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 La vie du loup est la mort du mouton. [Gueuse] } Ne pas archiver

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MessageSujet: Re: La vie du loup est la mort du mouton. [Gueuse] } Ne pas archiver   La vie du loup est la mort du mouton. [Gueuse] } Ne pas archiver EmptyLun 10 Nov 2014 - 14:13

Dieu... :respect: pardonne-moi cette médiocrité.



La vie du loup est la mort du mouton.



Emeric & Harmony



Croyez-le ou pas mais Emeric, l'ex-chef des rho kappa, la personnification même de l'insolence et du mépris a posé son cul en sucre sur le dos d'un cheval. Bien évidemment, le choléra sur jambes avait préféré se débrouiller sans mon aide, me faisant comprendre que mes conseils de gueuze, je pouvais me les foutre là où je pense ce qui, soit dit en passant, a failli lui coûter cher. Il avait manqué de peu d'imprimer sa silhouette dans la boue de la carrière perdant par la même occasion l'usage de son paquet et de sa dignité. Mais Emeric est comme tous bon parasite qui se respecte... tenace et increvable. Au départ, j'avais quand même eu peur pour lui, s'il tombait et se pétait le coccyx, il se vengerait … Emeric se venge toujours. Tout comme, il me fera regretter le fait de l'avoir fait monter sur un cheval, le fait de l'avoir indirectement obligé à venir chez moi, le fait d'exister, de l'avoir croisée et d'être née. Tout ça pour dire que, je n'avais aucune envie de devoir payer à vie ses séances chez le kiné. Je devais vraiment avoir un superbe karma dans une autre vie vu la tournure que prend celle-ci, j'ai tellement de chose à me faire pardonner à ses yeux qu'il me faudrait 50 vies et plusieurs descendants.

Malgré cette menace planant comme un gros nuage gris au-dessus de ma tête, l'expression de son visage, le lancée de sa botte eurent raison de moi, je ne pus dissimuler plus longtemps que j'étais vraiment morte de rire. Je ne me moquais pas de lui à proprement parler mais du comique de la situation, n'importe qui aurait pu être dans la position d’Emeric, ça m'aurait fait rire. Cependant, vous savez comment est Monseigneur Kürschner. Vous connaissez donc l'orgueil qui l'étouffe, il allait forcément le prendre comme une attaque à son ego et donc à sa virilité.

J'avais fait un commentaire sur la botte appartenant au Géant vert avant de lui enfiler au pied comme le prince avait fait au pied de Cendrillon et intérieurement, je fis les paris concernant sa réplique car pas de doute, il répliquera. Je pariais 1 dollar que ça prochaine réplique serait une attaque à mon physique. J'ajustai ses étriers et perdis mon pari.

- Un peu comme tout ce qu’il y a ici. Tu devrais être habituée. Son ton était glacial, Monseigneur Kürschner était vexé.

Puzzle ne faisait pas un seul mouvement malgré les ordres du clown sur son dos, je voulus prendre les rênes mais c'était sans compter l’orgueil-jamais-endormi d'Emeric:

- Ça va, lâche ça. Je fais assez de sport pour savoir me débrouiller avec ton activité de tapette. Je t’ai déjà dit que j’avais pas besoin qu’on me materne.

-De taaapette ? m'offusquai-je secouée des restes de spasme dû au fou rire précédent. Et c'est un cycliste qui me dit ça ? Tu peux m'expliquer en quoi faire la danseuse dans ton moule bite à quelque chose de viril ? Je me redressai en croisant les bras et en le dévisageant, le défiant du regard : Kürschner, j'attend que tu m'expliques avec tes manières si précieuses, si théâtrales.

Que les choses soient claires, je n'ai jamais rien eu contre les cyclistes, ni contre les homosexuels, et je n'ai pas l'esprit étriqué de ce cher jeune homme à penser qu'homme efféminé égal tapette, simplement, il a le don de me faire rager et le pire, c'est qu'il a pas besoin de se forcer pour ça. C'est bien ce que je dis, regardez donc son visage prétentieux, insupportable!

Après ces échanges affectueux, je lui expliquai globalement les principaux mécanismes pour diriger son cheval. Il m'écoutait attentivement, ça faisait bizarre de parler plus que lui et surtout... d'être écoutée. En temps normal, Emeric ne m'écoute pas ou plutôt, devrais-je dire : il prend un malin plaisir à me faire comprendre qu'il ne m'écoute pas, que je ne suis rien, le néant, qu'il se fout de ce que je pense. Maintenant, la part d'inintérêt et d'intérêt qu'il porte à mes propos reste un grand mystère pour moi, bien plus que le mystère de la mort. Le démarrage fût laborieux mais il finit par comprendre le truc, bon, c'était maladroit mais il faisait des efforts et rien que pour ça, je m'estimais "heureuse". Cependant, j'eus beau lui répéter qu'il tenait ses rênes trop courtes, il m'ignora, comme si, la notion "femme qui donne des ordres ou conseils" était liée à sa surdité clinique. Pour le reste, vraiment, il faisait des efforts. Une conclusion prit vie dans mon esprit à force de l'observer s'agripper aux rênes : sois tu ne te sens pas à l'aise parce que c'est ta première fois ce qui est normal mais si on pousse l'analyse un peu plus loin, bah tiens donc! Mon cher Emeric... dis-moi, est-ce que par hasard, tu n'aurais pas peur de perdre le contrôle de ta vie? Information emmagasinée et à vérifier.

-Eh ! S'écria l'allemand lorsque Puzzle décida que non, on ira pas tout droit mais vers le centre. Parce que oui, mon cher Emeric, la vie est ainsi faite. T'as beau tenir fermement les rênes en main, parfois elle décide de te faire un pied de nez digne des plus grands fourbes de l'histoire de l'humanité.Mais qu’est-ce que tu fous ?!

Mon hongre se dirigeait vers moi, j'eus un sourire non pas parce qu'en même temps, il foutait la honte à Emeric, mais parce que ce cheval, je l'aimais autant qu'un frère. Depuis mes 8 ans, alors qu'il était encore qu'un jeune poulain nous ne nous sommes pas quittés, forcément ça crée une certaine complicité. On a grandi ensemble, on se connait et on se fait mutuellement confiance. Je connais ses qualités et ses défauts, ses peurs, ce qu'il aime et ce qu'il déteste. Et le voilà, qu'il vient à ma rencontre. Peut-être que si j'avais poussé mon analyse bien plus loin : ma comparaison maladroite du cheval qu'on dirige comme on tente de diriger sa vie, j'aurais peut-être pu comprendre qu'Emeric ne sera pas un inconnu dans ma vie. Que cela me plaise ou non, nos chemins devaient se croiser, c'est comme ça, une sorte de passage obligatoire. Toutes les rencontres nous font grandir même les pires et notre rencontre ne faisait pas exception à la règle. J'étais trop jeune pour le comprendre, mais même l'infecte Emeric avait des choses à m'apprendre sur moi-même afin d'évoluer et malheureusement de grandir.

Sans lui crier dessus mais quand même blasée de le voir subir sans pouvoir agir, je m'écriai : -Mais dirige-le ! Et donne des jambes ! Les deux en même temps, évidemment.

- Mais c’est ce que je fais, putain ! Compteur de gros mots bloqué à 28, j'ai arrêté de compter ensuite.

Je le fixai silencieusement, le cheval s'arrêta mais il le fit repartir en râlant ou jurant ou... les 2. Je me souvins de nos propos échangés un peu plus tôt lorsque j'avais sous-entendu que c'était peut-être lui la dinde de l'histoire. Il m'avait fixé en penchant la tête et un sourire s'était dessiné légèrement sur ses lèvres, j'avais opté pour changer de sujet. Après tout, je ne le connaissais pas assez pour parler de ça et son sourire intraduisible m'avait mise mal à l'aise. Il ne lâcha pas le morceau pour autant à croire que j'avais mis le doigt où il fallait.

- C’est ça. Et t’as un orgasme chaque fois que tu lis un paragraphe des Cinquante nuances de Grey ?

Calmement, j'avais répondu que non, je ne lisais pas ce genre de livre. Mais son commentaire me donna un peu d'espoir sur le genre de livre que lisait Emeric... s'il savait lire. Mon esprit sans logique sauta au moment du long monologue, qui m'avait laissé presque sans voix.

- Vois-tu…Ma mère, puisqu’elle en a eu les moyens, a eu la présence d’esprit de payer une nurse, pour « changer mes couches puantes ». Un peu comme je paye un mec pour nettoyer ma bagnole. Attention. C’est pas pour ça qu’elle ne m’a pas aimé. Et c’est pas pour ça que j’aime pas ma voiture. C’est simplement qu’on a ce qu’on appelle communément l’esprit pratique. Perdre son temps à patauger dans la merde, quand il y a tellement plus excitant à faire, c’est bon pour les scato’ et les bouseux qui n’ont décidément rien de mieux à foutre de leurs journées. Tu crois que c’est normal, d’avoir à t’infliger la souffrance pour quelque chose ou quelqu’un que tu aimes, au nom de pseudo-principes débiles ? Bah je vais t’apprendre quelque chose : non, ça ne l’est pas. Sérieusement. Qu’est-ce que tu t’imagines ? Que tes chevaux vont t’écrire un éloge, parce que t’as un peu sué pour eux ? La vérité, c’est qu’ils n’en ont probablement rien à branler – et qu’ils ont bien raison, parce que dans le font, ils ne t’ont jamais rien demandé. Ils vont pas te jeter moins facilement de leur dos parce que t’as raclé leur merde à la main pendant qu’ils se sont fait chier comme des rates crevés dehors, accrochés à un poteau. Personne ne te sera reconnaissant d’avoir souffert pour lui. Personne ne t’en voudra de ne pas l’avoir fait. Dans quel monde tu vis ? C'est vrai ça, dans quel monde je vis ? Ce monde ne me correspond pas, ce n'est pas moi. L’amour que quelqu’un te porte ne se calcule pas aux gouttes de sueur que t’as pu verser pour lui. C’est pas comme ça que ça marche. Alors, en toute franchise, quand t’en arrives à te sentir obligée d’endurer des merdes sans plaisir pour un truc ou quelqu’un, mieux vaut t’en débarrasser. C’est que ce n’est plus qu’une épine dans ton pied.

Je l'avais stupidement dévisagée assommée par sa longue tirade.

- Tout ça, ta rigueur en carton, là, dans le fond, c’est dans ta tête. Tu pourrais tout aussi bien te servir du temps que tu perds à faire tes… échanges masochistes de bons services pour partager un plaisir réciproque. Je sais pas, moi. En les caressant plus longtemps, par exemple.

Reprenant mes esprits, j'avais baissé la tête en soupirant. Avait-il tort? Non! Avait-il compris mon message? Non plus. Nous ne pouvons pas nous comprendre Emeric parce que nous n'émettons pas sur les mêmes ondes, parfois, je capte quelques bribes de tes messages et, je suppose qu'il en va de même pour toi mais ça s'arrête là. Ces bribes sont trop incomplètes pour nous permettre de communiquer. Alors, bordel ! Pourquoi est-ce que j'avais tenté de rétablir le contact perdu au lieu de rester dans mon mutisme si confortable ?

-Je ne cherche pas la reconnaissance sinon, je ne perdrais pas mon temps par exemple à discuter avec toi ou je ne m'habillerais pas… en gueuze. Ça va te surprendre mais globalement je suis d'accord avec toi. Seulement, moi je parlais de l'importance du sacrifice dans une relation. On ne peut pas que prendre du bon temps, il y a aussi des sacrifices à faire.

Sa mère a même pas changé ses couches ? C'est quoi... un sacrifice de rien du tout ? Ça renforce les liens, l'être en face se sent plus aimé. Non, l'amour ne peut pas être basé que sur la joie, les rires, l'agréable, il y a l'envers de la médaille sous la forme de sacrifice. Je ne peux pas être d'accord avec ça ! Tu me parles de temps mais tu es bien placé pour savoir que les seules personnes capable d'acheter du temps ce sont les riches, on a beau faire croire aux pauvres que l'argent ne peut pas acheter du temps. Bien sûr que si, l'argent peut pratiquement tout acheter sur cette terre. Alors, si tu me donnes plusieurs millions, je veux bien m'acheter un tracteur, une femme de ménage pour gagner du temps et faire autre chose. Mais tu ne me donneras pas 1 million, tout comme tu ne changeras jamais les couches de tes gamins, le débat est clos et on en a fini pour ce box.

En le voyant sur ce cheval au milieu de la boue, je me demandais quel genre d'enfance il avait subi pour devenir ainsi. Quel genre d'enfant était-il ? Quelle éducation avait-il reçue ? Était-il plutôt l'enfant peureux caché dans les jupes de sa mère ou le petit diable se goinfrant de bonbon sous la table ? Qu'est ce qu'on avait ancré comme connerie dans sa jeune tête innocente ou qu'avait-il bien pu vivre pour se transformer en monstre de prétention et de mépris pour ceux qui sont différents et faibles ? Je peux pas concevoir qu'une mère ne change pas les couches de son propre fils, qu'Emeric ne lave pas sa voiture lui-même ce n'est rien mais qu'une mère refourgue ce travail à une autre, c'est juste inadmissible. Ou alors, je vis vraiment dans le monde des bisounours comme me l'avait si gentiment fait remarquer Kevin ?

Je l’appelai et il dirigea le cheval jusqu'à moi. Je lui annonçai la bonne nouvelle : il en avait fini pour cette matinée.

- Je pue, je viens de me muter en gay et je suis certainement devenu eunuque, à défaut d’avoir fait quoi que ce soit de… sportif.

J'eux un petit rire en l'entendant geindre sur sa fierté envolée. Pendant que je m'installai sur la selle, je commentai : - Toi un eunuque ? Il faudra plus que quelques minutes de cheval..

- Mais je pense avoir survécu.

Je lui permis de partir en pause, dans ses yeux il y avait plus d'étoiles que dans la galaxie toute entière cependant, la joie sur son visage allait être de courte durée. Lorsque je terminai ma phrase lui annonçant son nouveau titre de chef cuistot, j'eus l'impression d'y discerner la même déception, injustice et le même sentiment de profanation que les fans de Star Wars découvrant que leur série préférée allait être adaptée par Disney.

- Quoi ?!

J'étais déjà partie au trot, ayant suffisamment supporté ses plaintes pour la matinée, un peu de répits me ferait du bien. Mais c'était trop demander à Emeric qui trottina derrière Puzzle. D'un oeil extérieur, ça pouvait faire l'amoureux transi qui venait de se faire jeter, la réalité était bien différente.

- Eh ! Je suis pas ici pour jouer à l’apprentie femme au foyer, putain ! Des plaintes en veux-tu en voilà. Je l'ignorai me demandant pourquoi il était là, si ce n'est pas pour obéir à mes ordres. Génial.

Je pensai que le diable était parti ruminer sa rage mais lorsque j'entendis sa voix nasillard m'interpellait alors que j'étais au galop, je compris que c'était trop beau pour être vrai.

- Une pisseuse de six ans pourrait faire ça. J’aurais pu aussi. Alors quoi ? T’avais trop peur que je te ridiculise ?

Je stoppai mon cheval devant Emeric, celui si le renifla et frotta sa tête avec force le repoussant en arrière. Je le dévisageai, ce mec était... non il y a pas de mot suffisamment fort pour le décrire. S'il n'existait pas ça me fait mal de le dire mais il aurait fallu l'inventer, c'est là qu'on comprend qu'on ne peut que croire en la réincarnation sinon comment des mecs comme Emeric aurait pu être aussi gratiné en 1 vie. Il est surprenant dans tout ce qu'il fait ou dit, je suis incapable de prévoir ses réflexions bien qu'à force de le supporter, je commence à le voir arriver comme un camion poubelle (on le reconnait à cette odeur âcre de détritus avant même de l'apercevoir).

-Non, je voulais juste t'épargner et te laisser avoir des descendants. Mais, tu as raison tu t'es bien débrouillé, demain on attaquera le trot. Je fis repartir Puzzle au trot sans plus de procès.

Je pensai profiter de ce moment de détente loin de lui et de sa désagréable voix plaintive malheureusement, je m’aperçus bien vite que même sans qu'il soit la physiquement, sa présence ne me quittait pas l'esprit. Je fis un constat qui m'arrachait la gueule mais qui était malheureusement véridique : Emeric était plutôt beau garçon. Qu'est-ce que Dieu avait avait bien pu se dire en façonnant ce mec : ”J'ai une super idée les mecs, on va créer le macho parfait ”. C'est très réfléchi, du travail pointilleux et de qualité et donc tout à fait sadique. Parce que si Emeric avait juste été con et prétentieux avec une tête immonde, il aurait jamais pu devenir ce qu'il est à l'heure d'aujourd'hui et les meufs auraient été plus difficiles à mettre dans son lit. La nature est quand même comique vous ne trouvez pas ? Ils ont donné à ce mec les outils pour pouvoir exercer sa domination avec plus de facilité. C'est surement pas le mec le plus beau de Wynwood, mais je pouvais affirmer que la position qu'il occupait n'était pas non plus étrangère à sa gueule. Pendant que je débattais avec moi-même à propos d'Emeric, je ne me doutais pas une seule seconde que lui était rentré dans la chambre de mon frère et l'avait questionné sur ma plus grande peur. Et que, alors que j'entamais une diagonale en pensant : “ Pourquoi la nature ne l'avait pas dotée d'un visage ingrat, il serait tellement plus facile à mépriser...malheureusement mon bourreau avait plus des allures de Phoebus que de Quasimodo que ce soit physiquement ou dans sa mentalité. Heureusement que je n'ai rien d'Esmeralda. Et si, je relisais ce livre ? ” Emeric, lui, était accroupi à la recherche de grosses araignées.

Je devais préparer le repas et abréger mon tour à cheval. Sans oublier que je devais encore rentrer les démons dans leurs boxes. Je pansai Puzzle avant de le rentrer en l'embrassant sur les naseaux, vins le tour de Danseuse qui contre toute attente décida de pas faire sa chieuse. Elle a compris que j'étais sur les nerfs. Instinct féminin peut-être ? Ce fût au tour de Slipping away qui choisit bien son moment pour me bousculer et me faire atterrir sur les fesses dans la boue, il s'éloigna en trottinant. Il était hors de question de lui courir après et de toute façon, j'allais les nourrir, il reviendra pas par lui-même.

J'arrivai avec la brouette contenant le repas des chevaux et versai les granulés dans leur mangeoire. Immédiatement, l'étalon blanc décida qu'il était peut-être temps d'arrêter de jouer avec mes nerfs et de rentrer. Je le fixai, il était fier se tenant devant moi.

-Un problème monseigneur?

Il gardait une bonne distance de sorte que je ne puisse pas l'attraper. Maintenant, je vois Emeric à travers ce cheval... c'est devenu une maladie. Il est temps que je consulte un psy...
" -bonjour mademoiselle quel est votre problème?
-Et bien en fait, je fais une sorte d'obsession maladive sur Emeric, je le vois de partout même dans les plantes et les animaux...
-Intéressant continuez, me dira-t'il en finissant son sudoku. "

Quelle horreur ! Putain mais qu'il aille se faire foutre! Je revis son visage triomphant quand il avait abordé le sujet de mon père, j'avais pourtant été claire mais il s'était pas démonté et m'avait demandé dans le box entouré par cette odeur de fumier:

- Qu’est-ce qui a changé ?

Il pensait sincèrement que j'allais révéler l'histoire de mon père là, les 2 pieds dans la merde ? J'avais ignoré sa remarque et repris le travail sans piper le moindre mot. C'était à ce moment qu'il m'avait sorti cette phrase raffinée :  " Comme la bouffe, tout ce qu’on vous demande, c’est jamais que d’être bonnes, hein. “ Vous voulez que je vous dise le pire dans cette phrase, c'est qu'il a pas tort. Au fond, qu'est-ce qu'on demande à une femme ? Qu'elle fasse des gosses, baise et surtout qu'elle ferme sa gueule. Moi si j'avais le choix, j'aimerais devenir un homme. Pendant que le venin d'Emeric empoissonnait mes veines, lui s'amusait à envoyer un SMS à son pote Trey avec MON portable. Je dois impérativement m'éloigner de ce mec, mon intuition est formelle, il est néfaste et je ne parle pas de son arrogante méchanceté mais bien de quelque chose d'autre, quelque chose d’insaisissable. Je plongeai dans les yeux sombres de l'étalon : lui ouvrir le box ou le laisser dehors en prenant le risque de ne plus le revoir?

Je m'éloignai ramenant la brouette dans le hangar et, prise de remord, je fis demi-tour. Il était plaqué contre la porte de son box à tenter de choper des grains dans son mangeoire. Je m'avançai vers lui :

-Tu as vu dans quel état tu as mis ta robe, hein? C'est qui, qui va te panser pendant plusieurs heures ? Tu aurais pas pu être noir ou je sais pas moi... bai au lieu d'être la couleur se tachant le plus au monde! Emmerdeur!

Il émit un petit hennissement visiblement il voulait que je me magne à ouvrir son box.

-Allez recule, recule ! Il finit par obtempérer, j'avais attrapé la longe de son licol l'obligeant à obéir. Alors qu'il allait se jeter comme un bourrin sans cervelle dans son box, je l'en empêchai. Il piaffait grattant rageusement le sol. J'attendis quelques secondes et ayant d'autres aspirations dans ma vie que mourir écraser contre la paroi d'un box, je décrochai son licol et il trotta jusque dans son box percutant les murs dans un vacarme assourdissant. Je refermai la porte en soupirant, il serait temps que j'arrête de remettre au lendemain le dressage de ce cheval, il vieillit de plus en plus mal.

C'est donc épuisée, le cul boueux que je retournai à la maison. Je pris une douche, enfilai un short et un t-shirt de concert de métal. Je me contrefichai d'exhiber mes jambes blanches. La douche me donna un peu plus de courage pour affronter le sarcasme et les pointes d'Emeric. J’appelai le diable dans la cuisine et son visage faussement angélique vida mes batteries de leurs dernières ressources... qu'est-ce qu'il préparait encore bon sang ! Bordel mais il me sourit en plus le con... il a fait une connerie c'est pas possible autrement.

- Alors ? Comment s’est passé ta petite escapade à cheval ?

Je ne fis pas le lien avec un des messages de Jack. Qu'est-ce que ça pouvait lui foutre ! J'avais le sentiment d'être passé au scanner mais je chassai cette idée après tout, pourquoi Monseigneur prendrait la peine de profaner ses prunelles en matant un thon. Il était agréable, j'allais pas lui rentrer dans le lard malgré ma mauvaise humeur... à laquelle il n'était pas innocent. Il semblait d'excellente humeur peut-être que la douche l'avait requinquée et que j'étais médisante sur ce pauvre Kürschner. Je lui demandai s'il y avait des aliments auxquelles il est allergique.

Je lui tournai le dos et n'eus pas le privilège de voir un deuxième sourire sur son visage.

- Non, mais…

Je commençai à sortir les aliments, j'avais perdu suffisamment de temps avec Slipping away et le gamin de 10 ans que j'avais en charge, mon père allait finir par rentrer et rien sera prêt. Pas qu'il me le reprochait, non pas du tout mais moi je n'aimais pas ne pas faire correctement les choses. Je me retournai enfin vers lui pour avoir son point de vue, il avait les lèvres pincées.

- En fait, je…

J'alignai les aliments le temps qu'il accouche, il veut me dire quoi ? Qu'il vient de la planète TrouDuKU ? Ça expliquerait beaucoup de choses. Emeric m'avait fait perdre suffsament de temps si monseigneur avait du temps à revendre ce n'était pas mon cas. Je lui confiai la salade César pensant à tort que ça ne serait pas bien compliqué. C'est alors que je sentis des mains s'abattre sur mes épaules ce qui me raidit. Il me repoussa et m'obligea à me retourner, j'étais pétrifiée … d'où il pose ses sales pattes sur moi ? Je le gifle s'il s'approche, je jure que je le gifle... ou alors je finis comme la proie prise au piège par le prédateur... j'attends que la mort m'emporte priant pour ne pas trop souffrir.

- En fait, insista-il.

Le sortilège se rompit quand il ouvrit la bouche, je reculai d'un pas : distance d'un bras et demi avec lui. Je le fixai dans l'attente de la suite.

-Oui ? Questionnai-je.

- Je peux seulement manger des trucs cacher. Ce qui veut dire que la viande… Il désigna mon frigo. Cacher? Ne peut qu’être issue d’une bête qui rumine et qui a les sabots fendus. Comme… Je sais pas, moi. La vache, le bœuf ou le cerf et la chèvre, par exemple. Ou la gazelle. Ou l’oryx. Bref, tous ces trucs-là. Mais le porc ne ruminant pas… Il secoua la tête d'un air contrit qui ne lui allait pas du tout. C’est taref. Les produits de la mer sans écailles ou nageoires ? C’est taref. 

Il leva sa main au ciel, je suivis le mouvement et ramenai mes yeux sur son visage quand il la laissa tomber. Taref ? Ta ref ? Mon dieu, je crois que notre connexion lag encore plus qu'avant.

- Mais c’est pas grave. La volaille, c’est cacher. On n’a cas faire avec ça. Bon. Normalement, un chomer doit l’avoir cachérisée avant mais je peux faire un petit écart... 

Il prit entre ses mains tous les produits laitiers et, bordel mais quelle langue parle-t-il ?

- Ça… il sépara les aliments alors que je n'écoutai même plus vraiment... trop d'informations qui ne faisaient référence à rien. C'est lui qui était taref et cacher ! touche ni la viande, ni les ustensiles qui viande, sinon c’est taref. Il faut une vaisselle pour les produits laitiers, une autre pour la vian...

Je le fixai paumée et ça devait se voir sur mon visage, il continua tout guilleret chantonnant presque, ce qui eut le mérite au moins de ramener mon attention sur le sens de ses propos.

- Tu ne cuiras pas un chevreau dans le lait de sa mère.Surtout pas de vin. Le tien est yayin nesech. Et ça… dit-il en secouant la bouteille de lait. C’est imbuvable, en fait. Ça, ça, ça, ça et ça, énonça t'il en désignant les ustensiles. il faudra d’abord les immerger dans un mikvé. 

Mikuvait? ... Houston répondait! Ici la terre !

- Et ça, il faudra que je les allume moi-m… Oh-mais-merde !

Sa paume s'écrasa contre son front toujours aussi théâtral ce cher Emeric. Je le fixai cherchant où pouvait bien se cacher son foutu bouton pour éteindre le moulin à parole qui lui sert de bouche.

- Je suis con. Il était temps de t'en rendre compte. De toute façon, la cacheroute cacheroute? Cachenez cacheoeil cachemire choucroute … répétait mon cerveau las de ses explications. C'est bon la choucroute en plus.  suppose, n’a pas été fait ? Je ne sais même pas pourquoi je te pose la question. …Donc tout est taref, ici !

Taref? tiens le revoilà celui-là. Il haussa les épaules pendant que je me frottai le front, je vais avoir un mal de crâne. On l'a perdu, heure du décès 11 h 26.

- Mais si vous voulez, je vous invite au restaurant ?

Je le regardai le croyant qu'à moitié, trop théâtral pour être vrai, trop gentiment dit pour être sincère.

- Quoi ? T’as besoin de voir ma bite pour me croire ?

Le mot bite me réveilla immédiatement : - Non je veux pas voir ta bite ni rien du tout d'autre !

- Ou t’es chrétienne et tu t’en remets pas que je puisse renier Jésus dans mes prières ? C'était donc pour ça qu'il parlait de "bite", j'avais pas compris le rapport mais il doit être circoncis par rapport à sa religion d'où son alimentation stricte. Ah tout s'explique. Génial, j'adore en apprendre plus sur la vie sexuelle de ce mec !

- tu crois bien en ce que tu veux mais une seule chose est sûre le diable existe !

Il tapota ma joue avec son sourire moqueur, j'eux un mouvement de recul et surtout de défense lui donnant un coup de poignet dans le bras... rien de bien agressif, mais ça a suffit à faire dévier sa main de ma joue.

- C’est bon, reste avec moi. Je plaisantais. Je suis juste allergique au gluten et aux lactoses. Et végétalien.

Je tombai des nues. En fait, mon cerveau coulait par mes oreilles.
" -Docteur... j'en peux plus d'Emeric libérez-moi... "
Je reculai de nouveau, ne comprend-il pas la putain de communication qu'on nomme proxémique ?!

