Les chefs-d'oeuvre sont toujours des revanches [Emeric & Kaylee]

Samedi soir – 21h30.
Et je suis à la bourre. Pour changer me direz-vous. En retard pour quoi au juste ? Une fête universitaire sur le campus de l’autre côté, j’ai reçu un mail d’invitation ce matin et je me suis dit… pourquoi pas ? Tout simplement. De plus, j’ai besoin de me changer les idées, parce depuis quelques temps j’ai repris mes appartements à l’internat. Oh non, ne croyez pas que je me suis prise de bec avec Nate ou quoi que ce soit, je l’aime trop pour ça, c’est simplement qu’avec toute cette histoire avec Evangeline… j’ai un peu de mal. Quand il me l’a annoncé, ça m’a fait l’effet d’un mur en pleine tronche, comme si quelqu’un farfouillais dans mon estomac pour y retirer ce qui s’y trouve. Degueu.

Enfin bref, je ne vais pas vous raconter ma vie. Je dois trouver quelque chose à me mettre sur le dos, quelque chose qui n’est pas sale… non pas ici, quelque chose de potable… mouais. Il va vraiment falloir que je pense à faire le ménage un jour. J’opte donc pour un Jean slim déstructuré, un top bleu brillant et une mini veste en jean. Le temps d’attraper mon portable et mes clefs et je claque enfin la porte derrière moi. Je crois que je ne suis jamais allée sur le campus avant ce soir,
je ne sais donc pas l’endroit exact, je marche dans les rues de Miami en regardant le petit écran de mon téléphone me donner la direction à suivre. Aller à une fête toute seule ça craint vous dites ? Pas pour moi en tout cas. Le point rouge clignote, me signale que je suis arrivée, je n’ai pas le temps de relever les yeux pour vérifier que je percute quelque chose. Ou plutôt quelqu’un.

« Merde, tu peux pas faire gaffe nan ? »

Super sympathique la nana. J’en ai même fait tomber mon téléphone dans l’herbe fraiche. Je jette un bref et rapide coup d’œil à la personne dans laquelle je viens de rentrer, je plisse un peu les yeux, je crois bien l’avoir croisé quelque part, mais là, j’ai d’autres chats à fouetter. Je me hâte pour ramasser le petit objet, et sans m’excuser ni même écouter ce qu'il a à me dire, j’entre dans le grand bâtiment où se passe la fête. Je m’arrête un instant à l’entrée, j’observe, en général, j’arrive à deviner en quelques minutes si une fête va me plaire ou non, et à en croire toutes les bouteilles vides, et les étudiants de fac qui font… d’étrange choses, je pense que je peux rester ce soir. J’essaye de repérer le bar, mais un des étudiants me prend dans ses bras pour m’enfiler un collier en perle autour du cou. Cette tradition n’est-elle pas normalement pour le carnaval ou pour le spring-break en échange d’un baiser ?

Quoi qu’il en soit, je lui souris doucement, et m’éloigne de lui et de son haleine d’alcoolique. Moi aussi il faut que je picole, au moins un peu. Un peu… souvenez-vous de cette phrase. Il parait que pour oublier, c’est parfait. Et croyez-moi, je suis bien placée pour le savoir. Je me fraye donc un chemin jusqu'au fameux bar tant convoité, il y a trop de monde devant, et je suis trop petite pour me faire entendre, ou même voir. Je me retourne et tente de trouver une solution. Monter sur une table ? Trop risqué, maladroite que je suis, je serais capable de me fracturer la tête ou une connerie comme ça. Et puis finalement… j’ai une idée. Il y a ce gars devant moi, qui est bien plus grand. Je ne vois pas son visage, mais il suffira certainement d’un simple grand sourire pour qu’il m’aide. Je lui tape doucement sur l’épaule pour finalement lui demander :

« Eh toi ! Tu veux bien me porter sur tes épaules ? Juste pour choper une bouteille. »

Il se retourne enfin. Ha tiens… Sur la dizaine de personnes présentes autour de moi il a fallu que je tombe sur lui. Parce qu’il me semble bien que c’est ce garçon que j’ai percuté dehors. Et maintenant qu’il y a plus ou moins de lumières, j’en suis sûre, je l’ai déjà vu. Il me semble même qu’il fait partie d’un de ces mecs qui se prennent pour les dieux du bahut, une connerie dans le genre. Je réussi tout de même à m’arracher des excuses de la bouche, avec un sourire plus ou moins crispé. Mauvaise humeur et sobriété quand tu nous tiens.

« Ouais bon désolé pour tout à l’heure. Tu peux me porter quand même ? »