Un simple nom peut faire toute la différence... [Kaylee]

Mme Walters qui se tenait toujours devant moi ne souriait plus vraiment, remarquez, elle ne tirait pas la tronche non plus, mais elle semblait réfléchir. Et j’aurais donné pas mal pour savoir à quoi. Parce qu’après tout il s’agissait certainement de moi, de mon année, de mon frangin. L’expression de mon visage que je voulais neutre, ne fonctionnais plus, je n’étais pas tellement à l’aise désormais. Une certaine inquiétude peut-être. Je me contentais de jouer nerveusement avec la fermeture de l’une des poches de mon sac. J’avais même eue l’idée, pendant une seconde, d’envoyer un message discret à Nathan pour lui demander ce qu’était tout ce bordel. Oui, mais non. Ce serait certainement l’inquiéter pour rien.

Elle me répond que oui, elle le connaît. Sans rien rajouter de plus. Ça m’avance bien tiens… alors j’hochais simplement la tête en pinçant un peu mes lèvres, d’un air de dire ‘tu m’en diras tant…’ J’avais autant envie de partir maintenant, que de rester pour en savoir plus. Je crois qu’au fond, je suis un tout petit peu jalouse, ou possessive, appelez ça comme vous voulez. Je sais très bien la vie que mène mon frère avec les filles, et je respecte tout ça, cela me fait rire. Mais je n’y suis jamais clairement confrontée, je crois même que c’est l’une des premières fois. Alors niveau réaction… je ne sais pas trop quelle attitude prendre si ce n’est de me taire. Je me fais sans doute des films.

Passons à autre chose. Ah bon ? Bon très bien. Ma professeur reprit la parole, cette fois beaucoup moins gênée, et plus sure d’elle. Je relevais la tête pour la regarder, pour pouvoir déceler ne serais-ce qu’une petite faille. Mon dossier, en effet, si elle avait jeté un petit coup d’œil dedans, ce ne devait pas être très beau à voir. Absences à répétition, comportement qui laissait à désirer, et j’en passe. Mis elle me proposait simplement de me donner un coup de main, pour sa matière, et mon diplôme à la fin de l’année. Voilà, je vous l’avais dit, surement un coup de Nate, il avait dû vouloir m’aider, comme un frère digne de ce nom. Simplement aucun professeur ne m’a jamais proposé son aide, si ce n’est pour m’enfoncer toujours un peu plus.

« Je commence à comprendre… Il est venu vous voir hm? Ecoutez… C’est très sympa, tout ça, et je ne sais pas ce que Nate a pu vous dire, mais je pense pouvoir me débrouiller toute seule. Je suis désolé de vous avoir fait perdre votre temps. »

En effet, c’était sympa, mais j’avais un doute sur la véritable sincérité de ses paroles. Et je suis quelqu’un de têtue, presque bornée, et je sais que je peux le faire seule, je veux pouvoir prouver à tout le monde ce que je vaux vraiment. Même si au fond je n’ai strictement rien à prouver. Doucement je recule ma chaise qui crisse un peu contre le sol, et me levé, mon sac à la main. Je la regarde un instant, l’air désolé, mais les belles paroles scolaires, je n’y crois plus. Mais avant de m’en aller, Mme Walters a peut-être une dernière chose à me dire ? Je viens de refuser son offre, je peux au moins écouter ce qu’elle a à me dire…

Généralement, les cours de Mademoiselle Walters se passaient toujours bien. C'était le genre d'enseignante que tout élève rêvait d'avoir, le genre qui ne vous engueule pas, qui donne peu de devoirs, qui sait être sérieuse comme marrante. Elle était également le genre à éviter de donner des heures de retenues. Elle préférait largement s'expliquer avec l'élève en question plutôt que de le faire venir pour que celui-ci regarde sa montre. Elle faisait toujours des pieds et des mains pour emmener ses élèves en sortie, faire cours dehors, faire des goûters... Et tout un tas d'autres événements qu'elle faisait quand elle était jeune. A Washington, elle avait même réussi à emmener ses élèves au cinéma. Mais jamais, au grand jamais, elle n'avait été confronté à ce genre de situation...

"Heu… Oui. C’est mon grand frère… Vous connaissez Nate ?"

Alors Kaylee était cette fameuse petite soeur. Celle dont Nathan parlait assez souvent... Kim se souvenait que la première fois qu'il l'avait mentionné, ils venaient de se rencontrer et étaient au restaurent... Il lui avait alors dit qu'il aimait sa soeur et qu'il était légèrement protecteur avec elle. "Je veux qu'elle puisse vivre et faire ses propres expériences..." était ce qu'il avait dit.