Je tendis mes mains devant moi : -Attends ! Donc quoi, t'es végétalien ? Toi, le TOP de la chaîne alimentaire ?

Il mentait c'est pas possible.

- Sans rire, hein. Au fait, tu peux me dire où sont les toilettes ?

Je vais le noyer dans les chiottes, si je tire la chasse en disant qu'une grosse merde bouche l'évacuation, on y verra que du feu. Je montai à l'étage et m'arrêtai en lui désignant le toilette d'un geste de la main sans l'accompagner : -au fond à droite. Je vais voir ce que je peux faire avec ton régime alimentaire !

Enfin du calme ! Bon... pas de viande donc ? J'hésitai devant les aliments. Végétalien ça veut dire qu'il peut pas manger d'oeuf aussi, non ? Putain, j'en sais rien... Il fait vraiment chier jusqu'au bout ce mec.

- J’aime pas le mouton, l’agneau,

-AH ! sursautai-je... bordel mais tu comptes surgir dans mon dos comme ça, à chaque fois ? m'écriai-je irritée. Il continua sur sa lancée, si bien lancée en chemin. les fruits de mer, le riz et la laitue. Mais comme tu vois, j’aurais vraiment pu être pire. Puis comme t’es une hôte super attentionnée, je vais même faire l’effort de le manger, ton riz. La salade, par contre, ça va vraiment pas être possible. On est d’accord ? Bien !

Je le fixai en arquant un sourcil, il souriait provocateur tout en lavant ses mains délicates à l'évier. Il ment ou pas ? Qu'importe ! Je retournai devant mon plan de travail : - Bien, merci pour ton "effort" finis-je par dire en coupant les tomates.

Emeric faisait face à la salade, je croisai les doigts pour qu'il me laisse ruminer en paix mais non, à peine 10 secondes montre en main pour qu'il m'interpelle.

- Ta salade, là, tu crois vraiment que je sais cuisiner ça ?Je sais même pas ce qu’on tape dedans. Je posai le couteau (sait-on jamais dans un élan que je le poignarde avec) et pivotai vers lui:

-Tu as essayé au moins ?

Emeric et moi-même soupirâmes exactement à la même micro seconde lorsque je lui dis que j'allais lui donner les instructions étape par étape. Ce que je fis, néanmoins je ne me gênai pas pour lui faire remarquer : - Tu vas encore me reprocher de trop te “materner” mais vu que SEUL tu peux pas faire une misérable salade César ... Retour à l'envoyeur. Balle remise en jeu. Je préparai la garnison des tomates et une fois prêtes, je les déposai dans le four. Réfléchissant à la température de cuisson, j'entendis un:

- SCHEIßE ! Allons bon mais qu'est -ce qu'il avait bien pu encore inventer pour user mon éternelle patience.

-Qu'est-ce qu'il ya... l'ail est pas cacher?


- Winfrey… ? Il m'appela d'une petit voix presque plaintive. C'était surprenant, je pivotai vers lui qui m'offrait son dos. Est-ce que tu n’aurais pas, par un merveilleux hasard, du Sopalin, caché quelque part dans ta cuisine ?

Lorsqu'il se retourna, je pus constater que cet empoté s'était coupé et que ça pissait le sang. Le bas de son visage aussi était en sang.

- Mais comment t'as fait ça? T'es pas doué quand même!

- Très vite, ça m’arrangerait. Au cas où tu ne l’avais pas encore remarqué.

Je m'inquiétai un peu, il avait peut-être vraiment entaillé profondément son doigt et puis, avec tout ce sang j'avais du mal à voir d'où partait la plaie et sa profondeur. Cette fois, c'est lui qui recula devant moi et non l'inverse. Il trancha :

- N’approche pas. Et MAGNE !

-Oui, oui c'est bon chochotte. je trottinai jusqu'au sopalin et en arrachai 2 feuilles, que je revins lui tendre en fixant ses mains à la recherche d'une plaie. Je repartis aussitôt chercher la trousse de secours et la posai à côté de lui ouverte.

- T’as tout un attirail chez toi, dis-moi. T’as du Coalgan ?

J'arquai un sourcil et lui fis simplement remarquer : - En cas de saignement, il vaut mieux qu'on soit équipé!

- Regarde dans la trousse s'il y en reste et vérifies la date aussi ! T'as foutu quoi ? Entre le coup de la botte volante et là... je vis la râpe ensanglantée avec l'ail et mon cerveau imagina le reste : Emeric se râpant les doigts plutôt que l'ail mais le coalgan c'est pas plutôt recommandé pour les saignements de nez?

Je me baissai pour essuyer le sang qu'il foutait de partout et ramassai aussi ses 2 morceaux de sopalin rouge. J'avais les doigts parsemés du sang de cet enfoiré, est-ce que je n'étais pas déjà un peu souillée par lui ? Je détournai le regard de mes doigts ensanglantés: Est-ce que ce n'est pas quelque chose de surnaturelle : moi et lui dans une même cuisine ?

- Tu as du sang juste là. Je posai mon index sous mon menton pour lui désigner la zone à nettoyer. Puis je me relevai et jetai les sopalins imbibés dans la poubelle. En les regardant tomber, je réalisai l'étrangeté de la situation et fis volte-face.

- Attends ! et la lumière fût. Mais tu t'es coupé ou tu saignes du nez ? ça serait étrange non ? Qu'il saigne d'un coup du nez ou alors, il est assez sensible à ce niveau ou très fatigué d'ailleurs, maintenant que j'y pense, il a les traits du visage vachement tirés. Je le dévisageai de haut en bas, essayant de comprendre ce qui avait bien pu se passer.

Nous avions encore perdu du temps, j'avais juste pu faire les tomates provençales qui cuisaient au four. J'allais m'essuyer les mains quand je croisai son regard et entendit à travers ses lèvres l’imprononçable “banban”.

-Au fait, maintenant qu’on est intimes, toi et moi… c’est qui… « Banban » ? Il reprend beaucoup trop vite du poil de la bête, me laissant pas assez de temps pour encaisser. Quel est le véritable visage d'Emeric, on s'y perdrait.

De un depuis quand on est intime... de deux depuis quand il sait ? J'étais surprise et ça se voyait, qui ne l'aurait pas été ? Comment il savait ? Choquée d'entendre ce prénom dans la bouche de cet homme, je laissai couler l'eau sans bouger. Réfléchissant rapidement, une seule solution me sembla plausible : il avait fouillé mon téléphone portable. N'avait-il donc aucun scrupule... et j'imaginais qu'il n'avait pas fait que fouiller. Voilà pourquoi il était si “agréable” et souriant depuis mon retour.

-Banban ? Répétai-je en éteignant l'eau. Son sang qui m'avait souillé était parti, malheureusement bien que mes doigts étaient redevenues blancs, le sentiment persistait.

Je fis un rapide travail sur moi visant à redevenir neutre. Qu'il n'envisage même pas de discuter sur ce sujet. Je pris une profonde inspiration et sans répondre à sa question de toute façon ça ne le regardait pas lui dis : -Tu as fouillé dans mon portable?

Il nia plus ou moins les faits. Toujours en lui tournant le dos, je versai le riz dans l'eau bouillante et refermai le couvercle.
- Banban c'est un contact sur mon téléphone dont le numéro n'est plus attribué depuis belle lurette ! Je fis taper mes doigts sur le rebord de l'évier sans me retourner. S'il avait mon portable sur lui, et s'il avait regardé mes messages, il avait dû voir les échanges entre Jack et moi, et je ne veux pas imaginer ce qui a traversé son petit esprit tordu de vipère. Ni ce qu'il a pu lui envoyer comme horreur.

Je me retournai en le dévisageant. Banban, entendre ce surnom après tant de temps est toujours aussi douloureux. Rien qu'en repensant à lui, j'avais froid. Celui qui fut mon exil par le passé, maintenant il ne me restait aucun espoir. J'ai fait ce choix, nous ne marcherons plus jamais ensemble, ainsi soit-il. Je le fixai est-ce qu'au fond c'était grave ce qu'il avait fait? Si ça avait été mon frère, je l'aurai probablement maudit mais j'en aurais pas non plus fait un foin pendant 50 ans... alors pourquoi je faisais une fixation sur ce qu'il faisait ? Pourquoi je ne peux pas l'ignorer tout simplement ? De toute façon, j'aurais beau m'énerver, il ne changera pas, au pire j'attiserais sa flamme déjà ardente. Lui, ce qu'il veut voir c'est ma surprise, mon énervement, ma haine. Il est un peu comme un moustique volant autour de sa proie, la réveillant dès que la lumière s'éteint mais disparaissant quand elle se rallume. Je ne sais pas comment le prendre, mais je ne lui ferais pas le plaisir de m'énerver. J'espère que tu aimes l'Antarctique mon cher, prépare les moufles, il va faire froid. J'étais énervée contre lui bien évidemment et j'étais encore plus énervée contre moi-même, d'être incapable d'être complètement indifférente à sa présence. J'ai beau dire que je serais froide comparé à d'autres hommes, je suis loin d'être froide avec lui ou plutôt indifférente, il a le don de toucher là où il faut. Comme si on tournait la manivelle mettant en branle les rouages rouillés d'une vieille boite à musique pour la faire de nouveau chanter. Rien que pour ça, je te hais Emeric !

J'arquai un sourcil en le dévisageant, si seulement je n'avais jamais rencontré ce mec, je sais même pas quoi faire pour qu'il me foute enfin la paix et ironiquement, s'il disparaissait de ma vie, ne laisserait-il pas une sorte d'absence, un gouffre d'ennuie ? Je donnerais tout pour qu'il disparaisse de ma vie mais il emportera une partie de mon âme avec lui, qu'il arrête de me faire me sentir toujours plus misérable que ce que je suis et ironiquement qu'il arrête de m'obliger à devoir prendre conscience de moi en temps que femme.

-Si je te demandai d'arrêter parce que je n'aime pas ce que tu fais... tu ne m'écouteras pas, n'est-ce pas ? Je ne cillai pas le fixant de mes grands yeux tristes. J'hochai la tête: - Peu importe. ELIJAH !

Pas de réponse.

- ELIJAAAAAH criai-je plus fort.

-Quoi ?

-Viens et bouge toi !

Il apparut dans la cuisine avec sa démarche d'ado courbé : -tu m'veux quoi?

- Aide moi à finir le repas, "il" s'est blessé.Je ne voulais pas dire "il se sent pas bien" puisqu'à première vue, il avait l'air d'aller très bien. Ce que je voulais surtout c'est qu'il m'aide à ne pas finir le repas en tête à tête avec Emeric.

Mon frère pivota en direction du blessé de guerre cherchant la blessure du regard sans la trouver. Puis, il se tourna vers moi dans l'attente des instructions. Une fois ceci fait, je refis face à Emeric de nouveau : - Va mettre la table, toi.... s'il te plaît. D'un signe de tête je lui désignai les assiettes et couverts : tout est là !

Elijah le dévisagea en souriant : -on dirait pas comme ça mais c'est un véritable dragon ! Quand j'étais gosse, elle m'a déjà tirée par les cheveux

-Elijah!

- sur toute la longueur du salon. Une fois, elle a même tenté de me donner un coup de genou dans les parties sensible parce que j'a.. Je n'avais aucunement envie d'avoir ce genre de conversation face au diable.

-ELIijah! Note hôte se fiche pas mal de ce que tu lui racontes, maintenant aide-moi à finir le repas !

Il hocha les épaules l'air de dire : " je te l'avais dit " puis se mis enfin à l'oeuvre et avec son aide se fût bien plus rapide qu'avec celle d'Emeric. Rien de bien surprenant. Il adressa la parole à Emeric à plusieurs reprises lui demandant par exemple quelle étude il faisait et en lui demandant si je l'avais obligé à monter sur un cheval rajoutant que c'était super douloureux.


Mon père pénétra dans la cuisine et questionna directement Emeric : - Alors pour ta première matinée Eric, comment ça s'est passé ? Tes impressions ? Je ne relevai pas, bien fait pour lui s'il se trompait sur son prénom.

Mon père s'installa au bout de la table, et moi, j'attendais qu'Emeric prenne une chaise pour m'asseoir le plus loin possible de lui. Mon père analysait mon comportement et celui d'Emeric, il se doutait que quelque chose était étrange mais à mon avis, il faisait clairement fausse route.

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MessageSujet: Re: La vie du loup est la mort du mouton. [Gueuse] } Ne pas archiver   La vie du loup est la mort du mouton. [Gueuse] } Ne pas archiver EmptyJeu 14 Aoû 2014 - 16:19



la vie du loup est la mort du mouton



- Et si, ce n'était pas les bonnes femmes... si, c'était toi au final... la dinde de l'histoire ?

En à peine quelques syntagmes, la jeune Américaine avait détourné sa phrase avec ce qui, il devait bien le reconnaître, s’apparentait à un semblant d’esprit. Les deux jambes immobiles, il pencha légèrement la tête sur le côté. Elle avait dit ça avec un tel flegme, c’en était presque troublant. Ses lèvres épousèrent un sourire fugace sous l’ombre de ses sourcils arqués. Presque, seulement. Sa petite menace déguisée n’était pas aiguisée en suffisance pour piquer son orgueil ; l’acier de sa cuirasse était bien trop résistant pour cela. Avec l’assurance du loup défiant l’agneau, ses iris entendus dardèrent les siens, répondant en silence à son sous-entendu. Les mots étaient superflus, tant son hégémonie lui apparaissait évidente. Du sommet de sa pyramide scintillait d’obscénité toute la vanité qu’il pouvait éprouver à régner ainsi sur l’ensemble de la chaîne alimentaire, et il la lui renvoyait tout aussi vulgairement en pleine gueule. Il n’avait aucun doute quant à la position qu’il assumait face aux femmes qu’il se choisissait, justement parce qu’il les choisissait. Il les dominait. Et si l’une d’elles, sourde aux conseils de monsieur Seguin, se maquillait en maquisarde, il n’hésitait à l’affronter. Traqueur traqué traque son traqueur ; peu importait la version, Blanquette toujours finissait dévorée par le loup. Evangeline était encore là pour témoigner.

- Non rien oublie… capitula-t-elle – du moins était-ce ainsi qu’il l’interpréta.
- Dommage. J’étais curieux de t’entendre développer ton argument.

Pure ironie. Un peu comme celle dont elle s’était armée, dans le box, avant qu’il ne lui demande pourquoi elle n’utilisait pas de tracteur pour changer la litière. Après tout, le temps, c’était de l’argent, et s’infliger ça c’était pur acte de flagellation. A l’ouïe de sa question, la cavalière avait simplement relevé la tête, munie de ce léger sourire – celui-là même qui lui servait si souvent de citadelle. Et sans cesser de travailler, elle s’expliqua sur le timbre mesuré dont elle semblait ne jamais se défaire. Enfin. Le terme « expliquer » était sans doute un bien grand mot, parce qu’avec l’enchevêtrement de toutes les absurdités qu’elle avait concentrées en une si courte réplique, elle avait en réalité flingué tout son potentiel d’empathie dés l’issue de sa seconde phrase.

- Je pense pas que les chevaux ont besoin d'un toit pour être heureux. Ensuite, tu as pas tort en théorie mais tu sais quand tu aimes quelqu'un, enfin disons un être humain en l’occurrence. Tu préfères t'en occuper toi-même, parce que ça ne te dérange pas de tremper tes doigts dans la merde pour cette chose. Je dis pas que j'aime récurer la merde de mes chevaux mais c'est une sorte d'échanges de bon service.

Masochisme.
Tandis qu’elle s’exprimait, le mot ne cessait de clignoter en lettres luminescentes devant ses yeux plissés. Il s’imposait comme la réponse évidente à toutes les questions qu’il s’était déjà posées au sujet de cette fille : Harmony Winfrey était masochiste. Et puisque lui ne l’était pas, il n’avait pas compris un traitre mot à sa théorie saugrenue. Peu importait à qui elle appartenait ; même directement sortie des fesses de Marilyn Monroe, de la merde restait de la merde. Alors à moins d’être scatophile, se forcer à la récurer, fût-ce ou non par amour, n’avait rien de normal à partir du moment où l’on pouvait se payer le luxe d’une alternative. Mais le plus épatant de ses arguments n’était pas celui-là, non. Elle avait ensuite mentionné l’échange de bons services, achevant sa patience d’un même tir rhétorique. Il ne put réprimer un hoquet sardonique. C’est qu’elle parlait de chevaux, merde ! C’était complètement surnaturel. C’était pas comme s’ils allaient lui être reconnaissants, ou quoi que ce soit, de son travail. Eux, tant qu’ils avaient un truc plus ou moins propre sous les pieds, qu’est-ce qu’ils pouvaient bien en avoir à foutre, que quelqu’un ait transpiré pour leur petit confort ? Perplexe, le garçon avait cessé ses coups de fourche pour mieux dévisager l’extravagante, et alors qu’il se demandait quel coche son père avait bien pu rater avec elle, elle tenta de venir au secours de sa lucidité.

- Par exemple, ta mère, pourquoi elle a changé tes couches puantes ? Ça lui a pas traversé l'idée de refiler ce sale job à quelqu'un d'autre, non ? Ben c'est pareil, j'ai pas envie d'utiliser un tracteur, par principe... ou par exemple, ta belle voiture, tu la laves toi-même, tu perds du temps à le faire non ? Parce que tu y tiens ?
- C’est ça. Et t’as un orgasme chaque fois que tu lis un paragraphe des Cinquante nuances de Grey ?

Les yeux ronds, il l’examinait scrupuleusement, cherchant quelque part dans son regard la clé qui lui permettrait de délier l’absurdité de ses propos ; impénétrable, elle soutenait dans un acte désespéré les pupilles éteintes qu’elle avait cru, dans un élan d’optimisme, pouvoir éclairer d’un peu de clarté. Ils étaient, l’un et l’autre, étrangers au langage de la silhouette statique qui se tenait debout face à eux, et leurs visages fermés reflétaient en synchronisme la mécompréhension réciproque qu’ils partageaient de leurs univers antagonistes. C’était un vrai dialogue de sourds.

- Vois-tu… reprit le sportif. Ma mère, puisqu’elle en a eu les moyens, a eu la présence d’esprit de payer une nurse, pour « changer mes couches puantes ». Un peu comme je paye un mec pour nettoyer ma bagnole. Attention. C’est pas pour ça qu’elle ne m’a pas aimé. Et c’est pas pour ça que j’aime pas ma voiture. C’est simplement qu’on a ce qu’on appelle communément l’esprit pratique. Perdre son temps à patauger dans la merde, quand il y a tellement plus excitant à faire, c’est bon pour les scato’ et les bouseux qui n’ont décidément rien de mieux à foutre de leurs journées. Tu crois que c’est normal, d’avoir à t’infliger la souffrance pour quelque chose ou quelqu’un que tu aimes, au nom de pseudo-principes débiles ? Bah je vais t’apprendre quelque chose : non, ça ne l’est pas. Sérieusement. Qu’est-ce que tu t’imagines ? Que tes chevaux vont t’écrire un éloge, parce que t’as un peu sué pour eux ? La vérité, c’est qu’ils n’en ont probablement rien à branler – et qu’ils ont bien raison, parce que dans le font, ils ne t’ont jamais rien demandé. Ils vont pas te jeter moins facilement de leur dos parce que t’as raclé leur merde à la main pendant qu’ils se sont fait chier comme des rates crevés dehors, accrochés à un poteau. Personne ne te sera reconnaissant d’avoir souffert pour lui. Personne ne t’en voudra de ne pas l’avoir fait. Dans quel monde tu vis ? L’amour que quelqu’un te porte ne se calcule pas aux gouttes de sueur que t’as pu verser pour lui. C’est pas comme ça que ça marche. Alors, en toute franchise, quand t’en arrives à te sentir obligée d’endurer des merdes sans plaisir pour un truc ou quelqu’un, mieux vaut t’en débarrasser. C’est que ce n’est plus qu’une épine dans ton pied.

C’était ce qu’il avait fait avec Evangeline, et il ne s’en était pas plus mal porté. Au contraire. En trois coups successifs, il se tapota la tempe du bout de l’index.

- Tout ça, ta rigueur en carton, là, dans le fond, c’est dans ta tête. Tu pourrais tout aussi bien te servir du temps que tu perds à faire tes… échanges masochistes de bons services pour partager un plaisir réciproque. Je sais pas, moi. En les caressant plus longtemps, par exemple.

Pour ponctuer ses dernières phrases, il avait repris son nettoyage. Il ne savait même pas pourquoi il gaspillait de la salive à tenter de lui expliquer le bon fondement de sa morale. De toute façon, son esprit étriqué de paysanne n’était sans doute pas assez modernisé pour comprendre ce qu’il essayait de lui signifier.
C’est alors que le silence était à nouveau tombé qu’il avait choisi d’embrayer sur son père. La réaction de la jeune femme ne s’était pas fait attendre. Ses prunelles, d’habitude pourtant si inébranlables, s’étaient instantanément glacées, trahissant aussitôt la faiblesse qu’elle essayait de dissimuler par autant de force surjouée. Sa voix claqua sur le calme polaire, non moins hostile à son indiscrétion.

- Il a pas toujours été comme ça.

Touché.
Curieux, ses yeux se plissèrent dans une grimace presqu’imperceptible. Tout, dans la personne d’Harmony, lui hurlait dés à présent de ne pas persévérer sur le terrain dans lequel il s’était engagé – tant de recommandations que ses synapses intégraient comme une invitation à désobéir. Paré de cinq innocentes syllabes, il le fit.

- Qu’est-ce qui a changé ?

***
L’esprit de cette démone était-il suffisamment perfide pour que l’idée ingénieuse de jouer avec son orgueil afin de le forcer à faire ce qu’il s’était tout juste venté ne jamais avoir fait lui soit venue à l’esprit dans le seul but de se venger de cette question qu’il avait osé articuler ? Quoi qu’il ait pu en être, si c’était le cas, maintenant qu’il avait les jambes presque trainées dans la boue, et son égo avec elles, il trouvait ça sincèrement cher payé. Lorsqu’enfin Puzzle s’était arrêté, les prunelles désabusées d’Emeric s’étaient figées sur la silhouette infernale de son bourreau. Il s’était penché en avant, et son rire satanique retentit bruyamment quand ses doigts crochus effleurèrent leur instrument de torture – sa botte. C’est qu’elle se foutait carrément de sa gueule, la salope ! Son agent maléfique soigneusement protégé entre ses mains de sorcière, elle s’approcha. Elle lui demanda poliment de tendre le pied. Il s’exécuta à contrecœur. Il le lui aurait volontiers écrasé dans la face, qu’elle s’étouffe avec, et entraine dans silence son sale rire de crécerelle.

- C'est vrai qu'elles sont immondes ces bottes.

Sur ces propos délicats, malheureusement teintés d’une déplorable réalité, elle l’invita à glisser son pied dans la botte. Ce faisant, il avait l’impression d’être la ridicule petite Javotte, ou peut-être bien Anastasie, qui s’évertuait à modeler son empreinte pour un moule qui ne pouvait être le sien. Sauf que l’Américaine n’avait rien d’un prince charmant ; elle était plutôt à l’image de l’insupportable Cendrillon, dont les bonnes qualités le rendaient lui encore plus haïssable.

- Un peu comme tout ce qu’il y a ici. Tu devrais être habituée. lâcha-t-il froidement alors qu’elle ajustait ses étriers.

Lui ? Vexé ? Non, jamais.
Findus suivait sa propriétaire comme un chien inféodé, et il avait beau tenter de tirer sur une rêne comme il lui semblait avoir vu Evangeline le faire, ses efforts ne s’avéraient pas très fructueux. D’accord. Cela pouvait s’expliquer par le fait qu’il les tenait comme il aurait tenu un guidon de moto, à la différence près qu’elles étaient si longues qu’il n’avait pas le moindre contact avec le mort, et qu’il déplaçait chacune de ses mains lorsqu’il lui demandait de virer de bord. La tête de l’animal plongea en avant et son chanfrein s’écrasa affectueusement sur les fesses de la jeune femme. L’Allemand haussa un sourcil. Ça devait bien être le seul homme à avoir le droit de faire ça. Le plus triste, c’était qu’il était sans doute trop con pour se rendre compte de l’incommensurable privilège que ça représentait. Lorsque la zoophile se retourna, elle esquissa un mouvement qu’il analysa immédiatement comme une provocation : maintenant, je vais te prendre les rênes et te guider comme un bébé. Tu n’auras cas te laisser faire. Tu verras, c’est facile. Au fond de lui, son orgueil lui vomissait de ne pas laisser une Nu Zêta le ridiculiser davantage.

- Ça va, lâche ça. Je fais assez de sport pour savoir me débrouiller avec ton activité de tapette. Je t’ai déjà dit que j’avais pas besoin qu’on me materne. pesta-t-il.

Docile, elle s’approcha alors pour lui montrer comment tenir les deux lanières de cuir avec lesquels il devait en théorie pouvoir manier son hongre. En quelques phrases, elle lui expliqua l’essentiel : comment tourner à gauche, tourner à droite, avancer et s’arrêter. Les lèvres pincées sous la concentration, il emmagasina le ramassis d’informations brutes qu’elle venait de lui desservir et s’exécuta – non sans maladresse. Ses talons heurtèrent de trois petits coups les flancs de l’animal. Sans effet. Il recommença avec un peu plus d’énergie. Celui-ci se mit sitôt au pas. D’accord. Il lança un regard triomphateur à la fille. C’était facile, en fait. Les doigts serrés autour des rênes qu’il tenait fort courtes dans l’espoir d’ainsi garder davantage de contrôle sur l’animal, il lui demanda de tourner. Il s’arrêta. Facile, ou peut-être pas. Le garçon soupira, recommença à lui donner des jambes comme le lui hurlait la voix féminine en fond sonore. Les jambes élancées du paint horse firent leurs premiers pas dans la piste.

C’était une sensation très particulière, que d’avoir les fesses maltraitées sur le dos d’un cheval. Il pouvait se sentir balloté à gauche, à droite, puis à gauche et puis à droite, en avant et en arrière sur la cadence de son allure. Sa coach de fortune lui conseillait d’essayer de tracer un huit avec son bassin. Mouais. C’était à peu près ça, même s’il aurait plutôt comparé le mouvement avec celui de va-et-vient, bien qu’il fût beaucoup moins agréable de le pratiquer ici que dans un lit. Il hésita à lui partager l’information, s’abstint finalement. Ce n’était pas comme si la paysanne avait matière à faire comparaison. La réflexion lui arracha un sourire.

- Eh ! Sur un coup de tête passager, le poney avait prit seul la décision de bifurquer dangereusement vers le centre. Mais qu’est-ce que tu fous ?!

Et devinez vers qui il s’avançait d’un air penaud ? La gueuse ! Gueuse qui n’en perdait pas une pour continuer à lui gueuler ses instructions d’un air blasant. « Mais dirige-le ! Et donne des jambes ! Les deux en même temps, évidemment. »

- Mais c’est ce que je fais, putain !

« Blablabla. Je suis une grosse emmerdeuse et si j’étais plus claire dans mes saloperies de propos il n’y aurait pas de problème et tu te débrouillerais beaucoup mieux que ça. ». Et voilà. La créature s’était arrêtée. Désabusé, il la relança dans sa course lente. La leçon se poursuivit ainsi durant une dizaine de minutes, même s’il avait – heureusement pour lui – un peu mieux assimilé le truc sur la fin. Quand la Floridienne le lui demanda, il amena le cheval en ce qu’elle appelait « X ». Trop heureux d’en finir, celui-ci s’immobilisa sans qu’il n’ait rien à lui demander.

- On va arrêter là pour aujourd'hui. Tu vois c'était pas si horrible que ça. Tu peux descendre.

Il s’exécuta, un peu frustré. Et quoi ? C’était tout ? Pas de vraie difficulté ? Pas de vitesse ? Aucune sensation forte ? Heureusement que l’équitation était censée être classée parmi les sports extrêmes. Déclipsant sa bombe, il répondit :

- Je pue, je viens de me muter en gay et je suis certainement devenu eunuque, à défaut d’avoir fait quoi que ce soit de… sportif.

