul sur un banc de fac dont je n'ai strictement rien à faire. Je suppose que c'est faute de trouver mieux que je suis encore là, n'est-ce pas ? C'est du moins ce que je me complais à penser, pour ne pas faire une putain de dépression nerveuse. Mes parents veulent que je sois journaliste. Moi je ne le veux pas. Et nous sommes en conflit, mais tant que je ramènerais de bonnes notes, ils seront au moins à demi satisfaits. C'est déjà ça. C'est ce que je me dis pour ne pas péter les plombs, lorsque je rentre à la maison. La journée, ça va. Parce que je crois que je suis en train de me faire des potes, des vrais.

J'ai revu Kyle à plusieurs reprises, jusqu'à ce que je lui demande, un midi, si je pouvais me joindre à lui pour manger. Son teint est passé de normal à rouge tomate. C'était assez drôle à voir. Et il a bégayé un "s-s-s-s-s-si tu veux" et je l'ai rejoint dans la cafétéria. Il était accompagné de deux jeunes hommes, deux gars de la fac de droit qui ont paru très surpris de me voir. Mais qui m'ont vite acceptée. Je suis une pro des échanges, tu sais ? Et j'ai la curiosité vissée dans les veines. ça me fait poser des questions, pleins de questions. Après le repas j'ai rejoint les autres, en prétextant que je ne les avais pas trouvé. Et puis les jours ont filé, les uns après les autres. Et je me suis écartée d'eux de fil en aiguille. J'ai d'abord arrêté de manger avec eux. Puis j'écourtais nos soirées. Je me mettais un peu plus à l'écart, mais c'est ma dispute avec Emmy qui a signé l'arrêt de notre collaboration. J'en veux plus de ces gens. Richard, Terry, ce sont deux types qui n'ont rien pour eux, ils ne sont pas beaux et leur sociabilité pourrait facilement atteindre le zéro, mais je les aime beaucoup. Je les aime beaucoup parce qu'ils sont entiers, et quand je les emmerde, ils me le disent. Kyle est plus secret. Moins bavard qu'un type comme Richard qui passe son temps à jacasser sur des choses et d'autres. Surtout ses cours. Et sa mère. Terry il écoute ça avec une oreille plus qu'attentive et il commente, de temps en temps. Quand le débat s'enflamme Kyle arrête illico de parler. Il cale son visage sur sa main, menton contre la paume, et il regarde dehors. Parfois il a ses lunettes. D'autres non. Et moi j'aime bien le regarder, parce que j'adore les secrets. J'aime surtout quand on me les révèle. Et lui, c'est un secret de la racine des cheveux, jusqu'au bout de ses pieds. Il en aurait presque le parfum, parce qu'il y a trois semaines, je me suis penchée pour lui faire la bise, et il a reculé. Oui, parfaitement, reculé. J'aurais bien retenté, pour voir. Mais c'est Terry qui m'a attrapée une heure plus tard en me disant "Ne refais plus jamais ça. Ne le touche pas." j'ai demandé pourquoi bien sûr. Il a haussé les épaules, Terry, avant de me dire "Rich et moi on ne sait pas pourquoi. Il faut pas le toucher, c'est tout."

Je n'ai pas insisté. Mais ça m'a donné encore plus envie de le fréquenter. Une certaine forme de masochisme, peut-être. Parce que ça se voit, qu'il n'est pas net, Kyle. Je ne sais pas ce qu'il a vécu pour être comme ça, et j'ai envie, tellement envie de le savoir. Mais si on aborde un peu ses peurs et ses "pourquoi tu n'enlève pas ce pull ? Il fait chaud" il préfère transpirer que de l'enlever. Et il préfère éviter mes questions, ou faire comme s'il n'avait rien entendu. Il y a un tabou derrière tout ça, un tabou énorme. La seule personne que j'ai vu le serrer dans ses bras, c'est sa jumelle, June. Terry et Rich la connaissent, moi, je l'ai rencontrée il y a deux semaines, parce qu'elle est venue le chercher pour qu'ils retournent ensemble chez leurs parents pour le week end. June, c'est fou comme elle lui ressemble. Les mêmes cernes, les mêmes yeux sombres, un corps qui pourrait passer dans le chat d'une aiguille. Mais elle, elle est enjouée, elle a le regard perçant et en éveil, elle a la malice dans les yeux quand lui on ne voit qu'une sorte de mélancolie profonde. Elle était habillée un peu comme une punk, ou une skin. Un jean, une chemise et des bretelles, un piercing au nez, un autre sur la lèvre inférieure, du vernis à ongles noirs et les cheveux en bataille. Et une paire de rangers haute. Elle m'a immédiatement impressionnée. Et elle m'a parue si fragile aussi. Elle s'est jetée au cou de Kyle. Et cette fois il n'a pas reculé. Je suppose que c'est parce qu'elle est sa jumelle. Elle doit savoir des choses. Il m'a brièvement présentée, et elle et moi on s'est entendues tout de suite. J'ai adoré cette fille parce qu'elle riait beaucoup. Malgré ce que je croyais dicerner dans son regard. Une sorte de détresse. Partagée avec son frère, j'imagine.