Que répondre à l'interrogation de Kaylee ? Kimberly ne pouvait pas tout lui dire. Elle n'allait pas lui avouer qu'elle était folle de son frère et vice versa. Elle n'allait pas lui expliquer qu'un lien unique et puissant les liait étrangement... En réalité, Kim ne pouvait rien dire tant la situation paraissait bizarre, tirée par les cheveux, voir même insensée... On lui aurait confié une telle chose, qu'elle aurait rit et tourné les talons. Vite, réponds ! Que dire ? Pas grand chose en somme...

"Hmm, oui je le connais..."

Réponse bateau et idiote qui faisait penser qu'elle ne disait pas tout. Qu'elle ne disait rien du tout en fin de compte. Kim avait levé les yeux au ciel puis s'était repris rapidement. Son sourire était revenu alors que sa gêne avait définitivement disparu. Une bonne chose de faite ! Maintenant, il fallait que Kimberly se souvienne de ce qu'avait dit Nathan à propos de sa soeur, sinon, cela ne servait à rien de gaspiller le temps de cette élève.

"Il est écrit dans ton dossier que tu as redoublé cette année... Tu sais, je me ferais une joie de t'aider en anglais. Si ça peut améliorer ton niveau et te faire obtenir ton diplôme à la fin de l'année, je suis partante ! Et ne t'en fais pas, je ne mord pas."

Un sourire bienveillant illuminant le visage de l'enseignante, celle-ci attendit la réponse de Kaylee.

Je ne baissais pas mon regard, mais au fond, tout au fond de moi, j’étais quand même un peu inquiète. Son comportement tout à coup était un peu bizarre, et puis, elle ne l’avais fait avec personne d’autre. Juste moi. Ce qui m’avait valu que toute la classe se retourne pour me regarder, certains avec un petit sourire qui voulait sans doute dire : toi t’es déjà dans la merde, d’autres par simple curiosité. Quelle chance… . Mais elle m’affirma avec un sourire parfait, que non, il n’y avait pas de problème. ‘Bien au contraire.’ Aucune idée de ce que cela pouvait bien signifier, mais le principal était là. Je me contentais juste de faire un petit sourire très discret de retourner à mes petites occupations, c'est-à-dire, aucunes.

Pendant l’heure, Je jetais de simple petit coups d’œil au tableau, écrivais quelques notes, histoire de ne pas trop me faire remarquer, du moins plus que c’était déjà fait, mais mon stylo, lui préférais faire de petits dessins autour de mon classeur, des petits gribouillis, de petites phrases calligraphiées. Customisation, personnalisation, baptême, appelez ça comme vous le voudrez. Ce n’était pas de la mauvaise volonté, mais le premier jour, rares sont les cours qui sont réellement important pour l’examen de fin d’année, surtout quand on les connait déjà. Les leçons, je les connais. Ce sont mes absences et mon comportement qui m’ont portés préjudice. Rien de plus, rien de moins.

Sonnerie. Tout le monde se presse, le ton monte. Libération, du moins pendant quelques minutes, jusqu'à retrouver la prochaine salle de classe. Toujours accompagnée de certains amis qui se demande comme moi ce qui s’est passé avec la prof, celle-ci, justement, m’interpelle. Elle veut me parler un peu. On dirait bien que j’ai attrapé le gros lot aujourd’hui. Je réfléchie un instant, rester discuter avec elle de je ne sais quoi, et donc louper le début du cours suivant, ou bien refuser ? Je crois que je n’ai pas tellement le choix. Je demande à l’un de mes camardes de prévenir de mon retard, et prend place devant Melle Walters. Mon visage est indifférent, je ne dis rien, j’attends sagement, un peu trop à mon gout mais je ne veux pas laisser paraitre quoi que ce soit.

La tension est palpable. Elle a l’air d’hésiter, de vouloir choisir ses mots avec attention, comme si elle prenait des pincettes. Suspens. Je déteste ça, on ne sait jamais ce qu’il va nous tomber sur le coin de la tronche. Comme quand on vous dit ‘j’ai quelque chose à te dire.’ ou encore ‘il faut qu’on parle.’ Et puis… mon frère, Nathan. Cette fois, je ne peux m’empêcher d’avoir l’air surprise, Je m’attendais vraiment à tout sauf à ça. Surtout que la jeune femme devant moi commence à rougir. Tout un tas de questions venait faire leurs apparitions dans ma tête mais pour y voir plus clair, il faudrait déjà que je lui réponde.

« Heu… Oui. C’est mon grand frère… »

Dans le ton de ma voix, on pouvait sentir de l’incompréhension. Et la seule possibilité qu’ils se connaissent, dans ma tête, était qu’elle soit l’un de ses conquêtes. Et je priais simplement pour que ce ne soit pas l’une d’elle, qui était mécontente parce qu’il aurait oublié de la rappeler ou quelque chose dans le genre. Certes, nous habitions à moitié ensemble, mais nous avions nos vies respectives. Et si ce que je pensais était le cas, mon année scolaire serait un véritable enfer. Etait-il également possible qu’il ait pris rendez-vous pour essayer d’arranger les choses pour mon année ? J’attendais une réaction, n’importe laquelle, mais mes yeux étaient fixés sur les joues rosées de ma professeur.