Agile, elle grimpa à son tour sur le dos de l’animal. S’il y avait moins de dynamisme dans sa technique, elle avait au moins le mérite d’être élégante. Puis surtout d’être efficace. Il découvrit sa tête du casque et la releva vers la fille qu’il aurait volontiers poussée de son perchoir pour qu’elle s’étale sans plus de cérémonie dans la boue. Il esquissa un sourire.

- Mais je pense avoir survécu.
- C'est l'heure de la pause. Va te laver si tu veux ou regarder la télé. Je te rejoins dans quelques minutes, je vais faire un petit tour et remettre les chevaux au box ensuite.

Des étoiles d’espoir plein les yeux, il hocha la tête comme si l’aura divine du prophète qu’on avait si longtemps attendu venait d’illuminer son âme du fabuleux miracle de son apparition. Est-ce qu’elle… venait bien de signifier qu’elle allait lui foutre la paix ?

- On préparera le repas.

BIM !
Apocalypse. Tous les anges venaient de tomber du ciel. Bien ancrée sur son piédestal, c’était à elle de le dominer d’une hauteur confortable dont son égo maltraité ne savait réellement profiter. Et comme pour soutenir son insupportable maîtresse, le familier méphistophélique abattait sa tête sur ses membres fatigués, achevant de moudre le grain de sa fierté.

- Quoi ?!

Sans lui laisser la bénédiction de plus de riposte, elle s’éloigna naïvement, portée par le trot de son famélique animal. Animé par un élan de consternation, Emeric lui courut après le temps de quelques foulées.

- Eh ! Je suis pas ici pour jouer à l’apprentie femme au foyer, putain ! Sauf qu’elle n’en avait absolument rien à faire. Envahi par le dépit, il s’immobilisa dans son désert de fange et de désolation. Ses bras retombèrent, inertes, le long de ses jambes. Génial.

Il crevait d’envie de lui balancer des boules de boue à la gueule, qu’elle se noie dedans. Au lieu de ça, il sauta par-dessus la barrière et abandonna sa bombe sur un poteau. Les bras croisés, il jaugea quelques instants la tenue de son détracteur. La différence de niveau était flagrante. Il l’accosta lorsqu’elle passa devant lui :

- Une pisseuse de six ans pourrait faire ça. J’aurais pu aussi. Alors quoi ? T’avais trop peur que je te ridiculise ?

***
La brebis lui avait offert l’opportunité d’une pause si courte qu’il était dans son intérêt de ne pas trainer pour en profiter. Les bottes damnées abandonnées sur le palier, il s’était empressé de retrouver son sac. Il puait et il avait sacrément l’air con. Dans l’immédiat, le plus important était de prendre une douche et de se changer. Il le fit sans traîner. Épaulée par son shampoing, l’eau brûlante étant en charge de lui désinfecter les pores. En sortant, pourtant, il n’eut pas l’impression de sentir meilleur. L’odeur des équidés était une véritable crasse. Elle avait littéralement déglingué son odorat. Fin prêt, il abandonna la salle-de-bain inondée de vapeur, une boule de vêtements sales pelotonnée dans ses bras. Mission suivante : retrouver la buanderie. Sa première tentative le mena directement aux toilettes, la seconde dans ce qui devait être la chambre de son père. Et la troisième... ?

- Si t'es encore là pour venir chercher un truc pour ton mec, je te jure que je ferme ma porte à cl...

Surpris, l’Allemand s’était contenté d’hausser un sourcil. Et, surpris, Elijah l’était visiblement aussi ; il venait de couper le jeu qui semblait pourtant le passionner pour se camper sur ses jambes, face à Emeric. Ses pupilles colorées fixèrent l’intrus, interrogatives.

- Désolé. Je cherchais juste… la buanderie. s’expliqua celui-ci. Pour toute justification, il désigna ses vêtements de fortune du menton. C’est où, déjà ? D’ailleurs, si tu pouvais aussi me rappeler où est la chambre de ta sœur, ça m’arrangerait. S’il-te-plait.

En quelques échanges, tout était enregistré. Il s’apprêta à définitivement quitter l’antre du geek mais sa tête traversa en toute innocence une dernière fois l’encadrement de la porte.

- Au fait, elle aurait pas peur de quelque chose, Harmony ?
- T’as tout ce qu’il faut pour. répliqua le joueur, sardonique.
- Merci. Ça j’avais cru remarquer. Je voulais dire, d’un autre genre de choses.

Les araignées.
C’était la réponse à sa question. Pas les petites, mais les grosses. Les grosses, bien poilues et bien dégueulasses qui retournaient en l’espace de quelques pas l’estomac de toute personne à peu près normalement constituée – c’est pour ça qu’au même titre qu’Arwy, le Rho Kappa était insensible à leurs menaces. Bref. Voilà donc à peu près comment Emeric Kürschner s’était retrouvé agenouillé à quatre pattes, les yeux rivés sous le lit de son hôte, à marmonner comme un idiot amadouerait les pigeons des :

- Petit, petit, petit !

La manœuvre s’avérait désastreuse, aussi finit-il par se rendre à la triste évidence : « c’était toujours quand on cherchait quelque chose qu’on ne le trouvait pas ». Il n’y avait pas la moindre araignée dans cette pièce, ni même dans les autres qu’il avait fouillées. Il soupira bruyamment, prit appui sur la paume de ses mains pour se redresser. Il laissa s’échapper un juron. Son crane avait aussitôt percuté le sommier en bois. Il se massa le crane et reprit appui sur ses pieds. Son regard balaya la pièce en vitesse. Il fallait impérativement qu’il trouve autre chose. Ce fût sur cette noble pensée précisément qu’il l’aperçut.

Là !
Naïf, elle siégeait fièrement sur le socle fabuleux que constituait son bureau, flamboyant de splendeur à l’image du Graal sous les yeux ébahis de Perceval. Précautionneusement, les doigts émus du garçon se refermèrent en soucoupe autour de la créature, comme s’il eut s’agit d’une précieuse amphore qu’il ne fallait surtout pas briser. Elles la portèrent amoureusement à ses lèvres. D’emblées purifiées par le chaste baiser, elles savourèrent avec humilité sa bénédiction. Il venait de la trouver. C’était elle. La seule ! L’unique : l’antiquité qui servait de téléphone portable à Harmony Winfrey. Et ce n’était pas n’importe quelle antiquité. C’était un vieux Samsung à clapet qui ne disposait même pas de la technologie suffisante pour être verrouillé. Le chevalier sauta avec euphorie sur la chaise et présenta sa trouvaille aux cieux.

- Bénie sois-tu, Marie, pour ton enfant Jésus !

De son perchoir, il plongea dans le lit, s’explosant au passage le front sur les combles. Peu importait. Aucune souffrance n’était assez brutale pour lui voler son ivresse ! Il roula sur le dos et ouvrit le clapet de l’engin. Ses yeux se noyèrent sans attendre dans la scandaleuse confession de ses paramètres. Première étape : changer ses sonneries en polyphonies dégueulasses, ce qui n’était pas bien difficile avec son appareil. Deuxième étape : remplacer le fond d’écran par une jolie selfie de lui, embrassant un poney qu’il avait attrapé au hasard dans le bazar de ses peluches. Troisième étape : fouiller ses messages. Il n’y avait pas grand-chose d’intéressant. Deux détails toutefois satisfirent momentanément son indiscrétion. Premièrement, plus de la moitié de ses sms étaient échangés avec un certain Jack. Et le Jack en question, pour l’avoir déjà vue trainer avec, il savait que c’était Putassier, son Puceau. Alors comme ça ce petit con batifolait avec la gueuse ?! Donc les regards qu’il lui avait lancés, à plusieurs soirées, ne l’avait pas trompé. Il ne la regardait pas comme une Nu Zêta – comprendre comme la dernière des rejetées. Il la regardait comme une femme. Pire. Comme une femme désirable. Les lèvres pincées, il fronça le nez. Rien que la perspective de la voir nue lui donnait envie de gerber. À sa conscience, du moins. Pour le reste, une femme nue restait une femme nue. Bref. Il allait falloir contrecarrer ça. Deuxièmement, elle avait conservé les sms vieux de deux ans d’un certain « Banban ». Or dans quel cas conservait-on des sms aussi idiots que « rendez-vous à la cafet’ à 15h00. » ? Bingo ! Quand on était une petite amoureuse transie. Bien. Il était temps de passer à la quatrième étape. Il valida l’option « écrire un nouveau message ».

« Bonjour beau RK, »

C’était un peu comme ça que Putassier commençait chacun de ses messages.

« J’ai beaucoup réfléchi. À nous, je veux dire. C’est pourquoi je profite d’un petit élan de courage pour oser t’affronter. Pardonne ma maladresse mais j’ai besoin de parler. J’en peux plus de le garder pour moi. Il faut que tu saches, c’est Gaza dans ma poitrine à chaque fois que je te vois*. Alors voilà. J’ai besoin de savoir : voudrais-tu partager un morceau de ta vie avec moi ? »
(*inspiré de Schadenfreude.)

« Envoyé à Jack ». Au suivant.

« Bonjour. Tu m’as sans doute oubliée, depuis le temps, mais je veux que tu saches : je pense souvent à toi. J’aimerais vraiment te revoir. Harmony. »

Il prit bien soin d’ajouter le nom à la fin ; après deux ans, n’importe quel mec normal l’aurait jetée de ses contacts (pour peu qu’il ait peu être normal un jour de l’y avoir eue). Hop. « Envoyé à Banban ».

« Je suis sous ton charme depuis la première fois que je t’ai vu. J’aimerais que l’on puisse faire plus intime connaissance. J’ai envie de toi. H.W., une admiratrice secrète qui te veut du bien.
nb : ne me demande pas comment j’ai eu ton numéro. Un type aussi sexy et populaire que toi, n’importe quelle fille se doit de l’avoir dans son répertoire. :) »


« Envoyé à 305 - 102 – 2603 ». Il ne pouvait pas en prime se priver de faire une petite fleur à Trevor.
Son affaire terminé, l’agent de Dieu supprima ni vu ni connu l’historique des messages envoyés et replaça le téléphone à l’endroit précis où il l’avait trouvé. Il referma la porte derrière lui, s’avança dans les escaliers, revint en arrière, reprit le téléphone, le glissa dans sa poche et s’évanouit dans sa chambre. Quand la voix d’Harmony lui perça les tympans, il était en train de passer un appel téléphonique, une clope au bec, en toute séraphique innocente. D’un geste machinal, il raccrocha, écrasa sa cigarette dans un verre, s’empara dans son sac d’une aspirine qu’il avala et s’élança dans les escaliers. Guillerets, ses pieds foulaient le sol glacé, recouverts d’une paire de chaussettes qu’il avait empruntée dans l’armoire de Monsieur Winfrey. Ainsi, puisqu’il n’avait plus de chaussures, il ne salirait pas les siennes. Lorsqu’il retrouva la jeune femme, il accueillit sa bienheureuse présence d’un sourire angélique.

- Alors ? Comment s’est passé ta petite escapade à cheval ?

Elle ne devait pas s’en rappeler, mais il s’agissait en fait des mots exacts que lui avait écrits Jack dans l’un de ses premiers messages. Elle s’était également changée, découvrant sous un short ses longues gambettes trop blanches aux côtés de ses bras. Au moins, elles avaient le mérite d’être musclées. Son regard remonta sur son visage, sautant l’étape poitrine que son t-shirt planquait encore une fois.

- Est-ce qu'il y a des aliments que tu aimes pas ou auxquels tu es allergique ?

A nouveau, les chœurs d’ Hallelujah chantèrent les louanges dans sa tête. Il aurait voulu joindre les mains vers les sommets et hurler, au rythme de son euphorie, bénie sois-tu, maman. Il esquissa un sourire.

- Non, mais…

Mais la demoiselle ne lui accorda pas le privilège de s’exprimer plus longtemps. Elle était déjà en train de sortir, en les énumérant, les différents aliments qu’elle lui proposait du frigo. Le garçon acquiesça doucement, les lèvres pincées.

- Ca te va ?
- En fait, je…

Tomates, moutarde, vinaigre, beurre, lait, parmesan, laitue,… Elle s’appliquait maintenant à aligner ses ingrédients et, sans même lui lancer un regard, elle reprit ses directives :

- Tu peux te charger de la salade César ?

Putain ! Mais on ne l’arrêtait jamais quand elle était lancée, celle-là, ou quoi ? Elle lui tournait le dos. Le sportif s’avança vers elle et posa une main sur chacun de ses épaules. Il la força à s’éloigner du plan de travail, puis à se retourner. Alors, il reprit ce qu’il avait commencé à essayer de lui expliquer :

- En fait.

Il insista lourdement sur ces deux premières syllabes, marqua une pause afin de s’assurer qu’elle lui laisserait enfin le loisir de s’exprimer. Ça semblait bon. Enfin.

- Je peux seulement manger des trucs cacher. Ce qui veut dire que la viande… D’un geste de la tête, il désigna le frigo dans lequel celle-ci patientait encore. Ne peut qu’être issue d’une bête qui rumine et qui a les sabots fendus. Comme… Je sais pas, moi. La vache, le bœuf ou le cerf et la chèvre, par exemple. Ou la gazelle. Ou l’oryx. Bref, tous ces trucs-là. Mais le porc ne ruminant pas… Il secoua la tête, les lèvres pincées, arborant une mine ennuyée. C’est taref. Les produits de la mer sans écailles ou nageoires ? C’est taref.

Il leva une main au ciel avec enthousiasme et la laissa aussi brutalement retomber, comme si ce qu’il venait de dire n’avait aucune espèce d’importance.

- Mais c’est pas grave. La volaille, c’est cacher. On n’a cas faire avec ça. Bon. Normalement, un chomer doit l’avoir cachérisée avant mais je peux faire un petit écart. Je pense que si on la cuit directement sur une flamme, il ne devrait pas y avoir de sang, de toute façon. Ensuite…

Il s’approcha du plan de travail. Ses doigts se refermèrent mécaniquement autour de tout ce qui pouvait contenir des produits laitiers.

- Ça… Il les posa à l’écart. Ça ne touche ni la viande, ni les ustensiles qui toucheront la viande, sinon c’est taref. Il faut une vaisselle pour les produits laitiers, une autre pour la viande. Et on mange ces trucs deux heures avant la viande, ou six heures après, mais on ne les mange pas en même temps. Je suppose qu’il est inutile de te préciser que je ne mange donc pas de viande cuite au beurre.

Il fit face à Harmony qui le fixait avec des yeux ronds, arqua un sourcil. Pour toute explication, il chantonna, comme s’il eut répété le refrain d’une chanson qu’il avait apprise par cœur :

- Tu ne cuiras pas un chevreau dans le lait de sa mère. Il reprit ensuite l’énonciation de ses commandes : Surtout pas de vin. Le tien est yayin nesech. Et ça… Il secoua la bouteille de lait. C’est imbuvable, en fait. Il la reposa puis désigna un à un les ustensiles qui peuplaient sa cuisine. Ça, ça, ça, ça et ça, il faudra d’abord les immerger dans un mikvé.

Enfin, il se tourna vers les plaques de cuisson.

- Et ça, il faudra que je les allume moi-m… Oh-mais-merde !

Brusquement, la paume de sa main gauche s’écrasa sur son front, comme s’il avait osé articuler la plus idiote des absurdités. En fait, c’était un peu le cas.

- Je suis con. De toute façon, la cacheroute doit avoir été surveillée par un beth din. Il se tourna vers la fille avec un air interrogatif. Ce qui, je suppose, n’a pas été fait ? Devant son air abasourdi, il leva une main en l’air dans un geste de mépris. Je ne sais même pas pourquoi je te pose la question. …Donc tout est taref, ici !

Il haussa les épaules, mine embêtée, esquissa un sourire gêné.

- Mais si vous voulez, je vous invite au restaurant ?

Comme ça il n’y aurait pas besoin de cuisiner !
La cavalière le fixait, pantoise, sans esquisser le moindre mouvement. Ses yeux verts le dévisageaient, abasourdis, comme s’il lui avait annoncé que la NASA avait prédit la fin du monde pour dans quinze ans. Et qu’il avait argumenté sa théorie, par-dessus le marché. C’était comme s’il avait en un claquement de doigts désintégré toute l’aisance de sa sérénité : tout bonnement jouissif. Devant son expression hébétée, il haussa un sourcil inquisiteur.

- Quoi ? T’as besoin de voir ma bite pour me croire ? Ou t’es chrétienne et tu t’en remets pas que je puisse renier Jésus dans mes prières ?

Comme elle ne réagissait toujours pas, il lui tapota bravement la joue, toujours armé de son sourire candide.

- C’est bon, reste avec moi. Je plaisantais. Je suis juste allergique au gluten et aux lactoses. Et végétalien.

Elle continuait de le fixer, vraiment sceptique cette fois. Il laissa retomber son bras.

- Sans rire, hein. Au fait, tu peux me dire où sont les toilettes ?

Il la suivit, et lorsqu’il revint, après lu !i avoir laissé le temps de bien macérer l’information, il termina de lui prêcher la bonne parole avant même qu’elle n’ait pu articuler quoi que ce soit :

- J’aime pas le mouton, l’agneau, les fruits de mer, le riz et la laitue. Mais comme tu vois, j’aurais vraiment pu être pire. Puis comme t’es une hôte super attentionnée, je vais même faire l’effort de le manger, ton riz. La salade, par contre, ça va vraiment pas être possible. On est d’accord ? Bien !

Narquois, il lui sourit, se lava une deuxième fois les mains à l’évier de la cuisine et s’approcha de la table aux ingrédients. Il les scruta tour à tour, essayant de reconstituer dans sa mémoire ce à quoi ressemblait une salade César, et surtout de quelle manière et dans quel ordre on pouvait bien assembler les éléments pour qu’ils constituent un tout cohérent. Après un temps record de dix secondes, il finit par capituler.

- Ta salade, là, tu crois vraiment que je sais cuisiner ça ? Espérer qu’il puisse cuisiner tout court était déjà le signe d’un optimisme maladif. Je sais même pas ce qu’on tape dedans.

Harmony avait définitivement trop de bonne volonté. Sa mère l’aurait congédié depuis des heures, déjà. Elle s’obstinait encore à lui donner de quoi faire, à son plus grand malheur. Elle lui dit que ça n’avait pas d’importance, qu’elle lui donnerait une à une de simples instructions. Il soupira. S’il adorait manger, il détestait royalement cuisiner. Et la paysanne avait visiblement décidé de le forcer à pratiquer tout ce qu’il haïssait. Repensant au téléphone qui dormait encore dans sa poche, il s’exécuta pourtant docilement. Si elle recevait un message, il y répondrait dés qu’elle aurait le dos tourné.
La pratique de la recette n’était pas encore excessivement compliquée, si bien qu’il en était encore à penser à toutes les équations qui lui permettraient d’emmerder Harmony quand il se mit à râper énergiquement une gousse d’ail peut-être un peu trop petite. Lorsqu’il vit l’aliment immaculé peu à peu se colorer de rouge, il ne comprit pas directement ce qu’il s’était passé. Il fronça les sourcils d’abord les sourcils, interloqué. Puis :

- SCHEIßE !

Instantanément, sa main se calla contre le bas de son visage. Un goût écœurant de fer glissait sur les lèvres. Il regarda vivement autour de lui, dans l’espoir désespéré de trouver ce qu’il cherchait. Rien.

- Winfrey… ? Sa voix était un étrange mélange entre nonchalance et frustration. Est-ce que tu n’aurais pas, par un merveilleux hasard, du Sopalin, caché quelque part dans ta cuisine ?

Là-dessus, il se retourna lentement vers elle, lui offrant le spectacle de toute son incompétence. Il avait le bas du visage et les mains couvertes de sang. Penché en avant à l’image d’un ridicule pantin de bois, il tentait dans un acte misérable de protéger ses vêtements, au détriment du carrelage qui, lui, avait le mérite de ne pas lui appartenir. Elle avait presque l’air amusée. S’il ne les monopolisait pas déjà, il lui aurait bien envoyé un poing dans la gueule.

- Très vite, ça m’arrangerait. Au cas où tu ne l’avais pas encore remarqué.

Surpris, sans doute, par la quantité de sang, ses yeux grossirent un temps sous la surprise. Elle esquissa un mouvement qui trahissait sa curiosité d’analyser la plaie. Il recula d’un pas et trancha, agressif :

- N’approche pas. Et MAGNE !

Docile, elle s’empara du papier absorbant et lui tendit deux morceaux avant de s’enfuir dans une autre pièce. Dans un mouvement pressé, il le plia et l’appliqua sur la source de son saignement.
Installé sur une chaise, les jambes écartés et le coude en appui sur un mollet, il fixa du coin de l’œil l’Américaine revenir avec une trousse de secours. Il haussa un sourcil. Sa main gauche maintenait fermement de l’essuie-tout callé contre son nez ravagé. Dans un geste mécanique, il écrasa le Sopalin dans son poing, tira d’un coup sec sur le rouleau et remplaça sa compresse de fortune par une neuve. L’usée s’en alla rejoindre une autre pelote d’hémoglobine sur le sol.

- T’as tout un attirail chez toi, dis-moi. T’as du Coalgan ? lança-t-il à l’adresse d’Harmony.

Quand elle lui eut répondu, il chercha à nouveau ses prunelles du regard.

- Au fait, maintenant qu’on est intimes, toi et moi… c’est qui… « Banban » ?

Il avait lâché ça comme ça, on ne peut plus innocemment. Comme s’il lui avait demandé l’heure, ou le temps. Ils allaient avoir dix bonnes minutes à tuer. Autant en profiter pour s’amuser.


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MessageSujet: Re: La vie du loup est la mort du mouton. [Gueuse] } Ne pas archiver   La vie du loup est la mort du mouton. [Gueuse] } Ne pas archiver EmptyLun 11 Aoû 2014 - 4:08



La vie du loup est la mort du mouton.



Emeric & Harmony

J'avais visiblement déstabilisé le grand Kürschner en lui dévoilant la populace de dindes bruyantes qui se dandinaient dans mon voisinage. Il m'avait dévisagé presque sans voix, sauf que je ne me sentais absolument pas vainqueur de ce combat silencieux, au contraire, j'entrais dans son petit jeu. Je lui montrais petit à petit des véritables bouts de moi, la matière dans laquelle Harmony Winfrey était taillée. Et, c'était tout ce que je ne voulais pas. Je préférais qu'il continue à croire que j'étais une paysanne sans la moindre once d'intelligence, sale et naïve au point d'être incapable de distinguer le loup d'une brebis. Malheureusement, Emeric avait ce don si singulier de me faire sortir de mes gongs. Je regrettai mes propos aussitôt, avant même d'entendre sa réponse, car j'avais failli à tenir la promesse faite avec moi-même: rester de marbre face à ce diablotin, ne rien lui montrer, ne rien lui permettre d' entrapercevoir ne fusses le plus insignifiant détail me concernant. Or en à peine quelques minutes en sa présence, je venais déjà d'échouer. Le reste de la semaine me semblait insurmontable.

- Ah… comprends-moi.Quel type n’opterait pas pour une belle dinde écervelée quand sa seule alternative s’avère être un thon repoussant. Sortie ou non d’Harvard, qu’est-ce qu’on s’en branle. ‘Te méprends pas. Comme la bouffe, tout ce qu’on vous demande, c’est jamais que d’être bonnes, hein.


Ah! La poésie, l'amour du bon gout, la délicatesse d'une feuille caressée par la brise matinale... Baudelaire, Lamartine, Rimbaud, Apollinaire, Hugo vous pouvez tous allés vous rhabiller, un digne successeur marche dans vos pas: Emeric Kürschner. Ses propos étaient pour résumé: infectes. Ce mec est infecte, comment une seule femme pouvait avoir envie d'autre chose que de son porte-feuille? Ou, à la limite, tirer un coup avec lui, parce que peut-être qu'il était plus compétent au lit qu'en poésie ce qui ne devait pas être difficile en soi.

-Et si, ce n'était pas les bonnes femmes... si, c'était toi au final... la dinde de l'histoire? Le ton de ma voix n'était pas agressif, ni même moqueur.

Je lui posai une simple question. Est-ce que ce n'était pas plutôt lui le chasseur chassé, dépendant des femmes qui pouvaient le mener où elles voulaient en sachant où elles devaient frapper. Je ne connaissais rien de sa vie, ni de ses relations mais peut-être que la proie n'était en faite qu'une simple victime, le marionnettiste, qu'une simple marionnette. Au fond, pourquoi une femme aurait envie de s'enticher à vie d'un type pareil, il ne peut qu'y avoir un appel du gain. C'était encore plus triste. A moins que ce mec était quelqu'un de vraiment différent en couple?

-Non rien oublis… repris-je avant qu'il réponde. Si une femme doit juste être bonne alors tu comprendras très certainement pourquoi je préfère le thon à la dinde!

Je lui tournai le dos dépitée, j'avais l'impression d'être passé dans une machine à laver à mauvaise température et d'être rétrécie. Je sais même plus pourquoi on se fait la guerre, ce qu'il fout chez moi, pourquoi je perds du temps à papoter avec lui. Il me vide de toute forme d'énergie, il me tord dans tous les sens jusqu'à absorber la dernière goutte de nectar en moi. J'ai l'impression de devoir surveiller 4 gamins turbulents en même temps. Je sortis de la chambre pour le laisser se changer et me retrouver quelques minutes plus tard dans la cuisine à jouer le rôle de sa mère avec sa pile de linge sale et son caprice, Monsieur voulait du Dafalgan. Ne me demandez pas comment j'en étais arrivée là, je ne sais même pas moi-même. Mon visage était aussi froid que la pierre, j'en avais déjà marre de voir sa tête, d'entendre sa voix, d'écouter ses caprices et ses plaintes. Que quelqu'un me vienne en aide! Dieu, Satan, Mimi Mathy, le pape .. peu importe qui mais si vous m'entendez, venez m'aider! Débarrassez moi de cette infection pire que la peste et le choléra, plus envahissant qu'une mycose des pieds et plus agaçant qu'un morpion mal placé.

- C’est ça, du Dafalgan. Tu sais, les comprimés pour la tête qu’on vend dans les pays civilisés ? Et même dans les autres, en fait. 

J'avais envie de le tuer, de l'insulter mais n'en fis rien. J'étais civilisée bien qu'il semblait en douter. Je dois rester aussi lisse que la surface de la rivière, pourtant quand on y regarde de près, une rivière est tout ce qu'il y a de plus vivant et agitée. Il suffit d'y faire tomber une pierre pour transformer sa surface en joyeux serpentins. Je me débarrassai de ses fringues puant son odeur à pleine narine, j'avais même la désagréable impression que son odeur était imprégnée sur mes fringues, collée à ma peau... ça ne partirait pas même avec des litres de javel... encore plus agressif que l'odeur de clope dans les cheveux et sur les vêtements. J'étais capable de distinguer très nettement l'alchimie qui composait son odeur corporel. Je partis à la recherche de son médicament de merde, ne sachant même pas s'il en restait. Je ne prends pratiquement jamais de médicament, même avec un mal de crâne atroce, j'évite au maximum.. je déteste ça. Mon frère pénétra dans la cuisine et échangea 2/3 mots avec Emeric. Je tendis l’oreille en vain, qu'importe ça devait encore être des plaintes et railleries... tout ce qui sort de cette bouche, ce ne sont que des suaves poisons. Lorsque je revins vers le démon, je déposai son médicament sur le rebord de l'évier ignorant sa main tendue. Il avala le médicament avec une expression que seul ce mec était capable de faire un mélange de mépris et d'arrogance insupportable.

- Danke, mein Sau-Bettler-Slave. Il me parla alors en allemand, je ne compris pas le milieu de sa phrase et je restai persuadée que ça valait mieux pour moi.

Je lui répondis alors en français: -De rien ma dinde. Moi aussi Emeric, je peux parler dans une autre langue!

Il était temps de me charger de son linge, pourtant malgré ma bonne volonté... j'étais incapable de me décider sur la température recommandée pour laver ses vêtements et je n'étais pas mauvaise au point de me venger sur eux. Eux comme moi, supportaient leur propriétaire sans pouvoir rien faire, ils n'étaient pas responsable de la connerie d'Emeric. Ils subissaient en silence comme moi. D'un pas pesant, je redescendis mais ne le trouvant pas dans la cuisine, je me déplaçai vers le salon. Il était devant les photos de ma famille et inutile de préciser que je déteste ça. Je lui demandai la température de lavage le fusillant du regard, l'invitant à trouver une autre distraction que celle d'épier des parcelles de mon enfance.