Je me sens bien avec eux. Ils sont différents, oui, mais pour la première fois j'ai la sensation de rencontrer des gens intelligents. Et ça me fait du bien. Je crois que je suis devenue un peu plus mature, tu ne crois pas, cher journal ? Ou du moins j'aimerais bien me le convaincre. Parce que ce soir je suis fébrile. Je viens de finir de me maquiller, j'ai une heure d'avance. Je vérifie que mon rouge à lèvres est bien mis, que mon maquillage est noir à souhait. Que ma robe noire n'a pas de plus et que mes cheveux sont bien lisses. J'ai ressorti les talons que j'avais acheté pour le mariage de Tante Eloïse, ceux qui me font mal, mais qui me font une silhouette à tomber par terre. Je me regarde dans le miroir toutes les cinq minutes, et encore, si ce n'est pas plus fréquent. J'ai les mains qui tremblent, sur le papier, parce qu'il va bientôt arriver et pour la première fois je suis à la fois excitée et terriblement stressée. Enfin, la deuxième, si on compte le soir avec Josh, et ça s'est terminé en fiasco. Et si là ça se passe mal ? Il faut que je te raconte ce qu'il s'est passé hier après midi. On sortait tout juste du self, et j'avais une heure de libre, Kyle aussi. On a laissé les mecs partir et on a fumé une clope, comme on le fait d'habitude, sous le préau du bâtiment de médecine. D'habitude, Kyle profite de ce temps pour aller à la bibliothèque, mais là il m'a proposé un café. J'ai pas refusé. Sa compagnie m'est agréable depuis le début. Mais là cette fois, j'ai senti qu'il y avait autre chose. Sa main tremblait un peu sur son gobelet de café, et il avait le rose aux joues. Quand je lui ai demandé s'il était malade, il a baissé un peu la tête, soudainement gêné. Et moi je n'ai pas compris, sur le coup. Je suis restée totalement figée quand au bout de cinq longues minutes il a dit "BON. Heu. J'aimerais bien qu'on sorte demain soir." Moi je me suis imaginée sortir avec les autres. Alors quand il a dit "tous les deux, en fait." je crois que j'ai failli lâcher mon propre gobelet. Je ne m'y attendais absolument pas. Kyle et moi on parle, oui, beaucoup, on s'entend très bien et on s'accorde sur pas mal de points. Mais de là à sortir ensemble ? C'est un garçon très spécial, quand même. Très renfermé sur lui même. Et s'il ne me plaisait pas finalement, et si ça finissait mal ? Oui, bien sûr qu'il m'attendrit, avec sa bouille de mec sérieux et torturé, bien sûr qu'il m'intéresse, parce qu'il me fait rire, mais il m'effraie aussi parce qu'il a de longs moments de silence, il a parfois les yeux dans le vague, et il ne regarde pas toujours quelqu'un dans les yeux. Et puis je l'ai vu balancer un type par terre rien que parce que celui ci lui avait touché l'épaule pour qu'il s'écarte un peu au milieu du capharnaüm d'élèves dans le couloir. Le type s'est retrouvé affalé par terre, je crois que Kyle l'a poussé de toutes ses forces. Il m'intimide. Parce que les fois où il nous regarde dans les yeux il a le regard de glace. Et ce regard, il me cloue à chaque fois. Mais j'ai dit oui. Parce qu'il me fascine, quelque part. Cela fait trois mois, maintenant, trois mois que je les fréquente. Et trois mois que je me dis qu'il m'a toujours intriguée, ce type, depuis que je me suis assise à côté de lui sur le banc de la fac. Il arrive dans une heure. Je crois qu'il va me falloir un tranquillisant. Je ne sais même pas où on va.

AU SECOURS.
   
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MessageSujet: L'histoire d'une thérapie de groupe [Kyle]   L'histoire d'une thérapie de groupe [Kyle] EmptySam 27 Déc 2014 - 2:18


   
Cassandre et Kyle

   
Un souvenir reflue, vingt ans plus tard.
   