« Vous connaissez Nate ? »

Cela ne m’arrangeait pas vraiment en fait. Parce que n’importe quelle connerie, n’importe quel écart de conduite que je ferais, elle pourrait lui en faire part. Nate ne se prend évidemment pas pour nos parents, mais je vous l’ai déjà dit, je ne veux pas le decevoir, je ne veux pas lui faire honte.

La ressemblance physique n'était pas frappante. C'était plutôt le caractère, voir l'attitude. Rêveuse. La petite blonde était comme perdue dans ses pensées, dans un univers bien différent et bien loin de la réalité. Quel élève n'était pas ainsi ? Mais elle, c'était d'un naturel pur et simple. Comme une attitude normale. Kimberly n'arriverait jamais à se concentrer toute l'année avec un membre de la famille de Nathan dans sa classe. La jeune femme pensait qu'ils étaient frère et soeur, mais peut-être se trompait-elle... D'un autre côté, Nathan le lui aurait dit s'il avait une petite soeur, non ?

Kim était complètement absorbée par la jeune fille, si bien qu'elle devait la fixer avec un cet air un peu bizarre. Kaylee du prendre peur et lui demanda si quelque chose n'allait pas. L'enseignante sursauta et sourit à son élève.

"Oh non non non ! Bien au contraire..."

Kimberly se ressaisit et essaya de faire son cours correctement. Apres tout, c'était le premier jour, il ne fallait surtout pas qu'elle le loupe. Elle repris très vite ses habitudes. Kim se considérait comme une prof sympathique. Les problèmes de comportements, elle les réglait toujours seule avec l'élève en question, n'aimant pas les humiliations publiques. Oui, on pouvait dire qu'elle était juste, qu'elle savait se faire respecter et que ses classes se passaient toujours à merveille.

La sonnerie retentit de nouveau, indiquant la fin des cours. La curiosité légendaire de Kimberly la poussa à interpeller Kaylee avec douceur alors que celle-ci sortait de la classe.

"Hmm Kaylee, je pourrais te parler quelques minutes. J'essayerais de ne pas faire long et si tu veux, je fournirais moi même une excuse au professeur qui t'attend."

L'enseignante attendit que sa jeune élève fasse son choix et prenne place en face d'elle. Les élèves sortirent tous dans un brouhaha monumental puis le calme revint. Kim se mordit la lèvre et ses joues se tintèrent légèrement en rose quand elle posa sa question à Kaylee. Kimberly avait l'air d'une gamine immature, mais bon, elle ne pouvait se contrôler quand il s'agissait de Nathan.

"Donc... Comment te dire ça ? ... Tu fais partie de la famille de Nathan ?"

Jour de rentrée des classes. Officiellement. Dans ma petite chambre du bâtiment des sigma mu, mon réveil retenti. Par choix, et pour ne pas être en retard, je n’ai pas dormi a l’appartement de mon frère, enfin le nôtre. J’étais simplement passé le voir hier soir, juste pour me détendre un peu avant de devoir retourner en cours. J’ai complètement foirée mon année précédente, et il m’est hors de question de faire la même chose cette année. Je ne veux pas décevoir Nathan. Et puis, comme qui dirais notre cher doyen, c’est mon avenir qui est en jeu. Les yeux grands ouverts sur le plafond, mon corps encore endormi, et cette envie irrépressible de ne pas vouloir quitter mon lit tout chaud. Pourtant, il le faut.

L’organisation, ce n’est pas mon truc. Je fais souvent tout au dernier moment. Y compris mon sac. Vous savez, quand vous êtes pressé, et que vous ne trouvez absolument pas ce que vous cherchez. Mon agenda et mon emploi du temps par exemple. Je retourne presque tout le bureau déjà bien chargé de papiers complétement inutiles, et trouve enfin ce que je cherchais. Rapidement je filais à la douche, attrapait un jean simple, mes converses, un petit top, et une chemise en guise de veste. Mon sac en bandoulière et c’était parti. Et croyez-le ou non, j’étais à l’heure.