- J’en sais foutrement rien, moi. T’es au courant qu’il existe des étiquettes pour répondre à ce genre de questions ?
Je le fixai en arquant un sourcil... comment fait sa mère pour le supporter? En plus d'être une tête à claque, il voit même pas quand on fait un effort pour être pas trop désagréable avec lui. Il finit par continuer: Trente degrés, je suppose ? Vu qu’il y a de la laine. Et n’oublie pas l’adoucissant. Ni la poudre à lessiver. Pourquoi pas aussi lui tailler une pipe pendant l'essorage...

Je levai les yeux au ciel en soupirant, tu connais pas le dicton: "on est jamais mieux servi que par soi-même", à quoi bon demander à d'autres de faire un travail si de toute façon ça ne sera jamais assez bien? Je me délivrai de son linge et partis à la recherche de sa paire de chaussures. Ça faisait une éternité que je n'avais pas fouillée dans ce placard, je découvris des vieilleries qui avaient des allures de trésor à mes yeux. J'avais aucune idée où il était allé poser sa carcasse, aussi, je criai ma trouvaille, de magnifique bottes en caoutchouc qui allaient sans aucun doute lui plaire. De très bon gout.

- Et bien. Quel merveilleux hasard.

Je sursautai en même temps de refermer le placard, il était juste à côté de moi se goinfrant d'une de nos pommes. Il comptait surgir dans mon dos comme ça pendant 1 semaine? Parce que ça allait pas du tout le faire, j'allais mourir d'un arrêt cardiaque avant la fin du séjour. Quoique c'est peut-être ce qu'il voulait. Je lui tendis sa paire de chaussures, et il fallut, que dis-je, il fût de son devoir de se plaindre.

Tu te fous de ma gueule, hein ?

- Moi? Jamais répondis-je en souriant moqueuse.

Il obéit en m'arrachant les bottes des doigts et les enfila la mâchoire crispée... tu sais Emeric c'est comme ça que tu es le plus beau à mes yeux quand tu as la rage mais que tu peux rien faire d'autre que d'obéir en silence.

- Dis-moi, c’est héréditaire, chez vous, l’amour des belles choses.

J'ignorais sa charmante remarque, bien que ma répartie me criait de lui répondre. De toute façon, j'allais me venger en lui révélant sa première tâche: faire mu-muse dans le fumier. Mon visage rayonna autant que le sien s'assombrit. Sans attendre, je sortis à l'extérieur guillerette. Avec mes chevaux, Emeric ne pouvait plus ternir ma journée, même toi Emeric tu n'as pas ce pouvoir, ici tu n'as aucun pouvoir sur moi. Ils ont le même effet qu'une amulette contre les mauvais esprits. Alors garde ton venin pour plus tard! J'appelai Puzzle et vins le caresser rêveusement oubliant complètement la présence détestable de ce fils de bourge. Je lui parlai, le complimentant tout en le caressant jusqu'à ce que je réalise que j'avais Emeric dans mon dos attendant mes instructions. Tidus tournait autour de nous gaiement, je devrais peut-être apprendre à ce chien à mordre tout homme ressemblant de près ou de loin à Emeric. Je lui tendis une fourche et un licol qu'il prit sans se plaindre à ma grande surprise... enfin, son visage parlait pour lui. Il balança son trognon dans la paille... moi j'avais envie d'enfoncer sa tête de fion dans la merde.

- Pourquoi tu les tapes pas juste dans un pré, plutôt que de t’emmerder à nettoyer leur merde ?

En plus de ça, il veut me donner des conseils? N'est-il pas adorable ce mec et plein de bonne volonté? Un amour! J’invoquai toutes les déesses et dieux de patience connus de notre planète afin de lui répondre calmement:

-D'habitude.. ils le sont mais si tu regardais autour de toi tu comprendrais pourquoi, ils ne le sont pas aujourd'hui! D'ailleurs je pense que ta bagnole et tes fringues peuvent témoigner si t'es pas foutu de comprendre!
Il est "blonde" en plus. La totale. Tidus nous éclaboussa en se secouant. Je tapotai sur sa tête humide: - Tu vois Tidus te donne même un indice!

Il semblait avoir atteint le maximum de sa jauge de patience, la mienne quant à elle commençait à diminuer. Pendant que j'enfilai le licol à Danseuse, je pouvais entendre Emeric discutait avec Puzzle... enfin disons plutôt râler après Puzzle. C'était presque mignon, je suis sûre que beaucoup d'élèves à Wynwood rêveraient de pouvoir assister à cette scène improbable au moins une fois dans leur vie... finalement j'étais une chanceuse. J'attachai Danseuse et corrigeai le travail mal fait d'Emeric, je dois avouer avoir fait ça uniquement parce que ça m'amusait de le voir en chier juste pour attacher un cheval. Une fois ceci fait, je me dirigeai dans le boxe de Slipping away et après quelques minutes de combat, je finis par faire sortir Monseigneur. En faite, ce cheval était un peu comme Emeric... une tête à claque qui se prenait pas pour de la merde. Il sortit de son boxe la tête haute, les oreilles droites en faisant de petites foulées. Je pris bien soin de l'attacher pas trop serré, ni trop court en lui laissant beaucoup de mou. Dans le cas contraire, Monseigneur n'était pas satisfait et tirait au renard. En finissant mon nœud, je commentai juste: - Évite de trop t'approcher de ce cheval avec tes gestes brusques, j'ai pas envie de devoir t'envoyer à l'hosto. Je tapotai sur l'encolure de l'étalon qui grattait le sol boueux tâchant sa magnifique robe blanche.

Me détournant d'Emeric ², je fis face à l'autre Emeric le seul et unique celui qui se tenait sur 2 pattes et qui … ô malheur avait le don de parole, l'informant gaiement du début du récurage de boxes.


- Super, comme j’ai hâte !

Je l'ignorai, c'était juste râler pour râler, c'était presque devenu comme un fond sonore, la radio en arrière plan lorsqu'on mange à table. Je lui expliquai comment on allait procéder et après réflexion, je jugeai que l'aider à finir le premier boxe serait mieux que le laisser faire de la merde et perdre du temps à repasser derrière.

- On va se marcher dessus.

Il n'avait pas tort, je me grattai derrière la nuque et finis par reconnaître: - Oui, ça va pas être pratique mais je vais te montrer quand même.

Mauvaise idée, je me sentais acculée entre la merde, les parois du boxe et Emeric... pas besoin de préciser lequel me dérangeait le plus. Il fit le travail avec presque pas de mauvaise volonté bien qu'avec une façon toute Emericienne de soupirer à chaque coup de fourche dans la paille. Je pris note quand même des efforts qu'il faisait... ne rigolez pas, ça faisait presque 5 minutes que Monseigneur Kürschner n'avait pas formulé une plainte. Je fus tirée de mes pensées lorsque de la merde vint s'étaler sur moi, je relevai le visage vers le fautif qui semblait ne pas du tout regretter son geste bien qu'il s'excusa platement. Fait volontairement ou non? Difficile à dire, quoiqu'il en soit, il prenait plaisir à me voir couverte de merde mais moi, ça ne me gênait pas le moins du monde. Il finalisa son geste d'une crème suprême à la Emeric: "la merde attire la merde” .

- Ah bah ça va. Moi qui pensais que tu pourrais pas t’adapter, finalement, t’es en plein dans ton élément. Dis-je en riant pas vexée pour un sou.

De toute façon, depuis qu'on est né, on vit dans notre propre merde... Déjà gamin grâce au couche on se retrouve le cul pataugeant dans la merde, en vieillissant dans la plupart des cas, on apprend à nous torcher correctement mais nous vivons dans la merde que nous avons crées.. un monde pollué, individualiste et sans pitié... un monde de merde, gouverner par des merdes. Après ce petit incident, le silence s'installa derechef. Mon cher et tendre silence, j'entendais simplement à l'extérieur du boxe Slipping away hennir bruyamment pour montrer qu'il était là. Emeric prit la parole:

- Ok, admettons. Tu penses que les chevaux ont aussi besoin d’un toit au-dessus de leur tête pour être heureux. Après tout, pourquoi pas ? Chacun sa conception du monde. Mais pourquoi t’utilises pas un petit tracteur, pour faire ça ? J’veux pas dire mais ça irait dix fois plus vite.

Sans m'arrêter de travailler et surtout de sourire, je lui répondis d'une voix calme: - Je pense pas que les chevaux ont besoin d'un toit pour être heureux. Ensuite, tu as pas tort en théorie mais tu sais quand tu aimes quelqu'un, enfin disons un être humain en l’occurrence. Tu préfères t'en occuper toi-même, parce que ça ne te dérange pas de tremper tes doigts dans la merde pour cette chose. Je dis pas que j'aime récurer la merde de mes chevaux mais c'est une sorte d'échanges de bon service. Je me relevai et essuyai mon front trempé de sueur d'un revers de manche non souillé. Puis je plongeai dans son regard d'acier cherchant à lui expliquer avec un exemple le concernant: - Par exemple, ta mère, pourquoi elle a changé tes couches puantes ? Ça lui a pas traversé l'idée de refiler ce sale job à quelqu'un d'autre, non? Ben c'est pareil, j'ai pas envie d'utiliser un tracteur, par principe... ou par exemple, ta belle voiture, tu la laves toi-même, tu perds du temps à le faire non? Parce que tu y tiens?

En faite, j'étais certaine qu'il ne comprendrait pas où je voulais en venir sans compter que mes exemples n'étaient pas les meilleurs au monde mais à défaut de mieux, on fait avec ce qu'on a sous la main. De toute façon, il en avait rien à foutre de ce que je racontais. Le silence retomba, moi ça me dérangeait aucunement, j'étais habituée aux silences, visiblement ça n'était pas du gout de mon cher ami.

- Il est pas commode, hein, ton père ?

Je me stoppai et figeai mon regard dans ses yeux ne comprenant pas pourquoi il me disait ça. Il pouvait parler lui...

- Il a pas toujours été comme ça. Concluais-je d'un ton tranchant.

Je détestais ce sentiment de devoir me dévoiler même si Emeric en avait clairement rien à foutre, il pourrait s'en servir contre moi dans le futur si nos chemins avaient le malheurs de se recroiser. Moi ,je ne savais rien de sa mère, de son père ni même à quoi ils ressemblaient... j'étais en désavantage.

Tout allait bien, ce n'était même pas aussi désagréable que ce que j'avais imaginée jusqu'à ce qu'Emeric ait la bonne idée de s'avancer vers moi, je ne m'en rendis pas compte au départ mais mon corps recula immédiatement afin de lui imposer des distances sociales. La deuxième fois, je pris conscience de son manège et vis même un sourire narquois sur ses lèvres... il m'accula contre la paroi, s'il faisait un pas de plus, je l’embrocherai avec ma fourche et je sais où je viserai. Mais il se contenta moqueur et fier de sa domination de me dire:

- Déjà fatiguée, feignasse ? Je te hais Emeric... bordel que je te hais! Retire ce sourire narquois sur tes lèvres!!

Je ne répondis rien trop mal à l'aise mais je le dévisageai prête à mordre s'il fallait. Il déversa le purin dans la brouette en s'accoudant nonchalamment au manche. La brouette était remplie, chance de ma vie de m'enfuir, je pris les poignées. J'allais soulever mais il posa sa main sur ma hanche et me repoussa en commentant:

- Allez, laisse. J’ai plus de force que toi.

J'étais choquée... Je le dévisageai bouche bée, c'était Emeric. Non j'avais rêvé. Il sortit sans que je puisse formuler la moindre phrase. Bien vite mon esprit et ma logique vinrent me rappeler que si Emeric avait agi ainsi ce n'était pas pour me soulager le dos en gentleman mais surement pour une quelconque autre raison comme sortir du boxe par exemple. Les minutes sans son retour me confirmèrent que c'était beau de rêver ou alors il avait fait une connerie, je partis à sa recherche et le vis au loin avec son téléphone une clope au bec. Bon il était toujours en vie, je fis demi-tour et il me rejoignit peu de temps après. Je ne pus le remercier de son geste même s'il n'était pas fait dans le but de m'aider, il aurait pu me laisser me démerder avec la brouette sans rien faire, j'avais peur qu'en le remerciant il commente d'un: " c'est pas pour toi que je l'ai fait morue, rêve pas". Nous finîmes le boxe et je lui demandai de faire celui d'à côté:

- Ow, t’avais pas dit que tu ferais les deux autres ? T’essaierais pas de m’arnaquer, un peu ?

"Arnaquer" c'est quoi ce terme... on dirait un enfant, c'était détestablement mignon.

-Oui mais je t'ai aidé et ça ira plus vite maintenant, non?

- Scheiße…

-Tu l'as dit ajoutai-je avant de disparaître dans mon propre boxe. Ce mot je le connais, c'est d'ailleurs l'un des seuls que je connaisse en allemand.

Une fois le travail fini, j'informai mon hôte... ou plutôt mon parasite que nous allions brosser les chevaux. Il releva la tête vivement comme si j'avais dit une énormité alors que la seule énormité ici présente, c'était lui et sa cigarette entre ses lèvres.

- Allez… ?Sa tête percuta le mur lui tuant les quelques neurones restant. Il en a rien à branler, ton canasson, que tu lui lustres le poil. S’il se roule dans la merde c’est pour chasser les parasites. Qu’est-ce que tu viens l’emmerder, toi, avec tes démêlants et tes petits nœuds, après ?

Je croisai mes bras le fixant, j'avais une envie mordante de lui faire brosser Danseuse, s'il passait la brosse à certains endroits, il allait se faire mordre... mais j'étais trop bonne, trop conne pour me venger avec perfidie.

- Wouha tu m'as l'air de vraiment t'y connaître en chevaux, je devrais peut être t'embaucher en faite? répondis-je ironique.

Il soupira et hautain me fit part de sa découverte pendant que je prenais les brosses.

- On vit vraiment pas dans le même monde.

Calmement, je lui répondis: - Super Einstein, t'as trouvé ça tout seul? Mais merci du compliment. Je me relevai et lui offris mon plus beau et sincère sourire.

-Trêve de bavardage! Coupai-je sérieuse. Au travail. Il faisait le côté droit de Puzzle moi le gauche, je lui lançai des conseils mais cet idiot ne trouvait rien de mieux à faire que de croiser ses bras sur la colonne de mon cheval me faisant face. Moi je donnais mon maximum pour ignorer ce bougre. Puzzle lui venait souvent me donner des petits coups de tête amical afin que je le gratte.

- Je te jure, jamais tu me feras monter là-dessus. Mon ex a essayé pendant plus d’un an et c’est certainement pas quelqu’un comme toi qui saura me forcer la main.

C'est ce qu'on verra Kürschner.

***

Devinez qui se tenait face à moi en mode rage, insultant tout et son contraire à l'image d'un gamin capricieux que son père traîne dans les rayons pendant qu'il pleure sa voiture télécommandée.

- Putain de mal baisée, sale petite trainée de merde, je te promets que tu vas me le payer, ce coup-là.

Il pénétra dans la carrière moi à ses côtés.

- Tu as oublié “salope”, parle pas trop fort philistin, mon père est pas loin.

Caressant l'encolure de Puzzle, je pouvais m'empêcher de jubiler: j'avais réussi la où son ex avait échoué. J'allais l'aider à monter mais toujours blessé dans son orgueil démesuré pour quelqu'un de sa taille, le jeune homme refusa mon aide.

- C’est bon, bouge. J’ai pas trois ans, je ris à sa remarque, j'aurais cru pourtant. j’ai pas besoin qu’on me materne. Et j’ai pas envie que tu reçoives mon pied dans la gueule, ça me ferait mal de t’enlaidir un peu plus. Ce connard de Cobb réussirait encore à m’accuser de maltraitance.

Ses propos sur mon physique me blessèrent mais je n'en montrais rien. Ignore le Harmony, ignore-le tu sais que tu vaux mieux que ça. Oh et puis merde: - M'enlaidir? un rire mauvais s'échappa d'entre mes lèvres. Change ta paire de lunette, ça devient urgent! Dis-je méprisante.

Je n'ai aucune confiance en mon physique mais si je lui montre, il en profite la preuve, ses attaques sont la plupart toutes dirigées sur mon physique “thon” “enlaidir” etc alors si je montre que j'ai confiance en moi, il finira par lâcher le morceau à ce sujet tout du moins c'est ce que j'espérais secrètement. Etant donné que ses propos me blessaient comme une lame d'acier à chaud transperçant ma peau. J'avais presque envie de pleurer mais ne souhaitais pas lui faire cet honneur. Je reculai le laissant ce démerder avec Puzzle et si j’appelai mon cheval au moment où il ferait un bond pour grimper sur son dos comme ça il finira le cul par terre. Non Harmony, ne sois pas plus pitoyable que lui, ne t'abaisse pas à ce niveau. Énervée contre lui, je le regardai faire en croisant les bras. De toute façon je n'eus besoin de rien faire, Emeric était suffisamment pas doué comme ça. Je ne sais pas vraiment comment il s'est démerdé mais sa botte s'envola, je la suivis des yeux sans pouvoir agir. Le temps que je comprenne ce qui s'était passé, Emeric était en train de proférer des jurons (pour changer) afin d’arrêter Puzzle. Je dois avouer avoir eu peur sur le coup.

- Putain de saloperie de merde ! Eh ! Findus, stop ! Arrête-toi, putain ! STOP !

Il s'agrippait tant bien que mal à la crinière tout en glissant. TOMBE TOMBE TOMBE! Mon vœu ne s’exauça pas. Puzzle se stoppa et Emeric se rassit correctement sur la selle. Je les rejoignis et tapotai l'encolure de Puzzle.

- Woh. Ça te broie les couilles, cette connerie ! Tu me donnes ma botte ?

Je baissai la tête et me mis à ricaner nerveusement en revoyant la tête d'Emeric et le vol plané de sa botte. J'étais énervée mais le ridicule de la situation était tellement magique qu'il chassa ma rancœur du moment, je ne pouvais m'empêcher de rire. Je détournai le regard, mes épaules secouaient par les vagues de rire que je tentai de contenir en vain. Je décidai de me retenir et pour cela d'aller chercher sa botte bien sagement afin d'épargner la dignité de Monseigneur Kürschner déjà mise à rude épreuve. Pourtant une fois devant la botte misérablement ensevelie dans la boue de la carrière, j'explosai littéralement de rire en me pliant en 2 tenant mon ventre d'une main et tendant l'autre main vers le remake d'Atlantique l'empire perdu. Il n'avait pas pu ne pas entendre. Je la ramassai en pouffant me remémorant comble de la scène, sa petite constatation finale: "Woh. Ça te broie les couilles, cette connerie !" qui fût accompagné par la grimace des traits de son visage transmettant la douleur sourde ressentie.

C'était trop en l'espace de quelques minutes. Je retournai auprès de mon martyr en pouffant dans mes cheveux, la tête basse. C'était vraiment pas dans un but moqueur, c'était plus fort que moi. Son visage, la botte volante, son commentaire étaient une combinaison de choc.

-Vas... vas -y ...t tends le pied...

J'enfilai sa botte dégueulasse, et commentai: -c'est vrai qu'elles sont immondes ces bottes. Je me détournai ricanant de plus belle toujours la tête basse. Puzzle s'avança vers moi me donnant des coups de tête sans que son cavalier de fortune puisse le contrôler. Je frottai mon visage et me retournai refaisant face à Emeric qui semblait vexé, je pouvais le comprendre. J'aurais dû m'excuser auprès de ses couilles douloureuses.
-pardon. J'allais prendre les rênes mais il me fit comprendre qu'il pouvait le faire lui-même. Fierté mal placée probablement.

-Fais plusieurs tours de carrière au pas et... et... finalement afin d'épargner tes couilles et te laisser la chance d'avoir des descendants plus tard, on évitera le trot.

Je fis un énorme travail sur moi pour ne pas éclater à nouveau de rire. Avant de le laisser partir, j'ajustai ses étriers à sa taille. Il fit plusieurs tours de carrière au pas, Puzzle a plusieurs reprises se stoppa au milieu de la carrière mais Emeric se débrouilla pas trop trop mal pour une première fois. Je lui gueulai des conseils qu'il écoutait si ça lui chantait. Après 10 bonnes minutes, je lui demandai de stopper le cheval et m'approchai de ce couple atypique.
-On va arrêter là pour aujourd'hui. Tu vois c'était pas si horrible que ça.Tu peux descendre.
Ce qu'il fit sans se faire prier, je montai aussitôt avec agilité sur le dos de Puzzle. Tu pourras dire à ton ex Emeric que la gueuze a réussi à te faire monter sur un cheval.
- C'est l'heure de la pause. Va te laver si tu veux ou regarder la télé. Je te rejoins dans quelques minutes, je vais faire un petit tour et remettre les chevaux au boxe ensuite. D'habitude, c'est moi qui devait relever la tête pour le regarder vu sa grande taille mais là c'était lui qui devait lever les yeux pour me regarder. Je réajustai les étriers à ma taille on préparera le repas.
Sans attendre de réponse de sa part ou plutôt sans écouter son râlement, je fis partir Puzzle au trot.

***

Une vingtaine de minutes plus tard, j'étais de retour dans la cuisine, j'avais retiré mes bottes, changeai de tenue me douchant en mode Sonic afin de préparer le repas. Je questionnai le jeune homme en gueulant ne sachant pas où il était: -Tu peux me rejoindre dans la cuisine?

Une fois que j'aperçus sa tête, je lui demandai: -Est-ce qu'il y a des aliments que tu aimes pas ou auxquels tu es allergique?

Tout en sortant des légumes frais du frigo, je continuai: - Je pense faire une salade César en entrée, puis après on va faire simple: des travers de porcs caramélisés avec du riz et genre des tomates provençales... ça te va?

J'alignai les différents ingrédients laitue, parmesan, croûtons, citron, huile d'olive, ail, moutarde, œufs, sel, poivre... puis me tournai vers lui: - Tu peux te charger de la salade César? Je partais du principe qu'il savait comment faire après tout c'était pas bien compliqué même de faire une sauce pour la salade. Il n'avait qu'à faire une sauce à sa convenance.

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MessageSujet: Re: La vie du loup est la mort du mouton. [Gueuse] } Ne pas archiver   La vie du loup est la mort du mouton. [Gueuse] } Ne pas archiver EmptyLun 21 Juil 2014 - 18:14



la vie du loup est la mort du mouton



- Oh non ne t'en fais pas de ce côté là, il n'y a pas que des moutons et ânes dans le voisinage il y a énormément de dindes et vu que c'est le type de femmes que tu prises -les dindes sans cervelle-, tu vas être au paradis ! Fais-moi confiance !

Etait-ce l’esquisse d’un espoir, qu’il avait crue apercevoir dans le chant étouffé de sa voix ? S’il creusait profondément, bien profondément, oserait-il espérer un jour faire face à l’ombre d’une résistance, l’ombre rétive d’une insurrection qui, peut-être, mettrait un peu de piment dans la morne semaine qui les attendait ? La perspective d’inonder un lac de passivité n’avait rien d’excitant, mais celle d’affronter la harangue de l’ennemi était un plus noble combat. Et avec un peu de chance, peut-être même qu’il deviendrait divertissant. Ô, dans un premier temps, lorsqu’elle avait marmonné quelques incantations entre ses dents de harpies, à l’extérieur, il n’avait pas été certain d’avoir bien entendu. Une série de syllabes presque vulgaires pour ses lèvres trop chastes ; un ramassis de mots surréalistes pour une bouche persécutée par la bienséance. Mais maintenant qu’elle s’était exprimée distinctement, elle l’invitait à renoncer définitivement à ses doutes, terminant d’entailler le masque de victime sur lequel il s’était fourvoyé. Il l’avait cru façonné dans le bronze. A l’image de toute sa personne, il l’était plutôt dans la fange, visiblement. Un sourcil arqué, le garçon, déstabilisé, l’avait dévisagée un moment avant de répondre. Si l’amertume de son ironie ne dénotait pas dans le givre qui figeait sa personnalité, ce semblant d’humour colorait la glace d’une chaleur décontractée dont il ne soupçonnait pas l’existence potentielle. Parce que oui. Ces mots étaient bel et bien sortis de la bouche d’Harmony Winfrey.

- Ah… comprends-moi. finit-il par trancher. Quel type n’opterait pas pour une belle dinde écervelée quand sa seule alternative s’avère être un thon repoussant. Sortie ou non d’Harvard, qu’est-ce qu’on s’en branle. ‘Te méprends pas. Comme la bouffe, tout ce qu’on vous demande, c’est jamais que d’être bonnes, hein.

Elle s’était ensuite enfuie derrière la porte pour le laisser se changer, ce qu’il avait fait puisqu’il était désormais vête comme un clochard, debout, dans la cuisine de cette fille, un verre d’eau à la main. Les bras écrasés sous une masse de tissus boueux, elle l’avait suivi, et ses petits iris perçants dardaient son visage au-dessus de la montagne de fringues que sa dignité peinait plus à soutenir que ses muscles. A l’instant même où il lui avait demandé du Dafalgan, son expression s’était encore durcie. Seul le frimas d’Islande étincelait dans ses prunelles sauvages. La mâchoire serrée sous la même ceinture que ses émotions, elle répéta, glaciale :

- Du Dafalgan ?

Le garçon haussa les épaules avec nonchalance.

- C’est ça, du Dafalgan. Tu sais, les comprimés pour la tête qu’on vend dans les pays civilisés ? Il plissa un instant les yeux, précisa : Et même dans les autres, en fait.
- T’es…

Et ce fut tout ce qu’elle parvint à articuler. Peu importait. Son visage émacié s’exprimait pour elle, cocktail désabusé d’intense désespoir et de suprême agacement. Il renifla avec mépris. Avec un peu de chance, elle se suiciderait assez tôt.

- Bon !

Dans un geste saccadé, la jeune femme parqua le tas de vêtements sur un siège et prit sans une remarque de plus la direction d’une pièce adjacente. Ses pupilles azurées dérapèrent sans pudeur sous la naissance de ses reins – ou du moins sur ce qu’il pouvait en voir. C’était étrange, cet enchevêtrement de cynisme et d’assujettissement canalisés en un seul corps. Il esquissa un sourire satisfait. Même Melany Jones, la plus soumise de son harem, ne lui avait jamais accordé autant de faveurs. Du moins, pour un traitement équivalent. Lorsqu’un bruit de pas s’éleva dans le couloir, il tourna la tête dans sa direction. Armé d’un sourire moqueur, Elijah était entré dans la cuisine. Ses doigts se refermèrent autour d’une pomme qu’il porta goulûment à ses lèvres. Un instant, leurs regards se croisèrent, l’un résigné, l’autre amusé. Et quoi ? C’était vraiment le ridicule de sa tenue qui lui arrachait cette insupportable expression ? Putain, il détestait ça. Il serait arrivé nu comme un verre et bâti comme un Vietnamien qu’il aurait encore été plus à l’aise. Aussi prit-il les devant.

- Ouais, je sais. Voler ses armes à l’adversaire et se tirer une balle dans le pied avant que celui-ci ne prenne un quelconque plaisir à le faire. Ça fait clochard.

Sans se départir de son sourire, l’adolescent s’évanouit comme il était apparu. Quant à sa sœur, elle revint, triomphante, de ses fouilles archéologiques. Il lui tendit la main pour qu’elle y pose l’objet sacré de ses trouvailles. Mais comme s’il eut été invisible, elle passa à côté de lui et, d’un geste sec, plaqua le comprimé contre le rebord métallique de son évier. Il haussa un sourcil insolent, jaugea l’être exaspérant qui se tenait devant lui. Leurs regards se croisèrent un court instant. Il referma ses doigts autour de la pilule, la glissa entre ses lèvres. Il y porta le coin de son verre presque vide et, d’une gorgée, il avala le médicament.

- Danke, mein Sau-Bettler-Slave.

Il était presque certain qu’elle ne comprendrait pas. C’était pourquoi il l’avait dit en allemand. A nouveau, elle s’était emparée du tas de vêtements. Elle lui fit remarquer, avant de disparaître avec :

- J'reviens fous pas le feu à la baraque. Caustique, encore et toujours.
- J’y touche pas.

