Heureusement que t'es là, toi ~ Sasha

« Oui, c'est bien moi. C'est lui qui t'a dit que j'étais sa soeur? » «  - Oui, c’est lui. L’autre jour il m’a montré qui tu étais, mais rien de plus. » Elle paraissait surprise que Nathan ait pu parler d’elle à quelqu’un. Peut-être ne pensait-elle pas qu’il puisse le faire. En même temps, connaissant leurs liens, je me doutais bien qu’il n’en parle presque pas. Cela me faisait de la peine pour elle. Malgré mon air de parfait salaud, j’avais des frères, et je les admirais et les respectais tellement que je n’osais même pas imaginer s’ils me reniaient un jour. Je ne m’en remettrais certainement jamais. Les aînés sont nos repères, et on s’attache très vite à ces personnes devenus nos modèles. Je comprends tout à fait son état d’esprit actuel. Je pense qu’à l’entente de cette nouvelle, elle a du fonder tellement d’espoirs en Nathan, espérant qu’il devienne son grand frère et qu’il se comporte comme tel. Malheureusement les choses se sont passés autrement, mais je ne voudrais pas laisser ça comme ça. Je sais qu’au fond Nathan ne doit pas être si bien, et je sais qu’ils seront vite réconciliés, mais en attendant, je me sens obligée d’aider Jewel à surmonter ça. Après m’être présenté, et précisé que j’étais justement le meilleur pote de son frère, elle semblait comme tout à coup refroidie. Ce qui pouvait être normal, elle pensait certainement que j’allais comme son frère la repousser et l’enfoncer davantage. Ce que certains auraient pu faire, mais je ne me sentais aucunement capable de le faire. « - Ecoute Jewel, je ne réagirais certainement pas comme Nathan vis-à-vis de toi, mais je le comprends quand même un peu. J’imagine que ça ne doit pas être facile pour toi, mais pour lui aussi tu sais. Tu risques de ne pas me croire, je me doute. » En même temps, je ne vais pas me leurrer, je débarque comme ça, elle ne me connaît pas et je lui sors ça comme ça. Dur d’avaler de telles paroles. Pourtant, il allait falloir que je lui fasse comprendre ce fait. Mais en attendant je comptais bien tout faire pour l’aider. « - Même si je sais que tu préfèrerais plus que ce soit Nathan qui t’aides, si tu as besoin de quoique ce soit, je serais là. Ca peut paraître bizarre que je te dises ça alors qu’on vient tout juste de te rencontrer, mais je ferais en sorte d’arranger les choses entre toi et lui, je te le promets. » C’est sur qu’en plus rajouter une promesse pouvait paraître encore plus absurde. Mais il fallait que je le lui dises, avant qu’elle ne croit que je ne suis que là pour l’importuner. Puis, elle me demandait quoi faire, lorsqu’on n’avait pas cours avant dix heures. Elle qui venait d’arriver, elle ne devait sans doute pas encore bien connaître les lieux, et j’imaginais qu’il était bien difficile pour elle de s’en sortir encore bien. Je savais que j’avais sciences, mais je ne pouvais certainement pas laisser Jewel seule ici, même si les couloirs se vidaient peu à peu et que les regards de mes camarades de classe se posaient sur moi, m’indiquant clairement qu’il était temps pour moi de venir à mon tour. Pourtant, je n’en éprouvais aucunement l’envie, ma seule préoccupation était de m’occuper de Jewel. D’un geste de main je faisais signe aux autres que je ne viendrais pas finalement, et me retournais vers Jewel. « - Et bien, ce lycée est bien grand, il y a tant d’endroits à voir. Tu veux qu’on aille s’asseoir quelque part ? » Je savais pertinemment qu’on n’avait pas le droit de rester dans les couloirs, c’est pourquoi je lui proposais d’aller trainer ailleurs pour pouvoir sagement discuter, et éviter de croiser un de ces agressifs surveillants qui nous enverrait bien vite chez le directeur. Autant éviter les ennuis. « - Tant pis pour les cours » Marmonnais-je attendant son accord. Je remettais mon sac sur l’épaule, tandis qu’il essayait de se barrer, et m’appuyais dos au casier, regardant les retardataires courir dans les couloirs, apparemment plus que stressés de devoir arriver en retard aux cours. Cela me rappelait mon enfance, et la peur de ne pas me réveiller et d’arriver en retard aux leçons. Ce passé maintenant révolu me faisait quelque peu rire. A présent, je me fichais bien de louper un cours, si c’était pour quelque chose que je jugeais plus important, du moins.