   Cher journal,

Un petit mouton noir au milieu des blancs, voilà ce qu'il est. Voilà ce que j'ai vu pour la première fois. Un enfant, un garçonnet perdu au milieu d'une foule d'adultes. Je m'en souviendrai toute ma vie. Parce qu'il avait l'ar tellement... étranger à toute l'agitation qui régnait autour de lui. C'était un type que je n'avais croisé qu'en de rares occasions. Seulement voilà. Ce jour-là, Jim était un peu trop insistant. Et quand il était trop insistant, je cherchais toujours un moyen de fuir, de m'échapper. Ce type me draguait depuis six mois, et c'était un lourdaud pire encore que tout ce qu'on pourrait imaginer. Un sportif. Dénué de cerveau. Le genre de types que je me tapais habituellement. Mais cette fois-ci, j'en avais marre. Vraiment marre. Marre de me voir devenir un objet pour satisfaire des plaisirs qui n'avaient rien de l'idéal que je m'étais fixée. Trouver un prince. Trouver un homme. Et pas une bite sur pattes. Quelle ne fut pas ma surprise lorsqu'en entrant dans l'amphithéâtre pour la conférence dédiée au rôle de la médecine dans le monde contemporain, j'aperçus une place vide, dans le fond, à côté d'un garçon tout maigre, vêtu tout en noir de pied en cap, chaussé de petites lunettes rondes et recroquevillé sur lui même, un peu comme s'il faisait tache, dans ce décor fait d'apparence. Je ne me souviens pas de l'avoir déjà croisé, et je ne me doute pas une seule seconde que lui se souvient parfaitement de moi. Je suis belle et populaire. Mais ce genre de garçons ne regardent pas vers le haut du piédestal, il n'en voit que les racines pourries.

J'essayais d'échapper à Jim, cher journal, et je me suis dit que je ne pourrais pas mieux faire qu'en me mettant à côté de ce petit pestiféré. Alors je me suis approchée, mon sac à la main. Ce jour là j'étais habillée en tailleurs gris, j'avais fait une couette pour être plus à l'aise pour écrire. Je ne connaissais même pas son nom. Je lui ai seulement dit "Excuse moi..." et il a sursauté, violemment, un peu comme si je lui avais dit "connard" alors que j'essayais seulement d'attirer son attention. Et pour le coup j'ai assez bien réussi, non ? Parce qu'il m'a regardé avec de grands yeux, comme si je venais de l'agresser et il n'a rien dit, pas "bonjour" pas "quoi ?" rien, il s'est contenté de me regarder, derrière ses lunettes et moi je me suis surprise à l'observer. Les cheveux en bataille, mince et si peu élégant avec son pull à col-roulé, son jean délavé et la pile de cahiers qui tenait à peine sur la table. Alors, j'ai continué, un peu étonnée, avec un sourire gêné.
"...Est-ce que la place est libre ?"

Là je me suis dit qu'il allait casser sa pipe. Vraiment. Parce que son air terrifié a laissé place à une expression effarée. Mais il m'a répondu "Heu... N... Non, non." et il s'est un peu décalé, en silence, renfermé sur sa table, le nez dans son cahier, le stylo à la main, prêt à boire les paroles du professeur qui présidait la conférence. Sauf que moi j'avais pas du tout envie d'écouter. J'ai sorti, pêle mêle, un cahier de brouillon et un crayon à papier. J'ai presque cru lire un air désapprobateur sur son visage, quand il m'a regardée un peu en biais avant de coller de nouveau son nez dans ses affaires. Bizarre, ce type, vraiment bizarre.  On a passé la première demi heure de cours en silence, à gratter du papier. Lui comme si sa vie en dépendait, moi avec beaucoup plus de nonchalance. Et puis finalement sa voix s'est élevée, chuchottis à peine perceptible.

"....Tu n'es pas en journalisme, toi, d'habitude ?"
Oh. Il avait donc une langue. Et de l'observation. ça m'a faite sourire et lâcher mon crayon.
"Si, c'est une conférence que l'un de nos profs nous avait conseillé. Mais je m'ennuie un peu.
- Pourquoi ?
- ...Heu, hé bien parce qu'il a une voix assez chiante, quand même, tu ne trouve pas ?"

Je ne connaissais même pas son nom. Mais il s'est tourné vers moi, un peu plus attentif. Et la curiosité aiguisée, manifestement. Parce qu'il en a presque lâché son stylo. Je dis bien, presque.

"Ils ne sont pas vraiment là pour se rendre passionnants, ils transmettent un savoir.
- Oui... Je sais bien. Mais allez, franchement. Tu ne vas pas me dire que ça te passionne ?
- ...Non. Mais ce sont toujours des choses à apprendre.
- Tu es en quelle promo ?
- Médecine.
- Ceci explique cela."