De sa poche, il venait de sortir son briquet. Son pouce chassa mécaniquement le clapet vers l’arrière, libérant une petite flamme rougeoyante. Son poignet se cassa. L’objet roula contre le bout de ses doigts descendus et, d’une pression décidée, il les releva aussitôt. L’espace d’une seconde, l’ustensile virevolta en l’air. Il fit un tour, deux tour, percuta presqu’aussitôt la paume de son propriétaire. Celui-ci rabattit le clapet d’un même mouvement, étouffant l’étincelle qui avait à peine prit le temps de s’animer. Enlacé par les doigts de sa main gauche, il regagna sa poche. La fille, elle, s’était engagée dans le couloir et il entendait maintenant ses talons marteler les escaliers. Réprimant un bâillement, il laissa pour la première fois son regard vagabonder sur les pièces avec davantage d’attention. Certes, cuisine et salon n’avaient rien d’original, mais on était loin du résultat de ce que son imagination avait eut peur de trouver. Ce n’était ni trop sale, ni trop désordonné et, surtout, il n’y avait ni têtes de buffles et autres cornes de taureaux avachis sur les murs, ni peaux de vaches avachies sur le sol en guise de tapis. En guise de décoration, quelques photos, tout au plus, d’un petit garçon et d’une fillette qu’il devinait être la gueuse et son frère. Il s’approcha d’un large cadre aux bordures argentées. Derrière la vitre, une enfant lui dévoilait toutes ses dents dans un fier sourire, le visage sertis de quatre cerises qui pendaient à ses oreilles. Ses iris colorés pétillaient d’une sagesse presqu’élégante. Il détourna le regard. C’était incroyable, comme le temps l’avait mal vieillie. Ses pieds nus balayèrent le carrelage jusqu’à s’arrêter devant un meuble sur lequel étaient disposées davantage de photographies.

- Oh ! Il tourna la tête vers l’origine du bruit. Dans l’encadrement de la porte, la paysanne le fixait froidement. Tes fringues faut les laver à quelle température… ? Pas envie que tu me prennes la tête si elles rétrécissent. Il arqua un sourcil étonné, les lèvres retroussées en une grimace perplexe.
- J’en sais foutrement rien, moi. T’es au courant qu’il existe des étiquettes pour répondre à ce genre de questions ? Voyant qu’elle n’esquissait pas le moindre mouvement, il ajouta : Trente degrés, je suppose ? Vu qu’il y a de la laine. Et n’oublie pas l’adoucissant. Ni la poudre à lessiver.

Le verdict établit, elle l’abandonna sans plus de cérémonie à ses observations. Son attention se reporta sur les cadres. Il reconnaissait les traits de son père, dans un lointain passé où la jeunesse lui souriait encore, et ceux d’une femme plutôt mignonne qu’il ne se rappelait pas avoir déjà croisée. Il pouvait parfois reconnaître les traits d’Harmony dans sa silhouette fragile mais il y avait dans ses postures une noblesse et une chaleur qui lui semblaient totalement étrangères à celles de son hôte. Ce devait être sa mère. Et comme ses enfants et son époux, elle respirait la joie de vivre. Les lèvres pincées, le garçon croisa les bras. Sur la photographie centrale posaient fièrement chacun des quatre corps sur leur cheval respectif. Forts d’un utopique bonheur, ils semblaient invincibles. Il avait la sensation de scruter le portrait de la famille idéale d’une série télévisée ; une chimère, un masque, un mensonge auquel ils avaient pourtant l’air de croire. Dans le couloir, l’escalier grinça derechef sous le poids de la cavalière. Il détourna le regard. Ses pas le ramenèrent au salon. Comme ceux d’Elijah avant les siens, ses doigts se refermèrent autour d’une pomme qu’il rinça à l’évier. Dans la pièce voisine, il entendait quelqu’un fouiller bruyamment dans ce qui devait être un placard. Il s’appuya contre le pan de la porte et l’observa, sans un mot. Il était dos à elle. Elle ne l’avait pas vu. Candide, elle contemplait une vieille figurine de lézard qu’elle avait sortie de son désordre. Critique, sa mère lui avait souvent répété que les paysans étaient incapables de se débarrasser de ce qui leur avait un jour appartenu, n’en eussent-ils le moindre usage. De toute évidence, elle ne s’était pas trompée. La Nu Zeta plaça sa trouvaille en évidence puis le héla d’une voix un peu forte, qui confirmait qu’elle le croyait encore de l’autre côté :

- Ça devrait le faire mon père aussi fait du 44.
- Et bien. Quel merveilleux hasard. fit remarquer l’Allemand, ironique, après avoir croqué dans sa pomme alors qu’elle essayait tant bien que mal de refermer le placard. Quand elle y parvint enfin, elle lui tendit la paire de bottes qu’elle lui avait préparée. Immédiatement, les pupilles masculines s’arrondirent sous la surprise. Tu te fous de ma gueule, hein ?

Le problème n’était pas tant leur couleur verte, certes dégueulasse, que leur coupe fermière mal finie qui leur donnait un style « paysan du kolkhoze ». Sauf que ça n’avait rien d’un style, et qu’il ne voulait surtout pas s’y apparenter. Il entrouvrit la bouche mais aucun son ne parvint à s’en échapper. Le seul mot qu’hurlait son esprit était : pourquoi ? Pourquoi, entre toutes les bottes bon marché qui existaient dans les supermarchés en tous genres, un imbécile avait opté pour celles-là ? Elles n’avaient même pas l’air confortables. Cette famille avait définitivement perdu toute once de dignité. Ses doigts se refermèrent sur les rebords en caoutchouc. Il tira d’un coup sec. Et voilà qu’elle le forçait à partager cette déplorable condition. La mâchoire serrée, il s’abaissa à les enfiler. Non sans mauvaise humeur.

- Dis-moi, c’est héréditaire, chez vous, l’amour des belles choses.

Sourde à ses railleries, la fille lui annonça, rayonnante, qu’ils allaient s’occuper des chevaux. Pour peu que ça ait encore été possible, son regard termina de s’assombrir. Elle s’échappa à l’extérieur avant qu’il ne puisse répliquer. Il soupira, rentra son pied à l’intérieur de la deuxième botte et la suivit, les mains fourrées dans ses poches. A chacun de ses pas, il avait la sensation qu’il allait perdre ses nouvelles chaussures. Ses saloperies n’étaient même pas foutues de tenir correctement la cheville. Ronchon, il ignora le chien qui galopait autour d’eux, se contentant de maudire Winfrey et toute sa descendance sur le rythme des secondes qui défilaient bien trop lentement. Lorsqu’ils arrivèrent à la hauteur du premier box, celui auprès duquel ils avaient pu un peu plus tôt honorer leurs retrouvailles, la jeune fille héla l’équidé d’un nom ridicule – Puzzle. Au moins, elle avait eu la présence d’esprit de lui épargner Prince ou Tempête. L’animal sortit la tête de son abri. Elle lui caressa les naseaux avec un air attendri qui lui arracha un pincement de lèvres dubitatif. Comment ces créatures parvenaient-elles à charmer les filles avec une telle facilité ? Parce qu’à bien y regarder, il n’y voyait pas grand-chose d’attirant. C’était un peu comme un zèbre handicapé, une erreur de la nature particulièrement mal formée. Ca avait quatre pattes trop effilées, par rapport à son corps gras, son ventre tombant et son gros cul. Ses yeux de chèvre animaient d’un peu d’heureuse imbécilité le flegme passive qui l’habitait, comme ça s’était accommodé – pire, satisfait – de sa condition d’esclave. Puis, surtout, ça avait la couleur d’une vache. La brune se tourna vers lui.

- On va nettoyer leurs boxes. Tu vas t'occuper de Puzzle, je ferais Danseuse et Slipping away.

Continuant à mâchouiller sa pomme que ne cessait de fixer le paint horse, il acquiesça avec de grands yeux et un air absolument pas convaincu. Oui, oui… Elle lui tendit un truc fait de nylon et de métal. Automatiquement, son approbation se mua en négation. Mais non. Elle lui ordonna d’attacher l’animal à la barrière qu’elle désignait, ajouta ses consignes de sécurité et quelques mots destinés, semblait-il, à le rassurer. Il cligna des yeux, perplexe, balança son trognon dans la paille du box.

- Pourquoi tu les tapes pas juste dans un pré, plutôt que de t’emmerder à nettoyer leur merde ?

Et la question était honnête. La situation lui paraissait complètement absurde. Après tout, elle ne possédait pas de chevaux de course qui valaient une telle fortune que la moindre écorchure représentait une perte de quelques milliers de dollars. Alors quoi ? Avant qu’elle n’ait pu répondre à sa question, Peanut s’ébroua, l’éclaboussant de toute la crasse qu’un chien pouvait emmagasiner dans ses poils dans un endroit aussi dégueulasse. Il pesta. Moqueuse, la fille s’éloigna. Il leva les yeux au ciel et scruta un instant le loquet qui bloquait la porte en bois. Il savait qu’il n’avait pas le choix. Après avoir poussé un soupir, il s’avança. Un temps, il analysa ce qu’il avait en main. A vrai dire, ça ne ressemblait pas à grand-chose. Seulement à un cercle en tissu relié de part et d’autre à une lanière puis une corde attachée à un anneau. D’accord. Il devait sans doute passer le nez du canasson dans le trou. Il lui présenta le licol. Evidemment, l’équidé n’esquissa pas le moindre mouvement. Les lèvres pincées, il leva les mains pour exécuter ses suppositions. Bien sûr, l’imbécile en profita pour reculer dans le fond de son trou. Emeric leva les yeux au ciel. Agacé, il déverrouilla le loquet. Les pieds arrêtés sur le morceau de béton qui surplombait l’intérieur, il jaugea les dégâts. Il y avait du fumier, partout. Il allait bien être obligé de mettre les pieds dedans.

- Merci pour ta coopération, Ravensburger.

Il soupira encore, pénétra doucement dans le box, comme le lui avait conseillé la fille. Toujours face à l’animal, il lui présenta une nouvelle fois le licol. A nouveau, celui-ci leva la tête.

- Ok… tu veux jouer au plus malin ?

Las, il lui bloqua sans délicatesse le chanfrein de la main gauche et passa la têtière tordue derrière ses oreilles à l’aide de la droite. Son regard glissa sur la lanière qui pendait encore contre sa joue. Une attache trônait au bout. Il hésita, essaya de se souvenir des innombrables photographies qu’Evangeline lui avait montrées, sur son ordinateur. Bien sûr, rien ne lui revint, en dehors de toutes les stratégies qu’il avait ce jour-là établies pour essayer de la convaincre de coucher avec lui. S’il s’était douté que ça aurait pu lui être un jour utile, il aurait peut-être été un peu plus attentif. Contrarié, il l’accrocha finalement à l’anneau qui soulignait la commissure de ses lèvres. Tant pis. Elle n’aurait cas le remettre convenablement, si ça lui chantait. Les doigts agrippés à la corde, le garçon s’avança pour sortir du box, tira pour que le cheval le suive. Ce qu’il ne fit pas. Il leva les yeux au ciel et le fixa, tira avec plus d’insistance. Une fois, deux fois, trois fois. Il acheva sur un coup un sec, sans résultat.

- Putain ! T’as vraiment décidé de m’emmerder, toi ?

Armé de la corde, il lui tapa sur les fesses et quitta la stalle pour de bon. Mais à peine mit-il un pied dehors que son abruti de berger australien lui sauta encore dessus, manquant de le faire tomber à la renverse. Heureusement, il percuta d’abord le poitrail du cheval. Il repoussa nerveusement le canidé, jeta un coup d’œil rapide au second qui lui grognait dessus. Lui, au moins, il avait compris à quoi s’en tenir. La corde par-dessus son épaule, il s’arrêta devant la barrière. Il invita le cheval à s’avancer encore et la passa dans l’anneau. Il s’appliqua à réaliser un nœud papillon, ce qui n’était pas forcément aisé avec un diamètre de telle envergure. Ô, il se doutait bien que ce n’était pas l’attache correcte, mais elle ne lui avait rien expliqué. Elle n’aurait donc qu’à repasser derrière lui. Ce qu’elle fit, après avoir sorti une créature qui tenait un peu moins du bétail et s’être ouvertement moqué de lui. Quand enfin elle se tourna vers lui, elle annonça sa sentence :

- On va nettoyer son boxe !
- Super, comme j’ai hâte !

Inutile de préciser que c’était de l’ironie. Il avait l’impression d’être en pleine partie d’Alexandra Ledermann, les odeurs en plus. Elle lui tendait une fourche. Il s’en empara un peu sèchement. Elle ajouta :

- Déjà on va ramasser les crottins et la paille souillée. Je vais le faire avec toi au début pour te montrer.

Bien. En plus, elle le prenait pour un attardé. Il se doutait tout de même de comment ça marchait. Il se retint néanmoins de le faire remarquer. Elle lui avait dit qu’il n’aurait qu’à s’occuper de ce box-là. Si elle l’aidait, ça ferait toujours ça en moins à faire. Suivie par le couinement de ses bottes asphyxiées par la merde, elle commença le travail.

- On va se marcher dessus. lâcha-t-il après lui avoir emboîté le pas.

Et c’était un fait. Les boxes n’étaient pas foncièrement étroits mais les fourches étaient longues et la brouette qu’elle avait avancée à l’entrée de la porte envahissante. Il soupira, planta les piques de sa fourche dans le fumier, l’écrasa de son pied pour qu’elles s’y s’enfoncent, souleva le tout d’une traction. L’air de rien, c’était lourd, cette connerie. Sans s’avancer, il balança négligemment le contenu vers la brouette, à côté de laquelle travaillait la fille. Un peu trop fort, puisque tout s’écrasa sur elle.

- Oups. Désolé.

Même s’il ne l’était pas le moins du monde.

- Tu sais ce qu’on dit : la merde attire la merde.
- Ah bah ça va. Moi qui pensais que tu pourrais pas t’adapter, finalement, t’es en plein dans ton élément.

Elle riait. Il leva les yeux au ciel, reprenant le travail avec davantage de précision. Il répéta le geste une fois, deux fois, trois fois. Ca puait, c’était dégueulasse, et il se faisait déjà chier. Super.

- Ok, admettons. Tu penses que les chevaux ont aussi besoin d’un toit au-dessus de leur tête pour être heureux. Après tout, pourquoi pas ? Chacun sa conception du monde. Mais pourquoi t’utilises pas un petit tracteur, pour faire ça ? En d’autres termes : pourquoi tu viens me faire chier avec ça quand une méthode intelligente et pratique existe ? J’veux pas dire mais ça irait dix fois plus vite.

Il attendit qu’elle réponde, et puis plus rien. Le silence absolu. Exactement ce qu’il détestait. Il continua ses gestes devenus mécaniques. Il avait l’impression d’être à l’usine. Lorsque son téléphone vibra dans sa poche, il s’arrêta un instant pour le regarder, répondit à toute vitesse, l’y remit. Il recommença aussitôt sa charge, toujours plongé dans cet insupportable silence. Le dilemme était difficile, parce qu’il n’avait aucune envie de sympathiser avec elle, encore moins de faire semblant qu’il s’intéressait à sa vie misérable, mais il savait aussi qu’après une heure comme ça, il allait péter les plombs. Alors voilà ce qu’il articula bêtement, sur un ton totalement neutre :

- Il est pas commode, hein, ton père ?

Et putain, ça non plus, il n’en avait rien à foutre, en fait.
Puisqu’il n’y avait plus rien autour de lui, il avança d’un pas. Instinctivement, la cavalière recula de deux. Il haussa un sourcil et réitéra l’opération, cherchant cette fois-ci son regard du sien. C’était magique, elle s’exécutait à chaque fois. Il esquissa un sourire. Sauf cette fois-ci, puisqu’elle était dos au mur. Il s’avança encore, puis s’en désintéressa. C’était trop facile de la déstabiliser. Il planta sa fourche à côté d’elle et commenta simplement :

- Déjà fatiguée, feignasse ?

Il ajouta un gros tas de purin à la brouette, la scruta, accoudé au manche de sa fourche. Elle était déjà sacrément remplie. La fille s’était visiblement fait la même réflexion puisque ses petits doigts se refermèrent sur chacune des poignées. Avant qu’elle n’ait eut le temps de les soulever, la paume droite d’Emeric s’arrêta sur son flanc droit, la gauche sur sa main. D’une pression, il la convia à lâcher prise puis à reculer.

- Allez, laisse. J’ai plus de force que toi.

Et surtout, ça lui permettrait de sortir un peu de cet enfer. Il souleva les leviers de la brouette et la mania maladroitement jusqu’au fumier qu’il avait déjà repéré. Il l’y renversa un peu brutalement. En vitesse, il jeta un regard en direction des boxes. Personne. De sa poche, il sortit son paquet de cigarettes et en calla une entre ses lèvres. Il l’alluma, pressa immédiatement la pastille mentholée. Il prit plusieurs longues bouffées de nicotine, les yeux à nouveau perdus sur l’écran de son i-Phone. Lorsqu’il aperçut le visage curieux d’Harmony dépasser des stalles, il écrasa son bâton incandescent contre le talon de sa botte et le lança dans le tas humide d’urine et de crottin. Il revint avec la brouette et reprit le travail un peu plus négligemment. Le centre du box était déjà vidé et le gros désavantage des coins, c’est qu’il y avait dedans une série de boules de purin peu compactes qui passaient systématiquement entre les dents des fourches. Après quelques essais, il se résigna, agacé. Tant pis pour la paille fraiche, elle irait aussi dans le fumier. Ils terminèrent ensuite le box au balai et à la pelle, sans échanger un mot de plus. Quand ce fut terminé, elle lui ordonna de s’occuper du box voisin. Il soupira et lui fit remarquer, contestataire :

- Ow, t’avais pas dit que tu ferais les deux autres ? T’essaierais pas de m’arnaquer, un peu ?

En fait, si. Elle l’avait dit. Mais visiblement ses changements d’idées n’étaient pas négociables.

- Scheiße

Putain qu’il détestait devoir obéir comme un esclave à cette grognasse mal baisée. Il se saisit avec agacement la fourche qu’il avait abandonnée, se campa devant l’autre box et constata avec désespoir que l’état et la puanteur du précédent n’étaient rien comparé à celui-ci. Bien sûr, il en était certain : elle avait fait exprès de lui attribuer le pire. Il jura encore et recommença la corvée au rythme des nombreuses pauses qu’il s’accordait entre chaque sms. Quand il eut terminé, il tapa les instruments contre le mur et pailla l’espace comme le lui avait demandé la paysanne, l’application en moins. C’était désagréable, ça grattait et ça s’enfonçait dans ses godasses débiles. Sorti, il s’alluma une nouvelle cigarette. Lorsque l’Américaine réapparut, ce fut pour lui annoncer qu’ils allaient maintenant brosser les chevaux. Il releva la tête vers elle comme s’il venait d’entendre les propos les plus absurdes du monde.

- Allez… ? Les yeux ronds, il laissa l’arrière de son crane percuter lu mur. Il en a rien à branler, ton canasson, que tu lui lustres le poil. S’il se roule dans la merde c’est pour chasser les parasites. Qu’est-ce que tu viens l’emmerder, toi, avec tes démêlants et tes petits nœuds, après ?

Malheureusement, elle n’avait pas décidé d’en démordre. Il secoua la tête avec un air hautain et soupira, les lèvres étirées dans une grimace de mépris.

- On vit vraiment pas dans le même monde.

Brièvement, elle lui expliqua les impératifs du pansage et mit à exécution ses conseils, attendant de lui qu’il l’imite. Il attrapa une étrille et croisa les bras, en appui sur la colonne du cheval. En face de lui, elle brossait le côté opposé de l’animal sans lui accorder un regard.

- Je te jure, jamais tu me feras monter là-dessus. Mon ex a essayé pendant plus d’un an et c’est certainement pas quelqu’un comme toi qui saura me forcer la main.

***
- Putain de mal baisée, sale petite trainée de merde, je te promets que tu vas me le payer, ce coup-là.

Les rennes dans une main, une bombe sur la tête, le sportif tirait derrière lui un Puzzle harnaché. Il pénétra dans la piste de sable, suivi par Harmony qui semblait s’être accommodée à ses insultes. Elle vérifia le sanglage du cheval, descendit les étriers, plaqua la paume de ses deux mains sur le droit et y balança tout son poids avant d’inviter Emeric à monter. Par-dessus le garrot du cheval, il lui accorda un regard excédé.

- C’est bon, bouge. J’ai pas trois ans, j’ai pas besoin qu’on me materne. Et j’ai pas envie que tu reçoives mon pied dans la gueule, ça me ferait mal de t’enlaidir un peu plus. Ce connard de Cobb réussirait encore à m’accuser de maltraitance.

Il posa ses deux mains sur le siège de la selle, appuya un peu. Il analysa d’un coup d’œil la hauteur qui séparait le dos de la créature du sol. Dans le fond, ça ne devait pas être bien différent que de passer au-dessus d’un muret un peu haut, si ? Il recula de quelques pas et s’élança avant que la fille ne puisse faire la moindre remarque. Sa main gauche s’agrippa à la crinière, la droite au pommeau. Il prit violemment appui dessus pour permettre à ses jambes de s’élever. Il avait visé un peu haut, peut-être, et dans son lancer, sa jambe droite expulsa la botte de ferme mal accrochée qui, bien entendu, n’était pas faite pour ça. A l’instant même où il retombait, sans doute un peu brutalement à califourchon sur la selle, elle s’écrasa devant le nez de l’équidé. Surpris, l’animal se ramassa nerveusement sur l’arrière, vira à gauche en un petit bond puis s’éloigna tranquillement au trot.

- Putain de saloperie de merde ! Eh ! Findus, stop ! Arrête-toi, putain ! STOP !

Agrippé à l’encolure de Puzzle, les jambes fermement serrées autour de son flanc, l’Allemand glissait dangereusement sur le côté, s’accrochant désespérément à ce qu’il pouvait pour ne pas tomber – c’est qu’il avait un pied nu et que la piste était trempée. Quand il s’arrêta enfin, il se rassit tant bien que mal dessus. Ses mains s’appuyèrent sur le pommeau et il se souleva doucement en se penchant en arrière. Son premier atterrissage avait été un peu brusque pour ses organes reproducteurs.

- Woh. Ça te broie les couilles, cette connerie ! Tu me donnes ma botte ?


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MessageSujet: Re: La vie du loup est la mort du mouton. [Gueuse] } Ne pas archiver   La vie du loup est la mort du mouton. [Gueuse] } Ne pas archiver EmptyLun 14 Juil 2014 - 11:09



La vie du loup est la mort du mouton.



Emeric & Harmony

Je faisais face à Emeric, le mec le plus détestable et insupportable que la terre ait vu naître. Ou non. En faite, ce mec est juste mon pire cauchemar. Quand un esprit maléfique vient visiter mes rêves il prend l'apparence plutôt agréable à regarder d'Emeric Kürschner. Le film l'exorciste, the ring ou que sais-je encore me terrorisent moins que les yeux glacés de ce type. Yeux glacés qui étaient rivés sur son portable, il m'ignorait de toute sa splendeur moi la paysanne. Un accro au portable? Il a rien pour lui ce type! Si ça ne tenait qu'à moi j'en aurais même pas de portable pour ce que ça sert. Tu veux jouer au con mal élevé? Alors jouons. Sans le saluer, je l'invitai froidement à me suivre. Mon manque de politesse eut son effet escompté en tout cas d'après sa réaction surjouée, un acteur médiocre et... de très mauvais gout.

-Bonjour Emeric ! Exactement comme sur le parking, il prit une voix aiguë dans une imitation ratée de ma propre voix. Bonjour Harmony, comment vas-tu ?  Sa voix reprit sa teinte grave, je me mis à taper du pied en croisant les bras tout en le regardant faire sa petite comédie.A l'image d'un enfant capricieux n'ayant pas eu son action-man opération commando, il réagit dans la provocation: Bien, merci. J’espère que tu n’as pas rencontré de difficultés sur le trajet. D’ailleurs, je tenais à m’excuser d’avoir oublié de te préciser que j’habite là où les lièvres et les renards se disent bonne nuit, dans un terrain aussi dégueulasse que ma garde-robe. …Ce n’est pas grave. Puisque tu es polie et que tu t’excuses, dans toute ma bonté d’âme, figure-toi que je t’accorde mon pardon

Une fois qu'il eut fini, j'applaudis puis lui dis:- C'est bon ta fini ton cinéma... on peut y aller?

Se saluer alors qu'il me méprise complètement à quoi bon cette hypocrisie Emeric? Moi je n'en vois pas l'intérêt! Tu ne m'aimes pas, je ne t'apprécie pas, tu n'as pas envie d'être là, je n'ai pas envie que tu sois là, arrêtons nous à ce genre de statu quo! Et puis tu me reproches de ne pas t'avoir informé mais dès que j'ouvre la bouche, tu ne m'écoutes pas ou tu me prend de haut me méprisant comme si j'étais un vulgaire insecte qui t'agaçait en te tournant autour.

Monseigneur Kürschner daigna enfin m'accorder un peu d'intérêt. Je sens et sais qu'il me dévisageait et me jugeait de ses prunelles froides comme la mort mais je restai impassible, j'avais presque l'habitude. Il eut un sourire arrogant qui ne me disait rien qui vaille, j'arquai un sourcil ne comprenant pas ce qu'il cherchait à faire et surtout redoutant ce qu'il pouvait me faire. Il était plus grand, plus fort, plus riche, plus arrogant, plus provocateur... je ne faisais pas le poids sur aucun tableau. Il connaissait même mon “secret” même si je doute que cela lui soit d'une grande utilité et puis il a probablement dû l’oublier depuis. Mais sait-on jamais qu'un jour ça resurgisse du tréfonds de l'abysse de sa noix vide. Je soutiens son regard de prédateur avec beaucoup de mal.

- Confonds pas, la gueuse. Il est plus bas, ton clebs.

“Gueuse” le surnom humiliant qu'il m'avait donné à la cafet, je sentis la moutarde chatouiller mes narines. Je soupirai en levant les yeux au ciel et marmonnai à moi-même qu'il entende ou pas était le dernier de mes soucis:

-Pardon philistin si tu remuais moins la queue j'confondrais pas. Ma voix fit un magnifique decrescendo.

Il commençait à me briser les ovaires, j'ai peut-être l'air timide, non, en faite je le suis mais je sais avoir de la répartie quand il fallait et en l’occurrence à force de fermer ma gueule face aux pointes de ce petit bourge de mes deux! Je n'en pouvais plus de supporter ses insultes à longueur de journée, son regard supérieur, son mépris chronique et son insupportable caractère. Puisque être gentille ou fermer ma gueule et subir n'y font rien et qu'il n'est pas plus sympa, je vois pas pourquoi je serais douce et compréhensive avec lui. Tout en secouant la tête irritée, je tournai les talons qu'il reste dans les écuries en mode souillon si ça lui chante, je suis pas sa baby-sitter. Il se décida à me suivre, j'entendis le clapotis de ses godasses hors de prix dans la boue l’élément qui compose ton âme mon cher Emeric: la boue et la merde! Mais tu vois t'as appris quelque chose aujourd'hui, tu auras beau mettre le prix, une paire de chaussures qui n'est pas adaptée ne le sera jamais. C'est valable pour tout et particulièrement pour ce qu'on nomme “la vie”. Je suis peut-être un peu comme tes putains de godasses hors de prix, malheureusement je suis une inadaptée de ce monde et je finis par patauger dans le terreau du quotidien.

Je peux continuer à râler? Oui, merci ça fait du bien! Et puis, je déteste l'avoir dans mon dos, j'ai toujours le sentiment qu'il prépare un mauvais coup, ce mec il faut mieux toujours l'avoir dans notre zone de vue comme les enfants sinon il te fout le feu à la baraque que t'auras rien eu le temps de comprendre. Le genre de mec a te foutre enceinte sans même te toucher, quand je vois Emeric je me dis que quand ils ont envoyé un homme sur la lune, ils auraient dû continuer!

Je m'immobilisai non loin de mon père, mon frère toujours en émoi devant la voiture d'Emeric. Mon père immédiatement jaugea le jeune homme qui lui faisait face pendant que mon frère le saluait.

- Salut ! …Et quoi, ça te dirait d’essayer de la conduire ? Interpella-t-il mon frère.