TUUUUUUT. Réveil de merde. Vociférant des tonnes d’injures, je ne me rendais pas compte que cela ne changerait rien à la situation et que cette pauvre machine conçue exclusivement pour vous tirer du lit, n’y pouvait rien. Les cours m’obligeaient à régler cette chose, pour subir une assommante sonnerie tous les matins. Comment ressentir une terrible migraine dès le matin ? J’avais beau essayer de le programmer pour éviter le bip strident, rien à faire, pas moyen de mettre une musique à la place. Réveil de merde. Avec un effort monumental, je sortis mon bras de la couette pour assener un coup sur la radio, et enfin le faire taire. Puis, en me donnant à moi-même des ordres, je retirais petit à petit la couverture qui jusqu’à présent m’offrait une chaleur rassurante et surtout fort agréable comparé à l’emploi du temps de la journée, qui m’attendait. Sciences le matin. Ce n’est pas que je n’aimais pas les sciences, mais dès huit heures du mat’, c’en était trop. Mon esprit et ma cervelle étaient loin d’être connectés, et la réflexion était une trop dure activité, alors que je digérais encore mon petit déjeuner. Finalement, après une bonne dizaine de minutes, mes pieds touchaient le sol et je m’efforçais de me dresser sur mes jambes, qui menaçaient de s’écrouler sous mon poids. Je m’étais levé trop vite, bien que la manœuvre ait parut longue. Première étape : une bonne douche. J’attrapais au hasard quelques fringues. Un slim, mes converses blanches que je n’avais plus mis depuis des lustres et un de mes nombreux t-shirts à imprimés. (Clique) Classique. Je n’avais pas envie de me casser la tête à boutonner une de mes nombreuses chemises et à craindre de la salir à la cantine. Me munissant d’une serviette, j’atteignais la salle de bains pour prendre une douche des plus rafraichissantes. Après m’être habillé et coiffé, je descendais à la cafétéria, mon sac sur le dos avec quelques feuilles et une trousse à l’intérieur, pour prendre mon petit-déjeuner. Croissants, tartines et jus. C’était le maigre menu ce matin. N’ayant pas trop le choix, j’attrapais un verre, me servit du jus et m’empara de deux croissants que je comptais remplir avec du Nutella. Il fallait bien donner du goût à ces fades pâtisseries. Il ne me fallut même pas dix minutes pour manger le tout, et finalement regretter de m’être dépêché. Je souriais aux dames de la cafète et remontait dans ma chambre, me disant que j’avais largement le temps de me brosser les dents et rajouter dans mon sac le matériel que j’avais omis de prendre le matin même. Calculatrice, et autre ustensile m’aidant à comprendre les quelques formules scientifiques qu’on étudiait en ce moment. Quelques formules étaient déjà précieusement et secrètement dissimulées dans la carte mémoire de ma calculatrice, histoire de toujours les avoir, notamment lors de contrôles inopinés, pour lesquels je n’aurais évidemment pas révisés. Regardant ma montre furtivement, je me rendais compte que j’étais un peu en retard, et je me mis à courir dans les couloirs des dortoirs pour atteindre l’aile B qui était à quelques étages en dessous. Plus personne n’occupait les locaux, ils étaient tous partis en cours, et j’étais le seul à courir comme un dératé pour louper les cours auxquels je refusais d’aller. Contradictoire. Arrivé dans le couloir des casiers, il y avait foule. Comme tous les matins, d’ailleurs. Impossible de s’y retrouver, c’était comme chercher une aiguille dans une botte de foin. J’essayais de repérer les élèves de ma classe, afin de m’éviter de consulter mon emploi du temps pour connaître la salle. Seulement, je ne voyais rien, même du haut de mes 1m70 et plus, lorsque je me mettais sur la pointe des pieds. Rien de rien, je ne voyais rien. Je m’avançais donc comme ça, ne regardant qu’au loin si je voyais quelqu’un, et ne me rendis pas compte que j’avais bousculé quelqu’un au passage. Tous ses livres tombèrent, et je cessais donc toutes recherches. Je me retournais, prêt à m’excuser. Mais je fus surpris de croiser cette personne en particulier. Nathan m’en avait parlé il y a peu, c’était la sœur dont il avait toujours ignoré l’existence. A vrai dire, j’avais imaginé des commentaires positifs de sa part, mais il avait vraiment du mal avec cette nouvelle inattendue. Curieux de connaître sa sœur, je me baissais pour l’aider à ramasser ses bouquins. « - Désolé, dis-je, je ne faisais pas du tout attention où je marchais. » J’empilais un à un les quelques bouquins que j’avais ramassé et les lui tendis, tandis que nous nous relevions. Je ne savais si je devais aborder d’emblée le sujet ou non. Dur à définir à vrai dire, mais je ne voulais en aucun cas jouer les mauvais garçons, c’était la sœur de mon meilleur pote et je n’aimais pas le voir si mécontent et à en voir l’expression sur le visage de sa sœur, ça devait vraiment l’affecter. Je ne pouvais pas les laisser comme ça. « - Tu es bien Jewel, c’est ça ? La petite sœur de Nathan ? J’haussais le ton, le bruit aux alentours était si fort qu’on s’entendait à peine parler. » Les gens passaient, ne faisaient pas attention à nous et nous bousculaient sans cesse, je les poussais à mon tour pour éviter qu’ils déséquilibrent à nouveau Jewel, qui semblait ne vraiment pas se sentir à l’aise dans cette foule plutôt suffocante. « - Moi, c’est Sasha, me présentais-je. Je suis le meilleur pote de Nathan. » Je ne comptais en aucun cas lui faire des reproches ou me comporter comme son frère. Bien que je le comprenais, ça devait être dur pour lui d’encaisser une telle nouvelle, qu’on lui cachait depuis si longtemps. J’aurais aussi du mal à m’y faire, il faut dire qu’à l’adolescence, plus qu’à toute âge, on a bien du mal à vraiment exprimer ce qu’on ressent, et on ne renvoie que rejet et colère, alors qu’au fond on est juste touché et blessé par un parent ayant trahie notre confiance.