Un bûcheur, un bourreau de travail. Il avait la panoplie complète. Je me suis dit qu'il m'amusait beaucoup. Parce qu'il avait cet air si sérieux... En contraste totale avec son envie irrépressible de discuter. ça se lisait dans ses yeux, la curiosité.

"Tu penses que les gars de médecine sont tous des intellos ?
- Non. Je pense seulement que tu colles parfaitement au stéréotype.
- C'est pas faux, sans être tout à fait vrai."

Il m'a souri, pour la première fois depuis l'échange. C'est fou ce que ça peut changer un visage, un sourire. Sourire que je lui ai rendu, d'ailleurs, moi et mes dents blanches parfaitement alignées. J'ai senti le chic type, cher journal, va savoir pourquoi.

"C'est quoi ton nom ?
- Kyle. Et toi ?
- Cassandre.
- Comme la soeur de Pâris.
- Pardon ?"

Il m'a regardée avec beaucoup plus d'attention et son stylo s'est reposé d'autorité sur la table de bois maculée de graffitis. Terminée, la rigueur, il m'avait moi et je suppose que je suis une odieuse tentatrice, mais je ne l'ai pas regretté. Parce que la suite... La suite a manqué de me faire éclater de rire. Dans ma tête, je l'ai tout de suite appelé "Mr Encyclopédie."

"La soeur de Pâris, Cassandre. Une prêtresse troyenne. Apollon la trouvait belle, alors enfant, il lui a offert le don de voyance. Plus tard, alors que Cassandre était adolescente, Apollon revint lui demander une compensation, et elle s'est refusée à lui. Alors il lui a craché dans la bouche et il l'a maudite. Elle aurait son don de voyance... Mais personne ne la croirait.
- Wouah...
- Elle a prédit l'arrivée des grecs à Troie, le Cheval d'Ulysse... Et personne ne l'a crue.
- Comment tu sais tout ça ?
- Je suis du genre à lire. ça ne se voit pas ?"

Oh que si, ça se voyait. ça se voyait même très bien, mais cette réplique a fusé, avec son petit sourire en coin et moi ça m'a faite hurler de rire, dans ma tête seulement parce qu'en vérité, j'ai pouffé. Pour ne pas me faire remarquer. Mes amis habituels n'ont cependant rien raté de cette scène. Qu'on me fasse rire, certes. J'étais une jeune fille enjouée. Mais qu'un avorton en soit capable... Cela, c'était incompréhensible pour eux. Je commençais à bien l'aimer, ce petit bonhomme. Il parlait un peu par énigme. Et comme un bouquin aussi. Rien à voir avec les autres. Les types avec lesquels je trainais d'habitude, j'entends. Je lui ai souri, beaucoup plus franchement cette fois ci, et je l'ai bombardé de questions. Pourquoi tu fais médecine ? Tu aimerais ouvrir un cabinet à Londres en médecine générale ou tu préfèrerais en hopital ? Tu n'as pas peur du sang, toi ? Tu es en quelle année ? Et il m'a répondu, patient et doux, très gentil avec un sourire un peu gêné. J'en ai supposé que peu de filles venaient l'aborder de cette façon. Mais il m'a posé des questions à son tour, ensuite, auxquelles j'ai répondu avec enthousiasme. C'est drôle, cher journal, d'habitude j'ai plutôt tendance à te parler de mon conflit permanent avec mes parents. Ou des types qui me draguent. Ou de mes copines et de leurs déboires sentimentaux. Aujourd'hui je ne pense qu'à cette rencontre peu commune, ce garçon auquel je n'aurais sans doute jamais parlé si je n'avais pas cherché à fuir la popularité par tous les moyens. Il y a des gens qui nous envient. Moi parfois, je préfèrerais être plus effacée. Mon caractère n'est pas sans rappeler mon imprudence naturelle. Mais j'ai l'impression de ne pas faire d'erreur en me disant que ce gars, il est différent des autres. Il est doux, il est calme, et il est étrange, aussi, avec son pull dont il relève régulièrement le col, son air concentré en permanence et ses yeux un peu sombres, décorés de cernes énormes, son nez un peu aquilin. Il n'est pas beau à proprement parler. Sauf quand il sourit. ça lui change tout quand il sourit. Peut-être que si je le recroise, je lui dirais bonjour, à ce Kyle. Parce que je pourrais m'en faire un bon ami. On a bien rigolé, en deux heures de cours.

On s'est séparés en bonnes connaissances, avec un grand sourire de ma part, un petit du sien. Mais un sourire, tout de même. Il a des blagues rigolotes, et un répondant cassant. J'aimerais bien le connaitre un peu plus. Il a l'air d'avoir quelque chose entre les deux oreilles. Pas comme les gens avec qui je traine, habituellement.

   
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