Ce qui me surprit, il ne méprisait pas mon frère dans sa façon de parler. A quoi jouait-il bon sang? Il veut me rendre chèvre, c'est bien parti! Elijah releva la tête surprit et s'avança d'un pas nonchalant -vous savez cette façon qu'ont les ados de s'écrouler à chaque foulée comme si ça leur demandait uneffort surhumain-vers Emeric.

-J'ai pas mon permis mais sur c'te route foireuse c'est pas une BM qu'il faut c'est un char d'assaut.

Mon père coupa leur petite discussion amicale en saluant Emeric d'une voix austère. Il le jugeait comme un intrus tout du moins comme un intrus en essai. Les pères ont cette tendance avec leurs filles, cette tendance à les protéger des autres hommes car ils connaissent mieux que personne les ruses des autres mâles et ils ne veulent que le bonheur de leurs filles et donc ils redoutent que leurs filles se fassent belles pour un menteur.

Après lui avoir fait remarquer son retard, il lui tendit une main sans pour autant le quitter du regard. Je me demandai vraiment ce que mon père a cru lire en Emeric.

- Alors couvrez vos routes de macadam. Répliqua Emeric en lui serrant la main. Sur un terrain entretenu, le moteur de ma… « deudeuche » aurait pu exploser tous les records de votre région et, croyez-moi, je serais arrivé bien à l’heure. On aurait peut-être même eu du temps pour partager une tasse de café.

Mon père se redressa sans le quitter des yeux et il répliqua le plus calmement du monde un léger sourire aux lèvres: - si tu étais parti à l'heure tu serais arrivé à l'heure. (point) et on pouvait clairement sentir le point final qui intimait à Emeric de ne pas trop la ramener. Mon père ne semblait pas non plus être totalement agacé par Emeric, il avait l'air de trouver intéressant sa façon de ne pas se laisser marcher sur les pieds. Il enchaîna rapidement sur le sujet qui lui tenait vraiment à coeur: la raison de sa venue.

- J’… Emeric fût interrompu par un des chiens que mon père calma d'un ordre sec.

Une fois le silence de retour, Emeric termina sa phrase. Il ya pas à dire c'est un beau parleur, il doit en faire tomber des gourdes.

- Votre fille a passé une annonce, à l’école, comme quoi elle cherchait des volontaires pour aider dans votre ferme. Et vous savez, moi, quand je peux rendre service… Alors je me suis dit : pourquoi pas ? Et me voici.

Il remonta son sac sur son épaule, ce qui est agaçant avec ce mec c'est qu'il avait quelque chose d'attachant et je suis même pas sûr qu'il en ait conscience. Regardez-le, on goberait presque son gros mytho.

-Harmony demandait de l'aide à la ferme? répéta mon père en fronçant les sourcils ne croyant pas un traître mot de ce qu'Emeric disait.

Ne voulant pas envenimer la situation, je m'empressai d'interrompre le combat silencieux entre les 2 hommes pour proposer à Emeric de lui faire visiter.

- Je te suis. Dit-il guilleret. Il avait donc décidé de jouer à double face. Ça faisait bizarre de ne pas me faire insulter ou même d'être traité normalement, il allait falloir que j'en profite ça ne durera pas éternellement.

Comment lui résister ? Glissa-t-il à mon père... Le visage de ce dernier se referma immédiatement comme une huître.

Je quittai mes chaussures mais il les garda salopant le parquet sur son passage. Je ne lui fis pas de remarque mais ça m’énervait au possible. Si je commençais à tout relever on avait pas fini. Ça risquait d'être une guerre de répliques cinglantes sans la moindre chance d'armistice et ça allait lui peser à lui mais surtout à moi. Je lui présentai sa chambre sans la moindre gaieté et toujours en prenant soin de l'éviter. J'étais à l'image d'un esprit maléfique se terrant de peur de toucher l'eau bénite et me brûler.

- Euh… 

Je tournai la tête vers lui immobilisé sur le pallier comme s'il avait vu un fantôme. Il laissa tomber son sac à ses pieds, je ne le quittai pas du regard contemplant son visage presque choqué et outré par ce qu'il découvrait sous ses yeux azurs. Voyant son trouble, j'avais presque pitié de lui, tu sais moi aussi j'aurais préféré que tu ne viennes pas chez moi, que tu ne saches jamais où j'habite jamais... le fait que tu puisses même un peu plus être en contact avec moi me répugne comme jamais. J'ai peur... oui j'ai peur qu'il découvre une faille en moi et s'en serve. Ou pire, que je finisse par m'attacher à lui. Quelle horreur!


- Tu veux le numéro de Philippe Starck ?

-Non, tu sais bien que le seul numéro dont j'ai envie c'est le tien! Dis-je en le fixant sans la moindre expression un sourire renversé sur mes lèvres. C’était ironique bien entendu et ça se traduisait par: mets la en veilleuse!

Il comptait dormir sur le paillasson ou quoi! J'aimais pas particulièrement la déco de cette chambre, c'est mon père fan de western qui l'a aménagé ainsi mais tout de même exagère pas, tu dors pas dans un clapier à lapin non plus! Il finit enfin par pénétrer dans ce qui semblait être son pire cauchemar... ravie que ce soit en lien avec moi ainsi on partage un autre point commun: on est tous les 2 le pire cauchemar de l'autre! Il s'assit sur le lit, il reprend vite du poils de la bête ce type! Il commença à rebondir sur le lit pour tester la mollesse et son confort si je me doutais pas des raisons de son geste, je pourrais affirmer qu'il est adorable ainsi. Sauf que mon esprit dorénavant censure ce genre de penser; adorable, attendrissant, mignon c'est incompatible avec Emeric.

- Autre question. Il n’y a que des moutons et des ânes, ici, ou tu as de jolies petites voisines ?  Dit-il en tapotant son oreiller le plus innocemment du monde. Je hais ce mec, JE LE HAIS! Ce serait triste de gâcher une deuxième place si chaleureusement préparée.  Mine de rien, il continuait d'enfoncer le couteau dans la plaie, à savoir mon manque de confiance en moi sur mon physique.

Il ne me jeta pas un regard mais c'était tout aussi bien vu le trouble dans lequel j'étais en l'imaginant faire ses cochonneries à l'étage en dessous de ma chambre. Je tentai de sortir de la pièce le plus vite possible ce mec a le don de me pomper mon oxygène et de me faire suffoquer dans les salles trop étroites. Un sourire apparût sur mes lèvres alors que je le regardai tripoter l'oreiller tout en m'ignorant.

-Oh non ne t'en fais pas de ce côté là, il n'y a pas que des moutons et ânes dans le voisinage il y a énormément de dindes et vu que c'est le type de femmes que tu prises -les dindes sans cervelle-, tu vas être au paradis! Fais moi confiance! J'avais un sourire triomphant sur les lèvres mais il ne resta pas bien longtemps, trêve de chamaillerie. Je lui désignai l'armoire afin qu'il se change et que je puisse me barrer.

- Sans blague ? C’est sur moi que tes saloperies mal éduquées se sont lavées.

-Te plains pas, eux... ils t'apprécient pour ce que tu es vraiment. Articulais-je mauvaise entre mes dents. J'ajoutai que s'il avait un problème je serais derrière la porte.

- Ouais, c’est ça. Sale teigne. Je claquai ma longue contre mon palais, c'est bien la première fois qu'on me désigne par ce genre de terme, quoique gueuse aussi à dire vrai. Emeric est le seul à me donner des petits surnoms “affectueux”. Je claquai la porte irritée, ma tension jouait au montagne russe, je n'allais pas survivre à cette cohabitation. ça allait être lui ou moi.
Alors que je réfléchissais à quoi lui faire faire, la porte s'ouvrit dans un fracas qui me fit sursauter et pousser un petit cri de souris. Je me retournai en colère d'être surprise mais la tenue d'Emeric à savoir un slip calma immédiatement mon irritation. Le rouge colora mes joues et je tournai le dos au jeune homme pratiquement dans son plus simple appareil.

 Sérieusement, je suis vraiment censé porter ces trucs ?
Lui tournant le dos, je ne le vis pas désigner l'armoire mais je compris parfaitement de quoi il parlait. Mes joues étaient brûlantes. Mais quel abruti de sortir ainsi! Putain de RK ! Ma répartie s'étaient envolée loin très haut dans le ciel. Au revoir.. à la prochaine, envoies moi une carte postale! Ça va pas le faire, je crois. C’est pas écrit relooking dans le contrat. T’as pas autre chose, plutôt ? Ton frère, il ferait pas acte de charité, un peu ? Il fait quelle taille ?

Je bredouillai : - plus petit, Il fait 1m 74

- O-kay… Je peux pas mettre ça sans ceinture. 

Il claqua la porte et je poussai un soupire de soulagement. J'étais déjà prête à disparaître pour chercher sa saloperie de ceinture même si pour ça je devais descendre dans l'antre des enfers. Ceinture que je lui ferais bien bouffer! Je trottinai jusqu'à la chambre de mon frère toujours gênée. Mon frère était couché sur son lit, sa PSP entre les doigts: - Tu fous quoi ?
-t'as pas une ceinture à lui prêter?
-Dans le tiroir du bas à gauche. Dit-il sans quitter du regard son jeu.
Je fouillai et en sortis une ceinture qui paraissait neuve.
-Vous êtes le couple le plus dépareillé que j'ai jamais vu. Merci frérot, je suis au courant.
-Va falloir te dire en quelle langue qu'on est pas en couple bordel!
Il releva le visage et me dévisagea: - c'est moi où t'es rouge?
-Mais ferme là ! Je quittai sa chambre sans plus de procès l'image d'Emeric en slip allait me hanter pendant plusieurs heures encore.

Une fois de nouveau devant la porte des enfers, pour sur je ne verrais plus jamais cette chambre comme auparavant peut-être même que je n'y mettrais plus jamais les pieds de peur d'être hanté par de désagréable souvenirs comme si c'était un lieu hanté. Je pourrais engager un exorciseur au pire. Je me stoppai sans oser faire quoique ce soit, après quelques minutes je pris mon courage à 2 mains et l'interpellai:

-C'est bon j'peux entrer?

Pas de réponse, si seulement il avait pu se faire kidnapper par des extraterrestres. je toquai à la porte timidement puis entrouvris la porte en passant à peine mon visage prête à refermer la porte si une vision non désirable venait à surgir. Ça puait la clope à plein nez, mais au moins il était dans une tenue décente.

- Tu m’as demandé de t’appeler si j’avais un problème. J’ai pas de problème. Il releva le visage vers moi.

-Quoi !m'exclamai-je. C'était que du cirque, il avait pas besoin de ceinture? Je vais le tuer... je vais vraiment le tuer puis le dépecer, lui couper les couilles les lui faire avaler, non d'abord le scalper et puis le ...
T’as la ceinture ? M'interrompit-il dans ma charmante lapidation.
- Non, non, je suis revenue avec un slip.
Il leva les yeux au ciel et demanda:
Pourquoi ? Le mien te convenait pas ? Il faisait exprès car il avait vu ma gêne sauf que là il était habillé.
Aucun de tes slips me conviennent. Tiens. Dis-je en lui tendant la ceinture à bout de bras en m'arrêtant au milieu de la pièce.

Il se souleva paresseusement et s'avança vers moi faisant s'affoler les battements de mon coeur, il me mettait vraiment trop mal à l'aise. Il tira sèchement sur la lanière de cuir sans me quitter du regard et les mots les plus improbables franchirent ses lèvres.

- Merci.

Surprise, et n'étant pas sûre d'avoir très bien entendu, il me fallut quelques secondes avant d'articuler: - De rien.

Pendant ce temps monseigneur avait bouclé la ceinture autour de son pantalon trop large moi pas la mienne, je n'étais pas prête à monter dans l'attraction Emeric Kürschner... pas sûr que je le sois un jour cela dit. Il replaça dans se poches son paquet de clope et quelques autres objets en tout genre. Il ramassa ses vêtements jetés au sol, autre geste qui me surprit jusqu'à ce qu'il les dépose dans mes bras en expliquant:

- Ca, c’est à laver par la faute de tes clebs. Il déposa tel un drapeau sur un nouveau territoire ses saloperies de godasses boueuses en haut de la pile.
-Mes chiens ont un nom que tu te souviennes pas du mien, je m'en tape mais eux c'est Tidus et Peanut. Dis-je d'une voix calme mais sèche. Et je peux pas sortir dans votre bac à boue avec mes pompes. Je chausse du 44. je soupirai exagérément bruyamment.

Il m'a prit pour sa bonniche ou quoi? Pendant que monseigneur sortait de la salle, je réfléchissais à comment réagir: jeter ses fringues au sol? L'amener avec moi à la machine? Faire ce qu'il me demandait? Comme dans les jeux vidéos chacun de mes choix me mènerait vers une autre route bien que la finalité soit la même game over et pas la moindre reconnaissance de sa part. Je le suivis en soupirant, il faisait comme chez lui, il avait déjà pris possession des lieux. Ash endormie sur une chaise de la cuisine sauta vivement au bas de la chaise et disparut en voyant Emeric. Probablement qu'elle comptait l’observer de loin. Un peu comme moi au fond.

-fais comme chez toi ajoutai-je dépitée. Tu cherches quoi?

Les bras chargés de son bordel je le regardai faire: fouiller dans les placards, ouvrir le frigo, prendre une bouteille sentir tout ça en ignorant ma remarque. Kürschner si j'avais voulu t’empoissonner crois-moi j'aurais foutu de l'arsenic sur tes draps!

- C’est pas rempli avec de l’eau du robinet, hein ? Questionna-t-il.

-Non. Il pivota vers moi, me dévisageant moi et ma montagne de fringue jaugeant probablement mes propos et si je mentais. J'ai failli ajouter tu sais nous on va prendre l'eau au fond du puits, on a pas l'eau courante mais me tus inutile d'en rajouter.

- Bon !  Il enchaîna d'une voix faussement enthousiaste. Alors, on commence par quoi ?

Je le regardai faire sans rien dire sans la moindre expression, lorsqu'il but une gorgée il accompagna son geste par une grimace en plissant le front. Allons bon quoi encore l'eau n'est pas à la bonne température pour monseigneur?! Mais quelle chochotte ce mec!

- Au fait, t’as pas du Dafalgan ?

Tu veux pas que je te fasse un massage aussi? "J'te rappelle que t'es là pour bosser pas en colonie de vacances alors tu vas fermé ton putain de nid à vipères et tu vas te mettre au boulot, j'chuis pas à ton service!" Ou encore: "tu fermeras ta bouche ou tu seras plus aimable si je t'en donne un?" Aurai-je eu envie de répondre mais j'articulai en serrant les dents.
-Du dalfagan?

Je levai les yeux au ciel en pinçant les lèvres: - T'es … je ne finis pas ma phrase n'arrivant pas à formuler le fond de ma pensée.

-Bon! je posai son bordel sur une chaise et me dirigeai vers un des placards du salon. Je fouillai dans le placard et finis par trouver les fameux dalfagan, je savais que j'allais regretter d'être “gentille” avec lui plutôt que de lui dire d'aller se faire foutre mais que voulez vous quand on est con, on est con. Mon frère traversa le salon et jugea du regard la scène, il prit une pomme dans un saladier et disparut un sourire moqueur sur les lèvres que j'étais parfaitement capable de traduire mais que heureusement Emeric ne devait pas comprendre. Je reviens vers lui analysant les fringues qu'il avait sélectionné un vieux jeans gris foncé, un sweat d’un blanc délavé et une chemise à carreaux bleus. L'habit fait pas le moine c'est vrai, ainsi Emeric semble bien plus sympathique qu'auparavant pourtant il n'a pas changé d'un pouce.

-Tiens. Je posai à côté de lui sur l'évier son dafalgan. Je deteste lui obéir même pour juste prendre un truc pour lui. Je préfère le contexte de l'école ou je peux être froide et libre de faire ce que je veux, malheureusement il est à ma charge et je dois faire un minimum syndical pour lui.

Je soupirai en prenant ses fringues.
-j'reviens fous pas le feu à la baraque. c'était bien sûr moqueur.

Je montai à l'étage et déposai ses vêtements dans le tambour et ses chaussures au sol, puis hésitante devant la machine je finis par redescendre
Oh! L'interpellai-je. Tes fringues faut les laver à quelle température.. pas envie que tu me prennes la tête si elles rétrécissent
Après tout ses fringues étaient de qualités, je n'avais jamais lavée, ni même portée ce genre de vêtement et même si ça se lavait peut-être à la même température je préférai directement demander pas qu'il croit que j'ai fait exprès. Au pire il se foutra de ma gueule, se dira que je suis bien une paysanne pour changer mais moi j'aurais la conscience tranquille.

Une fois débarrassé de ceci, j'ouvris un placard non loin de la porte d'entrée et m'assis en tailleur devant me mettant à fouiller dans les chaussures. Je sortis une paire de bottes. Il y avait un bordel monstre là-dedans, je découvris même un de mes vieux jouets que je contemplai en souriant. Une tortue ninja sans son bandeau, sans sa carapace qui tendait les bras pour un câlin. Je la plaçai de sorte à pouvoir la retrouver.

-ça devrait le faire mon père aussi fait du 44. annonçai-je à voix haute. Je fourrai les chaussures sorties en bordel dans le placard et refermai tant bien que mal. Je tendis les bottes triomphante devant Emeric et en souriant lui dit: - On va s'occuper des chevaux!

Je sortis dehors et lorsque Emeric me rejoignit, je partis en direction des écuries. Tidus immédiatement accourut vers nous, il semblait bien aimer Emeric, en même temps il ya peu de gens que ce chien n'aime pas.

-Puzzle hélai-je. Le cheval sortit la tête de son box et nous fixa. Je viens caresser ses naseaux tendrement. Ma façon de lui dire bonjour puis je me tournai vers Emeric: - On va nettoyer leurs boxes. Tu vas t'occuper de Puzzle, je ferais Danseuse et Slipping away. Tidus haletait au côté d'Emeric.

-Tiens! je lui tendis un licol en souriant. Sors-le du boxe et attache le là-bas. Je désignai une barrière en bois avec plusieurs anneaux à égale distance. T'as rien à craindre LUI insistai-je il ne mord pas. Évite les gestes brusques ou de t'énerver si tu veux pas te mettre en danger. Ah fais attention quand tu passes derrière un cheval aussi.

Je n'étais pas stupide et je savais bien qu'il ne devait pas avoir la moindre idée de comment ça fonctionnait mais n'était-ce pas amusant de voir Emeric se démener avec le licol et Puzzle. Tidus se secoua nous aspergeant à cause de ses longs poils de boue et d'eau de pluie. Je me reculai mais le pantalon d'Emeric prêté en prit pour son grade. Un sourire aux lèvres, je disparus de l'écurie et reviens avec une brouette, 2 fourches et 2 balais. Je garai ma brouette non loin des écuries et entrai dans le boxe de Danseuse et quand bien même elle tenta de m'empêcher de lui mettre son licol en soulevant l'encolure, il ne me fallut pas moins de 5 minutes pour la sortir et l'accrochai dans la boue à l'extérieur. Tidus aboya plusieurs fois après Emeric, il lui sauta sur le ventre une fois qu'Emeric sortit Puzzle de son boxe. Peanut, quant à lui se rapprocha de l'intrus en grognant.

Je m'avançai vers Emeric et Puzzle contente de voir qu'il avait fait l'effort de sortir le cheval sans trop se plaindre mais je me stoppai et fixai mon cheval qui tournait sa tête vers moi l'air de me dire: “aide-moi”. Le licol était mis n'importe comment, bon je m'y attendais mais c'était quand même un désastre avec un peu de logique c'était pas si compliquer de comprendre comment ça fonctionnait. Il avait accroché le clips de la sous-gorge à la muserolle puis il avait fait nœud. Sans dire quoique ce soit, mes yeux descendirent sur la longe attachée beaucoup trop courte, il aurait fait ça à Slipping Aaway, il aurait tiré au renard et l'aurait probablement arraché avant de galoper gaiement jusqu'au bois. Mes prunelles suivirent le tracée de la longe et pensant avoir tout vu, je découvris un nœud papillon pour clôturer le tout. Je passai ma main sur mon front et éclatai de rire. Sans faire de commentaire, je détachai le licol et le remis correctement, défis le nœud et donnant plus de mou le rattachai correctement. Je tapotai l'encolure de Puzzle et me tournai vers Emeric.

-On va nettoyer son boxe! Je pris une fourche et lui tendis l'autre: - Déjà on va ramasser les crottins et la paille souillée. Je vais le faire avec toi au début pour te montrer.

Je pénétrai dans le boxe et commençai à ramasser les crottins et à les déposer dans la brouette. C'était plus qu'étrange de devoir travailler avec Emeric à ses cotés. J'avais l'impression de faire un remake du prince et du pauvre.
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MessageSujet: Re: La vie du loup est la mort du mouton. [Gueuse] } Ne pas archiver   La vie du loup est la mort du mouton. [Gueuse] } Ne pas archiver EmptyMar 8 Juil 2014 - 18:39



la vie du loup est la mort du mouton



Vingt-sept, vingt-huit, vingt-neuf…

Il avait compté vite. Vraiment. Pourtant, malgré ses précautions, Harmony Winfrey ne lui avait pas laissé le loisir de croire plus d’une minute à une éventuelle échappatoire. Déjà, son timbre hivernal brutalisait ses tympans harassés par ses activités de la veille. Elle avait rappelé son chien à l’ordre ; Tidus, de son petit nom. Il avait déjà entendu ce mot-là dans la bouche d’Evangeline et ses neurones, quoi qu’épuisés, ne tardèrent à faire le lien. Il haussa un sourcil moqueur. Parce qu’elle était passionnée par les jeux vidéos, par-dessus le marché ? Cette fille n’avait décidément rien pour plaire. Il écrasa sa lèvre inférieure sous le poids de ses dents, le regard toujours rivé sur les courbes qui coloraient son écran. Il savait qu’elle s’était sans doute légèrement approchée. Il savait aussi que le dard perçant de ses iris le dévisageait certainement scrupuleusement. Néanmoins, il ne cilla pas, confortant le semi-silence qu’animaient avec patience les incessants halètements de ses chiens et les mâchouillements agaçants de son canasson. Lasse, probablement, de cette comédie immature, elle ne tarda à briser le mutisme, arrachant un soupir à son invité.

- Faudra te changer, suis-moi.
- Bonjour Emeric ! commença-t-il à piailler, imitant l’accent et le timbre de la jeune fille. Bonjour Harmony, comment vas-tu ? Il avait repris sa voix normale, continua ensuite à alterner avec sa mauvaise caricature au rythme de ses propos. Bien, merci. J’espère que tu n’as pas rencontré de difficultés sur le trajet. D’ailleurs, je tenais à m’excuser d’avoir oublié de te préciser que j’habite là où les lièvres et les renards se disent bonne nuit, dans un terrain aussi dégueulasse que ma garde-robe. …Ce n’est pas grave. Puisque tu es polie et que tu t’excuses, dans toute ma bonté d’âme, figure-toi que je t’accorde mon pardon.

Il n’avait pas lâché son téléphone des yeux, davantage concentré sur le message qu’il s’apprêtait à expédier que sur ses échanges avec la paysanne. Son pouce gauche effleura la touche « envoyer » ; l’engin s’exécuta. Il le glissa dans sa poche. Sa tête bascula nonchalamment sur le côté. Instantanément, il jaugea la silhouette de son hôte. Partant de ses bottes boueuses, il suivit le tracé de ses jambes, puis celui de ses hanches. Brouillée par son pantalon trop large, la ligne était à peine perceptible. Il continua son ascension, s’arrêta un instant sur le t-shirt olive qui camouflait toujours aussi méticuleusement le galbe de sa poitrine. Cette petite manie qu’elle avait de mettre à l’épreuve ses compétences en matière de mesure était assez contrariante. Qu’importe. Il lui suffirait de palper, à l’occasion. Par inadvertance, bien entendu, à l’image des maladresses de son regard. L’idée lui extirpa un sourire arrogant et, enfin, ses prunelles s’arrêtèrent sur le dessin austère de son visage. Si proche et pourtant si inaccessible à la fois ; il ne pouvait y déceler aucune émotion. C’était comme si s’il avait été taillé dans les glaces de Sibérie. Il arqua un sourcil. D’un souffle frondeur, la braise de ses iris balaya le givre des siennes.

- Confonds pas, la gueuse. Il est plus bas, ton clebs.

Bander à quatre pattes et se plier, la queue battante, aux requêtes pathétiques d’une femelle ? C’était déjà beaucoup lui en demander quand il recevait en retour un corps alléchant dont il pouvait disposer aux grés de son plaisir, alors s’engager dans une partie où l’adversaire n’avait rien à hypothéquer ? Plutôt crever dans les caniveaux que lui avaient promis Bardot.
Impérieuse, la Nu Zêta lui tourna simplement le dos. Il leva les yeux au ciel, désabusé, avant que ceux-ci ne glissent sur le fessier qu’elle lui offrait généreusement. Ou pas tant que ça, finalement. Quel imbécile vendait des jeans pareils ? La coupe de son pantalon était si bien travaillée qu’il n’y avait absolument rien à deviner dessous. Les lèvres pincées, il lui emboita le pas. Sa main libre – celle qui ne retenait pas son sac sur son épaule – s’enfonça dans sa poche. Putain, il était vraiment temps qu’une âme charitable lui apprenne à s’habiller.

Ils s’approchaient d’une maison grossièrement bâtie en briques blanches. Sur le parking, un adolescent d’approximativement seize ans examinait avec l’attention d’un passionné la voiture qu’il avait abandonnée. Surpris, il haussa les sourcils. Celle-là, on ne lui avait encore jamais faite. Elle était couverte de boue et, même impeccable, elle était loin d’avoir le charme d’une Mercedes. Pourtant, elle ne lui faisait pas moins d’effet que celui que lui aurait fait un Dassault Rafale. La jeune femme s’immobilisa. Il l’imita, toujours circonspect. C’était incroyable, tout de même, ce que la mécanique pouvait exercer comme pouvoir sur la majorité du cœur des mâles. Enfin… Ses pupilles butèrent sur une paire de chaussures inconnues, remontèrent à la rencontre du faciès de leur propriétaire. A quelques exceptions près. Il ne lui avait suffit que d’un regard pour être envahi par une certitude ; ce type – Adalson, puisque c’était son nom – respirait à plein nez l’archétype du mec pisse-froid et psychorigide. Soutenus par de broussailleux sourcils, ses petits yeux le toisaient avec une rude sévérité. Il essayait de le jauger. Rétif, l’Allemand soutint un temps le contact entre leurs regards, le brisa presqu’aussitôt avec arrogance. Son attention renoua avec le frère Winfrey.

- Salut ! …Et quoi, ça te dirait d’essayer de la conduire ?
- Bonjour jeune homme.

Grave mais sec, le timbre autoritaire du père trancha avec le ton désinvolte qu’avait emprunté l’étudiant, l’obligeant presqu’à se remémorer quelles étaient censées être ses priorités. Ses prunelles se posèrent à nouveau sur la silhouette patriarcale. Il enchaîna :

- Belle voiture cependant... ça sert à quoi d'avoir une bagnole qui peut monter à plus de 250 kilomètres heures en quelques secondes si c'est pour conduire comme mamie dans sa deudeuche ? Tu as plus de 40 minutes de retard si tu es pas au courant, que ça ne se reproduise plus !

L’expression était acerbe, l’accent accusateur, mais le sportif ne pouvait s’empêcher d’estimer le contenu de ses propos osés, compte tenu de la situation. Personne n’avait pensé à le prévenir que la famille Winfrey vivait dans la cambrousse. Et lui, il n’avait pas été foutu d’entretenir son domaine. Il encaissa toutefois les réflexions sans se départir de son ordinaire rictus d’impudence. Les pupilles pétillantes, il soutenait sans se départir de son allégresse les dards perçants de son interlocuteur. Il serra avec assurance la main qui lui était tendue.

- Alors couvrez vos routes de macadam. commença-t-il, peut-être exagérément désinvolte. Sur un terrain entretenu, le moteur de ma… « deudeuche » aurait pu exploser tous les records de votre région et, croyez-moi, je serais arrivé bien à l’heure. On aurait peut-être même eu du temps pour partager une tasse de café.

Sous la pointe de défi que trahissaient ses propos, le message était clair : « essayez toujours de me déstabiliser, parce que vous n’y arriverez pas ». Il sourit innocemment. Ce n’était pas tout à fait exact pour ce qui était de l’heure, mais ce n’était qu’un détail de parcours.