J’avais croisé John dans les couloirs de ma confrérie, et avions décidé de partir ensemble en cours. Quel bel hasard, nous étions dans la même classe. Cela promettait d’avance. Comme à mon habitude, je me plaçais au fond de la classe, tout le monde était presque là, enfin je crois, je n’y ai pas trop fait attention, tout le monde… sauf le/la prof’. Bien joué. J’enfouissais ma tête sur mon sac, et fermait les yeux. Voilà qui devrait pouvoir me permettre de finir ma nuit. Ne pas se réjouir trop vite. La voilà, elle m’a l’air assez jeune, et surtout, elle est très jolie. Elle ne devrait pas trop avoir de mal à capter l’attention des élèves masculins. Ça change de Mr. Brigsby, un vieux monsieur aigri, et pas du tout sympathique.

Je la regardais –presque- attentivement quand elle nous fit son speech de rentrée, les présentations, tout ça. Je suis redoublante, que connais ce genre de discours par cœur. ‘Vous le découvrirez bien assez tôt’ Cette phrase me fit lever les yeux au ciel instinctivement. Oui, premier jour. Et j’en avais déjà assez. Ce n’était pas de sa faute, à cette Melle Walters, c’était son boulot, je comprends bien, et puis bon, elle m’avait quand même l’air sympathique. C’est simplement… je ne sais pas. L’éducation nationale. Et puis, c’est de mon âge de détester les cours. Enfin je crois. L’appel des élèves commença, J’appuyais ma tête sur ma main, et je m’attendais, à un moment ou à un autre, qu’on me signale : ‘ta tête est trop lourde ?’ Puis vint mon nom.

« C’est moi. »

Comment elle semblait hésiter un moment, j’enlevais ma main, et m’appuyais contre le dos de ma chaise. En fait, elle semble avoir bloqué un instant sur moi. Mon attitude ? Ma tête ? Mes cheveux pas coiffé et complétement en bataille ? Mon sac sur la table ? Une note à coté de mon nom peut-être ? Pitié ne me dites pas qu’il y a déjà un problème. Autant le demander directement et clairement. J’aurais voulu dire « Qu’est-ce que j’ai fait encore ? » Mais cette année, du moins pour le premier jour, je montrais plus de tact.

« Quelque chose ne va pas ? »

C'était la rentrée... Ô comme Kim avait rêvé que ce jour n'arrive jamais, ou arrive très lentement. En réalité, toute l'étendue du problème était là : ce fameux jour était arrivé plus tôt que prévu. Tout le monde aurait voulu prolonger ses vacances au soleil, manger tout et n'importe quoi, se coucher tard, se lever tard... Ne rien faire du tout en soi... Mais non, il fallait bien que le temps s'écoule à un moment ou à un autre... Et ce moment c'était maintenant. Malheureusement...

Kimberly s'était réveillée en retard. Elle avait réellement pensé que le terme "rentrée" n'était qu'un mauvais rêve et qu'elle avait encore un peu de temps devant elle pour se relaxer. La jeune femme s'était donc aperçue, après trente bonnes minutes de flemmardise au lit, que ce n'était pas un cauchemar, mais bien la réalité. Elle soupira une bonne centaine de fois en se préparant. La belle avait décidé de mettre une petite robe rouge accompagnée de talons aiguilles noirs. Ni trop provocante, ni trop débraillée. Exactement ce qu'il fallait de féminin et de joli.

La sonnerie avait retenti depuis au moins cinq minutes quand Kim arriva enfin à sa salle. Toute sa classe l'attendait. Elle leur fit un petit sourire énigmatique et les invita à entrer. Quelqu'un lui fit une remarque pas méchante sur le fait qu'elle était en retard. Elle regarda son interlocuteur, qui n'était d'autre qu'Aleksei, un élève qu'elle aimait beaucoup et qu'elle considérait comme un petit frère.

"Je ne suis pas en retard, M. Leonidov. C'est vous qui êtes en avance."

Kim lui fit un grand sourire, s'assit sur son bureau, croisa les jambes et entama le monologue de la rentrée. Elle fit également l'appel des élèves. En réalité, c'était pile pour cette raison qu'elle adorait son métier... Une grande gamine oui.

"Bonjour tout le monde, comme vous l'a si bien indiqué votre emploi du temps, je m'appelle Melle Walters et je serais votre professeur d'anglais pendant toute l'année. Je n'ai pas grand chose à vous dire sur la manière dont je travaille, vous le découvrirez bien assez tôt..."

Elle leur fit un petit clin d'oeil complice et entama l'appel. Elle avait déjà croisé certaines têtes et était contente de pouvoir enfin mettre un nom dessus. Puis vint un nom qu'elle ne s'attendait pas à voir dans le cahier. En le prononçant, elle se mit à rougir...

"Standford... Kaylee.. ?"

Ce magnifique nom était porté par une jeune fille blonde, au fond de la classe, complètement avachie sur sa table. Kim eut un petit moment d'appréhension : cette Kaylee allait-elle être l'élément le plus turbulent de la classe ? Kimberly n'espérait pas : elle adorait déjà cette élève...