- Harmony ne m'a pas donnée plus d'explication sur les raisons de ta venue ? Peux-tu expliquer ta présence ici ?
- J’… commença-t-il en essayant de repousser un chien trop envahissant de sa main droite. La réaction de l’homme fut immédiate :
- Du calme maintenant les chiens !

Austère, sa voix claqua violemment au-dessus de l’halètement insupportable des canidés. Ceux-ci s’éloignèrent immédiatement et s’assirent, définitivement calmes. Les paupières de l’Européen se plissèrent imperceptiblement, toujours plongées dans celles de l’Américain. Il y avait quelque chose de presque dangereux, dans la douce agressivité d’Adalson. Ou peut-être était-ce cette droiture, combinée au danger de l’homme méfiant qui jamais ne se laisse berner, qui le mettait mal à l’aise.
À sa gauche, Harmony avait écrasé le pied de son frère qui semblait la narguer. Il n’avait pas entendu pourquoi. Il haussa son épaule dégagée pour enfin répondre à la question qui lui avait été posée.

- Votre fille a passé une annonce, à l’école, comme quoi elle cherchait des volontaires pour aider dans votre ferme. Et vous savez, moi, quand je peux rendre service… Alors je me suis dit : pourquoi pas ? Et me voici.

D’un geste franc, il remonta son sac sur ses épaules. Il esquissa un nouveau sourire ingénu, sourire qui se figea dans un semblant de grimace lorsque son hôte proposa de lui faire visiter sa chambre, mais surtout de lui prêter ce qu’elle avait appelé « vêtements de rechange ».

- Je te suis. lâcha-t-il joyeusement à l’attention d’Harmony. Il lui emboîta le pas et glissa avant de s’éclipser à l’attention son père, mine résignée : Comment lui résister ?

À peine s’étaient-ils éloignés que son sourire s’évanouit pour laisser place à l’expression d’un extrême agacement. Il n’était pas non plus question de se fatiguer avec de la comédie quand leur public avait le dos tourné. Avant de pénétrer dans sa demeure, la fille s’était débarrassée de ses bottes. Il la regarda faire mais n’abandonna pas ses Alden pour autant. Ses yeux étudièrent un instant le premier espace qu’il avait en vue. Même s’il ne voyait encore rien, il imaginait bien le parquet de sa maison couvert d’un tapi de terre et de poils d’animaux domestiques. Jamais il ne marcherait là-dedans en chaussettes. Il la suivit à l’intérieur avec ses chaussures boueuses. Fidèle à l’inexistence de ses talents sociaux, elle lui présenta l’essentiel des pièces sans lui proposer au préalable de poser son sac quelque part. Il la suivit sans faire de commentaire quand, enfin :

- Voilà c'est là que tu dormiras.
- Euh…

Elle était entrée mais lui s’était immobilisé sur le palier. Son sac glissa de son épaule et tomba lourdement à ses pieds. Perplexe, il ferma les paupières, les rouvrit à nouveau. Un qualificatif, un seul, lui semblait convenir pour décrire ce qu’il avait désormais sous les yeux : manque cruel de bon goût. Ah là, pour sûr, c’était certain. La gueuse était immergée dans son élément. Couleurs dépareillées, mobilier grossier et ensemble vieillots, presque barbare, on était à des années lumière du luxe des hôtels de Miami Beach. Il avait l’impression de s’être enfoncé dans les tréfonds de sa garde-robe.

- T'as des questions ?
- Tu veux le numéro de Philippe Starck ?

Ses doigts se refermèrent sur la hampe de son sac et ses talons claquèrent sur le bois laqué. Une fois, deux fois, trois fois. Il lâcha son bien et s’assit sur le lit. Les mains en appui de chaque côté de ses cuisses, il se fit rebondir plusieurs fois dessus, comme s’il avait cherché à tester l’élasticité du matelas. Verdict ? Inconfortable. Et comme si ça ne suffisait pas, il grinçait. Peu importait. Il n’était pas des plus pudiques.

- Autre question. Il n’y a que des moutons et des ânes, ici, ou tu as de jolies petites voisines ? Il tapota l’oreiller le plus éloigné du plat de la main et précisa, pour toute explication : Ce serait triste de gâcher une deuxième place si chaleureusement préparée.

Suffisants, ses iris colorés prirent à peine le temps de le toiser. Elle était déjà prête à s’enfuir. D’un geste, elle se contenta de lui désigner l’unique placard qui trônait dans la chambre. Lorsque sa voix s’éleva derechef, il arqua un sourcil. Une minute. Elle espérait réellement qu’il enfile d’autres vêtements ? Parce que lui n’en avait pas l’intention, et ce n’était pas foncièrement question de mauvaise volonté. Il fallait être honnête. Qui de sain d’esprit et de bien dans sa peau aurait eu envie de se fondre dans leur paysage désuet ?

- Bon je te laisse te changer t'es encore plus crade que mes chiens, on croirait que t'as pris un bain de boue ! Un demi-sourire éclairait son minois de petite peste des champs.
- Sans blague ? C’est sur moi que tes saloperies mal éduquées se sont lavées.
- Si t'as un problème appelle-moi, j'chuis derrière la porte !
- Ouais, c’est ça. Sale teigne.

La porte claqua. Le garçon se laissa tomber sur le dos, soupira. D’un geste maladroit, il se débarrassa de ses Ray-Ban, se frotta les yeux avec insistance. Son mal de tête n’avait cessé de croître et lui perforait désormais si douloureusement les méninges que les garder ouverts réveillait les prémisses d’une nausée qui, il le savait, n’allait tarder à s’affirmer. D’accord. C’était la dernière fois qu’il buvait autant la veille d’une journée comme celle qui l’attendait. Rassemblant le peu de courage qu’il lui restait, il se redressa et vida les poches de son pantalon sur le lit. Bloquant son talon droit sous le poids de sa semelle gauche, il se défit de sa première chaussure, réitéra l’opération pour la seconde. Ses doigts s’arrêtèrent ensuite sur son gilet, son t-shirt et son pantalon qu’il envoya embrasser le parquet. Enfin, ils se refermèrent sur les poignées de la commode. Il l’ouvrit. Et là, le choc.

- Pu…tain…

Il écarquilla les yeux. Qu’est-ce que c’était que ce bordel ? Pantalons usés, t-shirts délavés, gilets dépareillés,... Les cintres crissaient à toute vitesse sur la hampe mais l’attention de l’Allemand ne s’arrêtait pas sur le moindre morceau de tissu. Non seulement ces… machins étaient vieux mais, comme si ça ne suffisait pas, ils étaient atrocement ringards. Super. De quoi se croire plongé dans l’univers de La petite maison dans la prairie ou de L’amour est dans le pré.

- Vous achetez vos fringues dans les banlieues d’Otjiwarongo, ou quoi ? dit-il assez fort pour qu’elle puisse l’entendre. Il soupira à nouveau, se dirigea vers la porte d’entrée. Il l’ouvrit, mine irritée. Gênée, sans doute, d’apercevoir un homme en caleçon, la prude détourna immédiatement le regard, ce qu’il trouva étrange parce qu’en dehors de l’utilisation qu’on en faisait, un caleçon n’était pas bien différent d’un maillot. Il poursuivit, ignorant son embarra. Sérieusement, je suis vraiment censé porter ces trucs ? Du bout du pouce gauche, il désigna l’armoire. Ca va pas le faire, je crois. C’est pas écrit relooking dans le contrat. T’as pas autre chose, plutôt ? Ton frère, il ferait pas acte de charité, un peu ? Il fait quelle taille ?

1’74. De toute évidence, il pouvait toujours faire l’aumône devant le parvis des Hilton.

- O-kay… Irrité, il ajouta sur le ton de la frustration : Je peux pas mettre ça sans ceinture.

Il claqua la porte derrière lui. Le linge fouillé, il jeta finalement son dévolu sur un vieux jeans gris foncé, un sweat d’un blanc délavé et une chemise à carreaux bleus dont la coupe s’avérait plutôt houleuse. Il les enfila. Bien sûr, l’ensemble ne se contentait pas d’être pastoral. Il était aussi trop large. Ses cheveux remis en place, ses pupilles quittèrent l’image que lui renvoyait le miroir avec dépit. Il remonta d’une main le pantalon qui tombait déjà sur ses hanches, récupéra son téléphone et se jeta sur le matelas. La tête plongée dans l’oreiller, il coinça une cigarette entre ses lèvres, l’alluma. Il se mit à pianoter sur son écran tactile.
Lorsque la voix d’Harmony s’éleva de l’autre côté des murs, il ne réagit pas. Tant qu’elle ne venait pas le tirer de ce lit, c’était autant de temps gagné. Timidement, son petit poing heurta le bois de la porte. Elle l’entrouvrit, lui demande où il en était. Le garçon tourna la tête vers elle, tapotant le sommet de sa cigarette au-dessus d’un gobelet qu’il avait trouvé sur la table de chevet. Les cendres s’écrasèrent lourdement dans le fond.

- Tu m’as demandé de t’appeler si j’avais un problème. J’ai pas de problème. Il rangea son i-Phone dans sa poche, écrasa après une dernière longue inspiration sa Marlboro Beyond dans le verre et s’étira. Il réprima un bâillement. T’as la ceinture ?
- Non, non, je suis revenue avec un slip. Mais c’est que c’était une vraie petite rigolote ! Il leva les yeux au ciel, désabusé.
- Pourquoi ? Le mien te convenait pas ?

Du bout des doigts, elle tendait l’objet en avant, mais elle ne s’était pas approchée. Elle était trop loin pour qu’il puisse l’attraper. Il soupira. Bien sûr, elle allait l’obliger à se lever, par-dessus le marché. Avec tout le flegme du monde, il prit appui sur ses mains pour se redresser. Il s’avança, referma ses doigts autour de la lanière de cuir et tira d’un coup sec pour qu’elle la lâche. Il n’avait pas quitté ses iris du regard.

- Merci.

Coincée dans son jeans, il la boucla. Il remit alors ce qu’il avait sorti de son Jack & Jones dans ses poches (cigarettes, briquet, portefeuille, téléphone) et entreprit de ramasser les vêtements qu’il avait éparpillés. Il les tapa sans délicatesse aucune dans les bras d’Harmony.

- Ca, c’est à laver par la faute de tes clebs. Il rajouta ses chaussures au-dessus de la pile avant qu’elle ne puisse réagir. Et je peux pas sortir dans votre bac à boue avec mes pompes. Je chausse du 44.

Il passa devant elle sans plus de commentaire et s’extirpa de la pièce. Il retrouva la cuisine, la balaya du regard. Après avoir repéré quelques placards, il trouva ce qu’il cherchait. Un verre claqua sur la table. Il s’empara ensuite d’une bouteille d’eau abandonnée dans le réfrigérateur. Il fit tourner le bouchon entre ses doigts, porta le goulot sous ses narines. Il en renifla l’essence. Aucune odeur suspecte.

- C’est pas rempli avec de l’eau du robinet, hein ?

Crever du choléra aux confins de la campagne, non merci. Il remplit son verre et se retourna. Ses pupilles s’arrêtèrent sur la fille. Il haussa une épaule.

- Bon ! Il porta la boisson contre ses lèvres, trancha avec un ton innocent et exagérément enthousiaste. Alors, on commence par quoi ?

Il avala goulûment une première gorgée, comme pour souligner d’un peu de nonchalance son impertinence. Ce qu’il n’avait pas prévu dans le calcul, c’était que l’expérience lui arrache par la même occasion une grimace ridicule. Woh putain. Si l’or bleu soulagea la sensation pâteuse qui lui restait collée dans la bouche, sa température – trop froide – n’était pas totalement adaptée à l’état vaseux de son crâne. Les yeux plissés, il ajouta, l’air de rien, sans croire réellement à sa mansuétude :

- Au fait, t’as pas du Dafalgan ?


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MessageSujet: Re: La vie du loup est la mort du mouton. [Gueuse] } Ne pas archiver   La vie du loup est la mort du mouton. [Gueuse] } Ne pas archiver EmptyDim 6 Juil 2014 - 10:28



La vie du loup est la mort du mouton.



Emeric & Harmony

Demain, le diable vient me rendre une nouvelle fois visite et ce n'est pas une visite de courtoisie comme on peut s'en douter. Le seul point positif c'est qu'il sera en dehors de son élément naturel puisque oui, mesdames et messieurs vous ne rêvez pas, MONSEIGNEUR Kürschner va retirer ses chaussons de diamants pour foutre les 2 pieds dans la merde chez moi, au ranch... quelle chance. J'en suis tellement... honorée que je n'arrive pas à fermer l’œil. Je me tourne et me retourne dans mon lit, mes draps font penser à un champ de bataille. Je me suis couchée à 23h55, il y a pas si longtemps il me semble mais je n'arrive pas à trouver le sommeil. Mon portable m'annonce qu'il est 01h33 et qu'en faite, je n'arrivais pas à dormir convenablement depuis un petit bout de temps. Tout ça à cause d'Emeric! Je suis sure que lui il dort d'un sommeil de plomb ou non, suis-je bête, il est en train de se taper une meuf voir plusieurs. Je secouai la tête tentant désespérément de chasser l'image naissante d'Emeric jouissant entre les cuisses d'une demoiselle. Quelle horreur, tu m'étonnes que je ne trouve pas le sommeil!
-Yaaaa!! C'est répugnant! Je te hais Kürschner! m’écriai-je en fouettant l'air de mes jambes rageusement.

Dépitée, j'ouvris la lucarne du toit au-dessus de mon lit... oui ma chambre est juste sous le toit, même si je suis petite à certains endroits je ne peux pas me tenir debout. Il a plu de grosses gouttes de pluie depuis plusieurs heures mais ça s'était calmé, pourtant le ciel disait clairement que ça allait péter à nouveau. Il fait frais, c'est agréable, dehors il n'y a pas un bruit outre le silence de la nuit. Je passe la tête par la lucarne et pose mes coudes sur le rebord imbibant mon pyjama de l'eau de pluie. J'aime les ambiances nocturnes, cette espèce de pesanteur, comme si le temps s'était arrêté. Ça m'apaise, je me sens requinquée à bloc par une énergie de source inconnue. Je me sens toute puissance, bien, à mon aise, libre... la nuit a un étrange pouvoir sur moi. J'entends au loin le clapotis des gouttes tombant discrètement au sol, la pluie fait remonter une odeur de terre mouillée à mes narines. Quelque part les cris d'animaux nocturnes percent le silence de la nuit. J'aimerais vivre la nuit et dormir le jour ainsi je n'aurais pas à rencontrer des gens comme Trey ou Emeric, je n'aurais pas à me calquer de force à ce monde qui ne tourne pas rond, à ce monde qui ne me ressemble pas. Maman... Dis-moi? Un jour est-ce que je trouverais une petite place pour moi sur cette terre? Est-ce que je trouverais quelqu'un pour moi?

Je descends au rez-de-chaussée sans faire de bruit, sans oublier mon appareil photo et mon carnet. En passant devant la porte de la chambre de mon frère, je l'entendis se tourner dans son lit. Avec précaution, j'évite la 5e marche de l'escalier menant à la cuisine car elle grince. Je passe devant la future chambre qui hébergera Emeric que j'ai rangé, aéré et nettoyé en prévision de sa venue. D-stress est couché sur une des chaises en osier du salon en boule, chaise qu'il a d'ailleurs bousillé en y faisant ses griffes. Il ne lève pas la tête en m'entendant. Je sors dehors et m'arrête sur le pas de la porte, l'air rafraîchi par la pluie fouette mon visage. Je prends une profonde inspiration et souris en m'asseyant sur le perron en bois. J'aime cet endroit. Je reste assise pendant de longues secondes griffonnant sur mon carnet: Where are you going? Take me with you! I cant be alone.. Une fois lassée d'écrire, j'enfilai mes bottes en caoutchouc et disparu dans la forêt, un brouillard s'était levé à cause de la pluie, je pris plusieurs photos avant de retourner me coucher au alentour de 4H.

Après ma nuit relativement courte, je me suis levée à 08 heures passées, le rendez-vous avec l'autre tête à claque était fixé au alentour de 08 heures 30. Il y avait beaucoup plu cette nuit par intermittence, des grosses pluies frappant rageusement les tuiles du toit suivit de périodes de calme absolu. La pluie avait dû se calmer au alentour de 5 ou 6 heures du matin mais le terrain était boueux presque impraticable. Environnement parfait pour l'accueillir... lui... notre hôte de marque. Mon père était déjà debout depuis au moins 2 heures, je sais pas ce qu'il fait aussi tôt le matin mais il déteste faire la grasse matinée enfin je suppose qu'il déjeune et s'occupe du jardin et des moutons. Je n'avais pas particulièrement faim lorsque j'entrai dans la cuisine. Mon père me reposa la même question qu'hier, qu'avant-hier, la même depuis 1 semaine.

-Tu m'as dit que c'est pour quelle raison déjà qu'il vient chez nous?

Je ne sais pas ce que mon père s'imaginait mais ma main a couper qu'il était à des années lumières de la vérité: on allait loger mon bourreau, pas mon copain. Cependant je ne lui avais jamais vraiment dit le pourquoi, du comment.
Rendre service... je suppose. Dis-je sans le regarder dans les yeux.

Il me fixa interloqué et je ne doute pas qu'il le sera d'autant plus en découvrant le jeune homme presque précieux qu'il va loger. Je n'ai pas pu lui dire la vérité, de peur de retrouver la tête de petit bourge d'Emeric suspendu au-dessus de la cheminée et je ne veux même pas imaginer ce que lui ferait mon père en apprenant les charmantes appellations qu'Emeric m'a donné.

-Il a beaucoup plu m'empressai-je d'ajouter pour éviter d'avoir à trop entrer dans les détails tout en me servant un café.

-Oui je m'y attendais. Je me baissai et caressai Ash qui s'enroulait autour de mes jambes en miaulant.

-Il y a rien pour toi à manger ici. lui dis-je en me redressant et empoignant 2 biscottes et de la confiture de fraise.

-Je vais réveiller ton frère sinon il va se pointer en pyjama devant E... Eric?

Je m'assis et débutai mon frugale petit-déjeuné, une boule au ventre tout en regardant mes photos de la veille. ici iciici Plutôt contente de moi.

-Emeric! Je lui avais répété 20 fois à croire que son cerveau faisait un blocage ou qu'il faisait exprès. Je prononçai son prénom en chassant le dégoût de ma voix. Ash sauta sur mes genoux en ronronnant.

-Oui c'est pareil ton ami .. là!

Je tiquai au mot “ami”... s'il savait mais n'en rajoutai pas plus.

-Tu es sûr qu'il n'est rien de plus? Nous y voilà... ce qui le dérangeait.

J'éclatai d'un rire théâtral: - oui, oui pas de soucis de ce côté là.

-Bon il se leva et monta à l'étage pour mettre ses ordres à exécution. Je me levai laissant Ash et tirai les rideaux observant le marécage qui s'était formé devant la maison. Il va être ravi pensai-je c'est comme si on lui souhaitait la bienvenue du plus profond de notre cœur. Je remontai dans ma chambre afin de m'habiller, le démon ne devrait plus tarder en théorie. Pourtant 5 minutes, 10,12, 15 minutes s'écoulèrent sans apercevoir ni le bout de sa queue, ni son ombre. Je tournai en rond regardant à travers les rideaux toutes les 5 secondes mais pas la moindre trace de sa voiture à l'horizon. Et s'il avait eu un accident? Ou s'il s'était perdu en chemin, il n'avait aucun moyen de me joindre et moi non plus. 20 minutes... il ne comptait pas venir inutile de lui trouver des excuses et de s'inquiéter comme une débile. On parle d'Emeric pas de Mère Teresa.

Mon père s'avança vers moi alors que j'avais abandonné l'idée de le voir arriver, d'un côté j'en étais presque soulagée... ça m'éviterait de devoir le subir chez moi, le voir mépriser ma maison et ma famille, de devoir assister à ça silencieusement. J’espérais tout de même qu'il était en vie et pas en train de pourrir dans un fossé non loin des bois. Pas que ce soit en soi une grosse perte mais je ne lui souhaitais- pas même à lui- d'avoir un accident. Je pris les devants avant qu'il ne me questionne sur le “retard” d'Emeric, ce qui n'était juste retarder l'échéance des explications.

-Concernant notre discussion d'il y a 3 jours. Il se stoppa et sembla chercher dans les tiroirs de son esprit.

-A propos de débuter un élevage... Nous avons des dizaines de boxes inoccupés, sans parler des près. Si nous continuons ainsi nous allons finir par vendre tous nos hectares, c'est de pire en pire chaque année au lieu de nous sauver. Je sais que c'est une dépense considérable de temps, d'argent et d'énergie mais je pense qu'on devrait pouvoir après 1 ou 2 ans rentrer dans nos frais. Pourquoi pas au moins se renseigner?

-Ah! L'élevage de paint horse ou quarter horse pur race?

-Tu as été maréchal, cavalier et moniteur, tu connais pas mal de choses sur les chevaux particulièrement sur le débourrage et dressage, c'est du gâchis de ne plus exploiter tes talents! Je savais que c'était depuis la mort de maman mais même, il était temps qu'il vive et laisse le passé devenir passé.

Il soupira presque convaincu: - Je dois encore y réfléchir. Le monde des chevaux lui manque, je pouvais le voir. Très souvent, il s'arrêtait devant le boxe de Slipping away réfléchissait puis faisait demi-tour. On ne fait pas si facilement une croix sur sa passion.

-Si on vendait Slipping Away on pourrait facilement s'acheter au moins une jument et un étalon... pas que j'ai envie de le voir partir...mais concrètement

J'entendis alors les chiens aboyer et regardai l'horloge: il était 09h06. Emeric allait-il finalement montrer le bout de son nez? Les aboiements se rapprochaient faisant resurgir mon anxiété. J'enfilai des bottes en caoutchouc en prenant bien tout mon temps sans écouter mon père faire une réflexion sur l'heure. Puis en ayant pris une profonde inspiration, je finis par sortir dehors le cœur battant, stressée à l'idée de revoir mon bourreau. Il avait au moins 40 minutes de retard mais il était venu: était-ce mieux? pas sûr, sans même le voir il venait de me transmettre un message: "tu es le dernier de mes soucis et je m'en fous de toi et de ce foutu rendez-vous". Je ne sais pas si je devais être contente ou pleurer. Mon père et mon frère sortirent en même temps que moi et découvrirent une superbe BMW. L'énorme bagnole noir couverte de boue trônait fièrement sur notre parking, c'était le genre de voiture que même si j'économisais toute une vie je ne pourrais pas me payer. Mon frère écarquilla de grands yeux avant de s’exclamer :- T'as mis le grappin sur le gros lot... comment t'as fait avec...

Il ne finit par sa phrase fusillé du regard par mon père, je l'ignorais ayant répété dix milles fois que c'est pas parce que je n'invite aucun mec à la maison que le premier que j'invite est mon petit ami et en l’occurrence on était à des années lumières de cette situation et puis ils comprendraient rien qu'en le voyant.
Mon frère ajouta: - Ou alors un bourge s'est perdu en chemin?

La voiture était là mais je ne voyais pas son conducteur, où avait-il bien pu aller cet idiot pas foutu d'attendre 5 secondes au même endroit exactement comme les gosses.
-Non c'est lui! Je pouvais voir la signature d'Emeric que ce soit à travers la bagnole ou l'absence de sa présence.

Il y avait des empreintes dans la boue mais mélangées au aller-retour de mon père ce matin et puis je n'avais aucune envie de jouer au détective privé parce que Monseigneur n'était pas foutu de patienter.

-Regarde un peu la bagnole! radota-t-il. Tu devrais vraiment le mettre dans ton lit. Il me fixa de haut en bas et rajouta: - bon.. ouais c'est mort!

-mais j't'emmerde! je lui jetai d'un coup de pied de la boue au visage.
-Hey mais ça va pas... en plus elle est folle!
-Tu parles mais toi c'est quand la dernière fois que t'as eu une copine? Silence lourd de sens. bon alors écrase!

Tidus et Peanut délaissèrent leurs nouvelles attractions et accoururent dans ma direction, je les vis débouler des écuries et Tidus posa ses pattes sur moi salopant mes vêtements mais ils étaient fait pour ça. Tout en caressant la tête de Tidus, je lui murmurai: - Conduis moi à cet abruti!

Le chien réagit immédiatement comme s'il avait compris ou qu'il souhaitait me montrer sa nouvelle trouvaille. Il repartit en direction des écuries coursé par Peanut, je les suivis d'un pas vif faisant de grandes foulées. Une boule grandissait plus je me rapprochais du lieu où, je savais qu'il n'y aurait plus de retour possible. Je l'aperçus enfin entouré par les chiens, couvert de boue, je dus retenir un rire. Il a quelque chose d’innocent, je saurais pas dire quoi et je doute qu'”innocent” soit le mot le mieux adapté mais n'en trouvant pas des meilleurs dans l’immédiat vous ferez avec. Je sais bien que c'est stupide de penser ça de ce connard mais c'est vraiment l'image qu'il renvoie quand il n'a pas enfilé son costume "je-suis-abjecte-".

Il portait de grosses lunettes de soleil et des vêtements très chics bien que dans un état pitoyable. Il était non loin du boxe de Puzzle, une chance que ce soit pas Danseuse, elle l'aurait peut être mordue... quel dommage! J'étais dans mon élément pas lui, j'étais en quelque sorte en position de force, la balance a changé de sens. Je me stoppai à une bonne distance le dévisageant de haut en bas. Si Peanut se tenait à une bonne distance de l'étranger ce n'était pas le cas de Tidus qui lui tournait autour: -Tidus au pied! Ordonnai-je, le chien gambada vers moi tout content. Je relevai le visage vers Emeric sans véritable expression et sans le saluer lui dis: - Faudra te changer, suis-moi. Je tournai les talons suivit par les chiens et Emeric.

Il semblait tellement être un anachronisme comme le “cherchez l'erreur dans le tableau ci-dessous”. Je retournai devant la maison, mon frère faisait le tour de la voiture comme si un astéroïde contenant des ovnis venaient de se cracher à cet endroit. Il se redressa en apercevant Emeric et l'analysa de haut en bas un sourire moqueur sur les lèvres mais de l'admiration dans les yeux. Je soupirai et tendant une main vers Emeric, je le présentai à ma famille d'une voix tout à fait pas enjouée:

-Voilà Emeric, il va nous aider pendant quelques temps. Je pivotai voici mon père Adalson et mon frère Elijah . Mon père arqua un sourcil en jugeant la tenue vestimentaire d'Emeric inadaptée pour son séjour ici.

Mon frère se rapprocha et le salua grossièrement: “salut Emeric, bonne chance! puis mon père qui ne l'avait pas quitté des yeux prit la parole: - Bonjour jeune homme. Belle voiture cependant... ça sert à quoi d'avoir une bagnole qui peut monter à plus de 250 kilomètres heures en quelques secondes si c'est pour conduire comme mamie dans sa deudeuche?
Il ne le quitta pas des yeux et j'étais très mal à l'aise de l'ambiance instaurée par mon père. Tu as plus de 40 minutes de retard si tu es pas au courant, que ça ne se reproduise plus!

Il se rapprocha et lui tendis la main sans ciller, jaugeant l'âme d'Emeric se reflétant dans ses prunelles azures. J'ai déjà essayé et c'est pas si faciled'y lire quelque chose, c'est le bordel là-dedans papa tu sais.

Il ajouta: - Harmony ne m'a pas donnée plus d'explication sur les raisons de ta venue? Peux-tu expliquer ta présence ici? Les chiens tournaient autour de l'inconnu le reniflant: - Du calme maintenant les chiens! gronda mon père ce qui eut pour effet de les stopper et les faire asseoir.

Elijah murmura pendant le boucan: c'est son copain voyons! Je lui écrasai le pied en lui murmurant de se la fermer tout en le fusillant du regard. C'était le dernier genre de blague que j'avais envie d'entendre. L'ambiance restait tendue en tout cas de mon point de vue, mon frère lui avait l'air de beaucoup s'amuser.

Fixant Emeric en coin, j'ajoutai:- Je vais lui montrer sa chambre et lui donner des vêtements de rechange. Je tournai mon visage vers lui essayant de garder un sourire sur mes lèvres mais il était peut-être bien devenu une grimace. Tu viens?

je quittai mes bottes avant de rentrer et attendis qu'il me rejoigne pour lui faire visiter sommairement la maison: la cuisine, les chiottes, la salle de bain et surtout sa chambre.

Tout en soupirant et évitant le moindre contact visuel et surtout physique, je pénétrai dans sa chambre et lui dis: -Voilà c'est là que tu dormiras. T'as des questions? et je dis bien questions pas commentaires. Bien sûr, je tus la deuxième partie de ma phrase.

Me plaçant non loin de la porte ce qui traduisait mon envie mordante de me barrer de la chambre et surtout de lui. D'un mouvement de menton, je lui désignai un placard: - Il y a des affaires là-dedans, des vêtements pour travailler sans avoir peur de te salir! Ils sont à mon père mais vous faites pratiquement la même taille et carrure donc ça devrait le faire.
J'imaginais Emeric en salopette ou dans un vieux jeans sans forme et ne pus complètement contenir mon sourire... j'avais dû mal à l'imaginer. Je m'éclaircis la gorge: - Bon je te laisse te changer t'es encore plus crade que mes chiens, on croirait que t'as pris un bain de boue!

Je n'avais aucune envie de voir Emeric se changer sous mes yeux et encore moins le voir en slip, je m'empressai de quitter la chambre en lui donnant pour toute information: - Si t'as un problème appelle-moi, j'chuis derrière la porte!

C'était vraiment gênant d'accueillir un homme sous mon toit qui plus est, cet homme là. J'étais stressée comme jamais à l'idée qu'il puisse faire un sale coup ou dire quelque chose de blessant... ça sera que ça en plus me direz-vous. C'est vrai mais je commence à saturer de ses attaques sur mon physique ou sur ma personne. J'allais devoir jouer les baby-sitter et l'enfant que je gardais n'était pas un ange... oh non.

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MessageSujet: La vie du loup est la mort du mouton. [Gueuse] } Ne pas archiver   La vie du loup est la mort du mouton. [Gueuse] } Ne pas archiver EmptySam 21 Juin 2014 - 11:57



la vie du loup est la mort du mouton



- Emer’ ? Emeric… ? Emeeeriiiiic ? Emeric ?

Silence. Les yeux clos par le sommeil, l’esprit d’Emeric Kürschner devenait hermétique à tout facteur qu’il classait comme étant « potentiellement gênant ». Et lorsqu’il ne comptait pas plus de six heures de repos à son actif, toute créature humaine qui ressemblait de près ou du loin à une femme glissait automatiquement dans cette catégorie de nuisibles. Ô, ce n’était pas que leur charmante compagnie lui déplaisait, bien au contraire, mais les statistiques étaient claires. Il avait suffisamment vécu pour savoir qu’il était beaucoup plus rare d’observer l’une de ces démones vous dérober quelques précieuses heures de sieste pour partager avec vous un salvateur plaisir que pour renforcer, en frappant fort dés l’éveil, l’effet pervers des tortures mentales qu’elles étaient capables de vous infliger. Ce stratagème de légitime défense perdait néanmoins tout son intérêt lorsque la femelle s’avérait persévérante. Or toute femelle était, par définition, persévérante en matière d’emmerdes. Que fallait-il en conclure ? Que cet hermétisme, dont il était pourtant si satisfait, ne servait absolument à rien, si ce n’était à épuiser instantanément le seuil de patience de sa compagne nocturne. En d’autres termes, à chercher à éviter le conflit potentiel, il ne faisait qu’accroître le potentiel de chiante-attitude du facteur « gênant ». Presque bienveillante, une main s’arrêta sur son épaule découverte, la secoua tout en douceur. Puisqu’il ne réagissait pas davantage, elle remonta jusqu’à son visage qu’elle effleura tendrement. Lovée contre le corps endormi, celui d’une jeune femme nue. Accoudée sur le matelas, elle dominait de quelques centimètres le dormeur.

- Emeric !

Son index manucuré s’écrasa contre la joue masculine, repoussant à plusieurs reprises sa tête inerte du côté opposé. Lasse de ses infructueuses tentatives, elle lui asséna une petite tape. Enfin, il donna alors un autre signe de vie que celui de son souffle ralenti ; il poussa un râle paresseux et se tourna complètement afin de tourner le dos à l’enquiquineuse. Dans un mouvement défensif, il remonta le drap au-dessus de ses yeux.

- Emeric, il faut que tu te lèves, maintenant. lui souffla la jeune femme à l’oreille. Elle essaya de tirer sur les rideaux opaques qu’il s’était improvisés. Il l’en empêcha.
- Quelle heure il est ? tenta-t-il d’articuler, la mâchoire encore engourdie.
- 6h15, ton réveil a déjà sonné trois fois.
- Quoi ?

Son ton était mu par la mécompréhension et l’hébétude. Le front plissé, les sourcils froncés et le regard vide, il avait abaissé la couette sous son menton et s’était tourné vers l’étudiante, accusateur. La mine rongée par l’exaspération, il ajouta :

- Pourquoi tu me réveilles à six heure du mat’ un lundi matin ? C’est mon jour de repos. Laisse-moi dormir.

Machinalement, il lui tourna à nouveau le dos, ferma les yeux. Perplexe, la petite Arabe secoua légèrement la tête. Elle n’avait pas l’air étonnée ; seulement blasée. Elle s’échappa de la chaleur des draps et se redressa. Sur la plante des pieds, elle traversa maladroitement la longueur du matelas. Intérieurement, l’Allemand jurait contre elle dans chacune des langues qu’il maîtrisait. Extérieurement, il continuait à faire semblant de dormir. Elle sauta lourdement sur le parquet. Ses prunelles noisettes s’arrêtèrent sur le tas que formait le corps d’Emeric, emmitouflé dans ses couvertures. Il n’avait pas cillé. Et puisque la méthode douce ne portait pas ses fruits… Ses doigts agrippèrent l’extrémité du tissu immaculé. Elle tira dessus d’un coup sec, arrachant du même mouvement le garçon à sa protection de soie. Celui-ci se recroquevilla sur lui-même et pesta en allemand. Elle l’ignora et sauta sur le lit. Il était temps de passer à la méthode forte.

- Allez ! Bouge ton cul, crétin !

Sans discrétion aucune, elle s’était hissée à sa hauteur et, brutalement, la paume de sa main droite claqua contre la cuisse dénudée du sportif. Ce dernier poussa un cri d’exclamation et se tourna vivement vers la fille.

- Eh, putain mais qu’est-ce qui te prend ?! Ca va pas dans ta tête ?!

Il avait prit appui sur son coude droit et la fusillait du regard. Elle lui adressa un sourire rayonnant.

- Je commence ton dressage. Ses yeux arrondis sous la surprise se plissaient désormais, à la recherche d’un lien qui lui échappait. Il était évident qu’aux vues de sa fraicheur matinale, percuter sur quelque référence houleuse était trop lui en demander. Elle leva les yeux au ciel, mine amusée. Ta Nu Zêta t’attend, banane.
- ‘Fais chier !

Instantanément, le regard de l’Allemand s’était assombri. Il se laissa derechef tomber en arrière, roula sur le ventre et plongea sa tête dans l’oreiller. Mais plutôt que de s’enfoncer dans le moelleux des plumes, son nez s’écrasa contre ce qui ressemblait à un morceau de papier à peine rugueux. Interloqué, se cambra une seconde. Un billet de cent dollars ? Sans réfléchir davantage, il l’éjecta de la place gardée de son crane. Aucune importance.

- J’avais complètement zappé cette connerie. geignit-il.
- Tu parles ! s’exclama l’étudiante en enfilant un t-shirt qu’elle était allée récupérer dans l’armoire de on amant. Avant d’être trop mort pour te souvenir de ton prénom, t’as passé la soirée à nous bassiner avec ça. Jordan hésitait à t’exploser la tête dans le mur pour que tu la fermes enfin, avec tes jérémiades.
- Hein ? Tout dans le ton de l’interjection respirait la consternation désabusée du Rho Kappa. Il plaida sa défense : Putain mais qu’est-ce que tu racontes encore ? J’étais absolument pas ivre mort, hier.

Un sourire de compassion illumina ses traits féminins d’une expression qui l’énervait avant même qu’elle n’ait commencé à parler. Elle acquiesça faiblement, s’appliquant à rétablir la dure vérité.

- Tellement mort que tu m’as appelée Kiara, que tu as joui après un temps record de treize secondes et que tu t’es aussitôt endormi.
- Tu déconnes ?

C’est qu’étrangement, de son point de vue, la scène ne s’était pas exactement déroulée de la sorte. Non seulement leur nuit avait été longue et torride mais en plus, il l’avait comblée, et elle en avait redemandé. Seulement voilà. Elle n’avait absolument pas l’air de déconner, et ça n’aurait pas été la première fois qu’il se serait inventé une scène sous l’effet de l’alcool. L’universitaire secoua la tête, confirmant la véracité de ses propos.

- Hun-hun. En fait, j’ai même été étonnée que tu puisses encore te servir de ta bite. Un instant, elle se tut. Elle fronça les sourcils et se prit le bas du visage dans les mains, comme si elle avait été en intense réflexion. Ou alors… t’as peut-être raison. Ouais. Elle acquiesça, l’air satisfaite de l’aboutissement de sa pensée. T’étais pas bourré. T’es toujours comme ça.
- Ferme-la.

Excédé ou vexé, ou peut-être les deux, Emeric venait de tenter de lui lancer son édredon à la figure. Statique, elle suivit sa vaine ascension du regard et l’observa s’écraser à ses pieds sans plus de cérémonie. Elle haussa une épaule frivole.

- Hm. Bien essayé ! Elle enjamba le coussin et retrouva son ami sur le lit. Il n’avait rien ajouté, visiblement mal à l’aise. Ses doigts parcoururent allègrement la cambrure de son dos, retracèrent le dessin de la balafre qui marquait l’arrière de son flanc gauche. T’inquiète… précisa-t-elle finalement. J’en parlerai pas.
- T’as intérêt.

S’écartant de ses caresses, il se rapprocha du bord du matelas et pencha sa main sous son lit pour attraper la bouteille d’eau qu’il avait abandonnée là. L’alcool, dont ils avaient abusé, avait laissé un goût pâteux et désagréable dans sa bouche. En vain, il essaya de s’en débarrasser à coup de longues gorgées. Il la reboucha et la lâcha lourdement, laissant son bras pendre librement par-dessus son lit. Il ne bougea plus. La position était bien trop confortable. Les deux mains de la fille claquèrent alors brutalement sur ses fesses couvertes par les inscriptions « insert coin » du caleçon fétiche que lui avait offert Trevor deux ans auparavant.

- On bouge, maintenant, grosse merde !

Le cycliste jura une fois encore dans sa langue maternelle tandis qu’elle s’appliquait à pousser sa jambe droite, puis la gauche, dans le vide. Sans prendre la peine de résister, il maugréa l’évidence :

- Mais c’est que t’es encore plus chiante le matin qu’en journée, toi… Et ce n’était pas peu dire.
- C’est parce qu’il n’y a que ça qui marche avec toi, gros malin !

Gnagnagna. Comment espérait-elle qu’il soit frais après seulement trois heures de sommeil ? Il ne connaissait pas grand-chose en science mais il n’était même pas encore certain d’avoir cuvé l’éthanol qu’il avait ingéré dans sa totalité, tant les symptômes de la gueule de bois étaient légers. Pas de nausée, pas d’estomac lourd ; seulement un mal de tête perforant et des muscles, y compris le cerveau, au minimum de leurs capacités. En d’autres termes, seuls les effets d’une effroyable fatigue. Près du lavabo, la fille continuait à piailler comme un moineau mais il n’entendait rien de plus que des sons désarticulés et inintelligibles qu’il n’essayait même plus d’assembler pour leur trouver un sens. Il ne fallait pas trop en demander à son endurance. Gauche, il se redressa en position assise, les mains en appui sur le rebord de la couette. Sa tête lourde bascula d’un côté, puis de l’autre. Il soupira, se frotta les yeux. Sa vue était encore légèrement trouble. Le regard perdu dans le vide, il bailla sans élégance. La journée s’annonçait déjà si belle. Sans réelle motivation, il se frappa les joues, dans l’espoir désespéré de stimuler son énergie. Rien n’y fit. Il secoua énergiquement sa tête transpirante de lendemain de soirée – tête qui ne ressemblait pas à grand-chose d’autre qu’à celle d’un vieil alcoolique, plongea son visage dans ses mains. Ses doigts glissèrent mécaniquement dans ses cheveux humides. Ses iris glissèrent sur la jeune femme. Enfin, elle s’était tue. Une brosse-à-dents l’empêchait de poursuivre ses articulations incessantes. Ainsi muette, elle était presque mignonne, malgré les dégâts que le matin et la  courte nuit qu’ils avaient passée avaient occasionnés sur ses traits. Presque. L’Allemand tendit les jambes, se remit sur ses pieds. Dans un geste automatique, l’expression loin d’être plus dégourdie, il fit un pas, puis l’autre.

-‘Ai ‘affe ‘est ‘a’e.
- Hein ?! Il s’était immobilisé.
-‘Ai ‘affe… ‘est ‘ale !

Elle avait dit ça sur un ton d’avertissement mais elle lui aurait parlé en français qu’il n’aurait pas davantage compris ses propos. Désabusé, il ajouta, reprenant son ascension dans la pièce :

- Putain, je comprends rien à ce que tu racon… Merde ! Bordel mais qu’est-ce que… ?!

La surprise arracha à sa flegme une expression de dégoût. Il baissa la tête. La plante de son pied nu venait de s’écraser dans ce qui, la veille, avait du être une flaque de bière, mais qui n’était désormais plus qu’un résidu collant et visqueux.

- D’accord… Il allait devoir faire attention.
- ‘E ‘a’ais ‘it.

Il l’ignora. De toute manière, il n’avait rien compris. Ses pupilles continuèrent à parcourir la pièce. Il était impératif qu’il paie quelqu’un pour désinfecter tout ça. Ou peut-être qu’il demanderait à l’infante de Miami, Alyssia de son petit nom, de le faire pour lui, histoire qu’elle se sente un peu à sa place. Une collection de vêtements dont on s’était vulgairement débarrassé retraçait le chemin qui séparait le lit de la porte d’entrée. Près du matelas trônait, entre deux flaques de bière, le préservatif qui n’avait donc pas servi longtemps. Il le repoussa du bout du pied. Mais ce qui était vraiment particulier, dans ce tableau, c’était cet amas de billets éparpillés dans toute la chambre. Il se pencha et en attrapa un, perplexe.  

- Jess’ ? Pourquoi ‘y a plein de fric, par terre et dans le lit ?

Avant de répondre, l’Eta Iota recracha son dentifrice, se rinça puis s’essuya la bouche. Son regard perçant se riva dans celui de son interlocuteur. Elle esquissa un sourire, amusée.

- Pourquoi cette gueule dubitative ? Hier, tu trouvais ça très excitant de m’en foutre plein le corps. Il plissa le front et haussa un sourcil. Elle se foutait de sa gueule ? Un peu trop, même, puisque tu as joui apr…
- Oui, je sais ! tranche-t-il sèchement. Parce que j’ai joui après le temps record de treize secondes et que je me suis aussitôt endormi. C’est bon, j’ai compris.

Elle ricana. Froissé, lui ne trouvait absolument pas ça drôle. Il s’avança vers son armoire et la parcourut son contenu du regard avant de réaliser qu’il avait déjà préparé ses vêtements. Il tourna la tête vers son sac. Il soupira, se pencha pour les attraper. Armée de sa serviette savamment enroulée, Jessica lui asséna un coup de plus sur les fesses. Agacé, il ne cilla même pas. Elle sourit.

- On va se laver ?
- Ouais. Donc rends-moi ça.

Il tira d’un coup sec sur le tissu pour s’en emparer et le jeta par-dessus son épaule, s’en alla ensuite chercher ses shampooings.

- Ta meuf est pas dans les parages, hein ?
- Je te l’ai déjà dit. C’est plus ma meuf, et elle est à l’hôpital.
- Citron-verveine ? Son regard glissa sur les mains de la fille. Qu’est-ce que… ? Bah putain, elle a des goûts bizarres.
- Hep, hep, hep. Il s’approcha. Tu prends pas les siens, tu prends les miens.
- Oh, c’est bon, ça va rien lui faire. C’est juste un peu de shampoing.
- J’ai dit : tu laisses ça là. Armé d’un regard sévère, le sportif attrapa les produits un peu sèchement et les remit automatiquement à leur place. Il referma bruyamment l’armoire après en avoir retiré une serviette de plus.
- Ok, ok, pas besoin de t’énerver.

L’étudiante, qui n’avait pas perdu son sourire, tira sur l’élastique du caleçon de son amant pour le faire claquer sur sa peau.

- Allez, magne-toi, sinon je me lave sans toi.
- Tu vas te calmer, à la fin ? J… Brusquement, il s’immobilisa, sourcils froncés. Son regard azuré parcourut l’ensemble des ustensiles qui bordaient le miroir. Une seconde. T’as amené ta brosse-à-dents ?
- Bah non. J’ai utilisé la tienne.
- Putain, t’es vraiment dégueulasse, Jess’ ! Bon. Il utiliserait celle d’Evangeline.

Il était 7h49 quand leurs pas résonnèrent enfin sur le bois des escaliers et qu’ils débouchèrent dans cuisine. Ils étaient propres et frais – du moins, autant que cela était possible étant donné les circonstances, habillés, et son instinct de mâle était satisfait. Son sac se balançait vulgairement par-dessus son épaule. Il le posa contre la porte d’entrée. L’étudiante avait déjà la cafetière en marche et le liquide sirupeux de son café au caramel s’écoulait dans deux petites tasses savamment préparées. Ses doigts se refermèrent autour de la sienne, encore brûlante, et il porta la boisson à ses lèvres après avoir mordu dans un morceau de Toblérone. Après avoir échangé quelques mots avec Kevin et Trevor et avoir avalé un peu de pain noir et de charcuterie, il quitta définitivement le bâtiment, accompagné de Jessica. La porte claqua derrière eux. Le cœur pincé, il rejoignit sa BMW série 7. Il ne retrouverait plus la douce chaleur de son territoire avant une longue et insupportable semaine. Il balança sa valise dans le coffre de sa voiture et s’installa sur le siège conducteur. La fille était déjà installée sur le siège passager. Ses lunettes de soleil sur les yeux – il était d’autant plus sensible aux lumières fortes que son mal de tête n’avait cessé de croître, il mit le contact et démarra directement, sans prendre le temps d’attacher sa ceinture. Il fit une petite pause au bâtiment des Eta Iota, où il abandonna son amante, puis s’apprêta à démarrer pour de bon. Il encoda d’abord l’adresse qu’on lui avait fournie dans le GPS, valida la destination.

- Allez ! C’est quoi ça pour un trou paumé, encore ?

Il n’y avait qu’une trentaine de kilomètres d’écart mais, à première vue, la maison semblait perdue dans les tréfonds inexplorés des alentours de Miami. Il n’avait jamais été par-là. Il soupira. Cobb aurait au moins pu lui épargner le supplice de s’en aller se perdre dans l’entre du diable – Harmony. Ou peut-être espérait-il qu’ainsi, il ne quitte pas en douce le repère des Nu Zêta pour retrouver celui de sa Confrérie. Son regard glissa un temps sur sa montre. Il était 8h31. Cela faisait précisément une minute qu’il était censé être arrivé. Son pied écrasa l’accélérateur. Il allait devoir se presser. Il augmenta le volume de sa radio et provoqua le moteur de sport de sa machine. Il gagnerait du temps sur la route. En tous cas, c’était ce qu’il avait espéré jusqu’à ce qu’il débouche dans un étroit chemin de terre. Il ralentit brusquement, s’arrêta un instant. Il fronça les sourcils.  

- Qu’est-ce que c’est que cette connerie ?

Son index appuya sur la barre de métal qui reliait les deux verres de ses lunettes, les abaissant légèrement sur le son nez. Par-dessus, il jeta un coup d’œil circonspect à son GPS. Ce dernier lui indiquait pourtant de continuer à s’enfoncer là-dedans pour les quinze kilomètres restant, et il ne laissait apparaître aucune autre route plus abordable. Il était 8h42.
Lui qui avait toujours été un amoureux de la vitesse, il n’avait pas souvenir d’avoir déjà roulé si lentement. Dopé au passage de cent, son moteur ronronnait de souffrance alors que son conducteur ne l’autorisait pas à dépasser les trente. Il avait plu, la veille, et le terrain était impraticable. Entre boue, bosses et crevasses, il avait l’impression qu’on lui demandait de réaliser un parcours de motocross. C’était comme s’élancer sur le mont Ventoux avec un vélo de ville, à cette différence prêt que le mont Ventoux avait au moins le mérite d’avoir une route, et qu’il n’aurait eu aucun scrupule à rayer un vélo de ville. Sa BMW, c’était différent, et elle était si basse qu’avec un terrain comme celui-ci, il suffisait de peu. Il tapa ses deux mains sur le cuir du volant.

- Allez, putain ! Quelle route de merde!

Aussi l’Allemand rageait-il intérieurement, jurant sur chaque bosse qui secouait l’engin et salissait un peu davantage la peinture noire dans il prenait d’habitude si soin. Lorsqu’il passa sous une grosse pancarte de bois qui lui indiquait qu’il arrivait dans le domaine d’un ranch, il plissa les yeux. Il n’avait jamais été question de ça. Son regard s’évanouit un temps à gauche, un temps à droite. Il n’y avait aucune trace de civilisation. Juste des prés mal entretenus peuplés de moutons et surtout… du bois. A chaque recoin, il y avait des arbres, et encore des arbres, réunis en un amas qui formait une gigantesque forêt. Si elle le saoulait un peu trop, il pourrait au moins violer la garce et jeter son corps en secret ; personne n’en saurait jamais rien. Avec un peu de chance, un fennec boufferait même son corps. L’idée lui arracha un sourire, sourire qui s’évanouit aussitôt car il manqua d’écraser deux clébards qui venaient déboucher comme des dératés des fossés. Il sursauta, pila net. Il reprit son ascension, plus doucement encore. Il soupira bruyamment. Il était 8h57.

- Dégagez, putain… Dégagez ou je vous écrase !

À 9h07, les premières traces de vie humaine depuis des kilomètres en dehors de vieux barbelés rouillés se dessinèrent enfin devant lui. Dans sa tête d’athée, l’ave Maria lui chantait des louanges. Il arrêta sa voiture sur un carré de terre qu’il devinait être un parking. Son front s’appuya lourdement sur le volant. Il prit une profonde inspiration, les yeux clos. Dehors, les deux chiens continuaient à aboyer joyeusement. Infatigables prédateurs, ils guettaient les faits et gestes de celui qui, peut-être, leur accorderait un peu d’attention. Il le savait. La route n’était rien encore. À la minute même où il allait sortir de cet engin allait commencer son véritable calvaire. Ses doigts glissèrent dans la poche de son jeans. L’esprit vagabond, il profita d’une dernière cigarette. Puis, enfin, il retira sa clé du contact et ouvrit sa portière. Il était 9h13. Il avait quarante-trois minutes de retard.  
Le cuir noir de sa première Alden fit connaissance avec la texture bourbeuse du sol, s’y enfonça aussitôt, bientôt suivie par la seconde. Il jura. Sans compter sa voiture, cela faisait mille balles dégueulassées. Il claqua maladroitement la portière, se retourna et...

- Non, non, non, non, non… NEIN !

L’un des chiens, aux pattes aussi boueuses que l’étaient maintenant ses chaussures, s’était élancé dans une course effrénée en sa direction, et lui sauta allègrement dessus malgré ses avertissements sévères, les coussinets bien appuyés contre son t-shirt et son pull abercrombie. Il pouvait ajouter trois-cent cinquante dollars aux comptes. Avec plus ou moins de difficulté, il repoussa la créature envahissante.

- Allez, dégage ! Dégage, saloperie ! Tu vois pas que tu m’emmerdes, là ?

L’autre lui aboyait vulgairement dessus. Il l’ignora. Libéré de son étreinte particulière, il rejoignit le coffre de sa voiture pour en sortir son sac. Il le jeta sur ses épaules, verrouilla la BMW et pris la direction de la propriété. Splotch, splotch, splotch. Ses chaussures étaient de plus en plus sales, et il y avait de la boue vraiment partout. Tandis qu’il s’avançait à la découverte de ce nouveau paysage, ses pupilles se perdaient dans chacun de ses recoins mal entretenus – et c’était peu dire, parce qu’il n’y avait presque que ça. Outre les bois, il y avait de nombreuses écuries. Ce qui était effrayant, c’est qu’il n’y en avait pas une de pleine. En dehors de ces saletés de clébards, de quelques poules et certainement d’une multitude d’un sec, il n’y avait rien. Son regard se perdit dans un box. Rien de rien, et surtout pas le signe d’une présence humaine. C’était complètement mort. Il avait l’impression d’être dans u parc d’attraction abandonné. On lui avait refilé la mauvaise adresse, ou quoi ? Il tourna sur lui-même, visiblement perdu.

- ‘Y a quelqu’un ? Wouhou ?

Aucune réponse.

- D’accord…

Il haussa les épaules, continuait sa reconnaissance des lieux. Le chien le plus turbulent le suivait en haletant, l’air benêt, mais semblaient avoir abandonné l’idée d’obtenir de lui une caresse. Le garçon soupira et s’appuya contre la porte fermée d’un box. Pourquoi cette cruche ne lui avait pas donné un numéro de téléphone, ou quoi que ce soit pour la contacter ? Machinalement, il frotta les larges cernes qui couvraient ses yeux masqués par ses lunettes. La nausée commençait à monter et son mal de tête à s’affirmer. La gueule de bois devait commencer à faire son effet. Agacé, il sortit son téléphone de sa poche. Habiles, ses doigts appuyèrent frénétiquement sur les touches du clavier. Il envoya un message à Trevor, commença ensuite à surfer sur le net. Ce n’était pas le top mais, visiblement, le réseau passait. Pour l’instant. Ses sourcils se plissèrent. Le souffle chaud de quelque chose lui caressait les cheveux, et s’il s’était une seconde imaginé que cela pouvait être dû au vent, il se ravisa bien vite lorsque ce quelque chose lui donna un petit coup sur l’arrière du crane. Surpris, l’étudiant fit brusquement volte face.

- Qu’est-ce que… ?!!

Lorsqu’il aperçu la silhouette de ce qu’il comprit ensuite n’être qu’un cheval, il laissa sa tête basculer en arrière. Ok. Ce n’était pas si vide que ça, finalement. L’animal laissa sa tête sortir du box. En sursautant, il avait fait tomber son i-Phone juste en-dessous. Il leva les bras devant lui :

- Ok. Tout doux, hein, machin.

Il s’abaissa lentement, comme s’il avait cherché à calculer les réactions de l’équidé et qu’il avait peur de se faire mordre ou attaquer. Equidé qui semblait n’en avoir absolument rien à faire de son cirque, préférant mâchouiller avidement sa poignée de foin. Le sportif se pencha et, du bout des doigts, rapprocha son téléphone de lui, centimètre par centimètre. Enfin, il le récupéra. Un sourire triomphal illumina son visage. Il frotta brièvement l’écran qui, heureusement, n’avait rien, sur son pantalon.

- Aoutch.

Voulant se redresser, il s’était cogné le sommet du crane contre les naseaux du cheval qui s’était abaissé pour voir ce qu’il faisait. Surpris, celui-ci renâcla et recula un peu vivement dans son box. Le chien profita de cet instant d’égarement pour sauter sur le dos de l’étudiant. Celui-ci poussa un nouveau juron lorsque ses genoux s’écrasèrent à leur tour dans la boue.

- Mais c’est pas vrai ?!

Il se redressa un peu violemment, lança un regard assassin au canidé qui, pour toute réponse, lui lécha innocemment le bout des doigts. Il releva la main.

- T’es aussi merdeux que ta maîtresse, toi, hein ! D’ailleurs, ça m’arrangerait si tu pouvais aller me la chercher. précisa-t-il, désabusé. Si elle n’était pas là dans précisément trois minutes, il s’en irait. Dans sa tête, il commença le décompte.


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Dernière édition par Emeric Kürschner le Mar 30 Déc 2014 - 21:56, édité 1 fois
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